Des symboles américains recyclés dans les manifestations en Israël
Les seules explications politiques sont insuffisantes pour rendre compte de la violence du conflit intérieur actuel en Israël, qui dépasse tout ce qu’on a pu voir depuis plusieurs décennies. Il y a donc un niveau symbolique ou spirituel, qui permet seul de rendre compte de cette violence et de l’expliquer. Il porte sur l’identité profonde d’Israël en tant que peuple et en tant que nation. Israël doit-il être et sera-t-il un État juif conforme à sa vocation prophétique, ou bien un État occidental dans lequel le judaïsme serait réduit à la seule sphère privée, selon le modèle de l’émancipation – assimilation ?
Pour illustrer ce conflit symbolique et spirituel, je voudrais m’arrêter dans les lignes qui suivent sur quelques éléments visuels aperçus dans les manifestations de rue actuelles et dans les médias, qui en rendent compte de manière quotidienne et quasi incessante, le plus souvent sous un angle sympathique et militant. « Une image vaut mille mots ». L’adage déjà ancien reste valable aujourd’hui comme hier. L’analyse des slogans visuels et des symboles utilisés dans les manifestations contre la réforme judiciaire dans les rues d’Israël montre qu’ils sont très largement importés d’un contexte culturel américain, ce qui corrobore le fait qu’Israël est devenu le théâtre d’un affrontement culturel global entre deux visions du monde opposées, qui dépasse les frontières de notre petit-grand pays[1].
Margaret Atwood est une romancière américaine. Son roman La cape écarlate décrit un monde imaginaire et cruel, dans lequel un pouvoir tyrannique séquestre les femmes et les transforme en machines à procréer. Comment ce roman écrit en 1985 est-il devenu un des symboles marquants des manifestations actuelles en Israël ? Pour le comprendre, il faut s’arrêter sur le rôle des récits fondateurs et des mythes dans la mobilisation et dans la manipulation des foules.
Ce roman dystopique a été écrit, de l’aveu de son auteur, pour exprimer sa crainte de la droite religieuse américaine, après l’arrivée au pouvoir de Ronald Reagan. Le rapport avec la situation actuelle en Israël peut sembler ténu, mais c’est précisément la force des symboles de pouvoir être repris dans des contextes culturels différents… Hannah Benoualid écrit fort justement que nous les utilisons pour parler des cauchemars qui nous taraudent[2].
Cela est bien évident aujourd’hui en Israël, où les manifestations sont tout autant dirigées contre la réforme judiciaire que contre le cauchemar fantasmatique d’une théocratie juive. (J’ajoute que la notion même de « théocratie juive » est problématique, car le judaïsme a toujours distingué entre la prêtrise et la royauté). Dans ce contexte, le recours à un symbole visuel importé des États unis est d’autant plus significatif, qu’il permet de court circuiter tout débat rationnel sur la signification véritable d’un État juif et sur la place de la femme dans le judaïsme… En manifestant déguisées en servantes écarlates, les militantes féministes israéliennes évacuent l’objet véritable d’un débat possible et souhaitable et le remplacent par un objet symbolique et fantasmatique.
Cette manipulation symbolique et politique n’est donc pas un simple procédé rhétorique, celui qui consiste à identifier l’adversaire à un monstre pour mieux l’écarter (procédé bien connu qu’on désigne aujourd’hui comme délégitimation ou nazification). Elle est aussi et avant tout un mécanisme psychologique, qu’on pourrait décrire comme consistant en une auto-intoxication et comme un état de frayeur induit volontairement, comme sous l’effet de troubles psychotiques. En désignant le gouvernement de Binyamin Nétanyahou, sa politique et sa réforme judiciaire comme « la dictature », ou comme la « coercition religieuse », ses opposants « jouent à se faire peur ». Mais ce jeu est d’autant plus dangereux qu’ils finissent par croire aux symboles qu’ils agitent…
Cette manipulation du symbole de la « servante écarlate » et d’autres est d’autant plus significative, que le conflit culturel qui traverse Israël oppose en définitive, de manière schématique, la vision d’un État juif à celle d’un État occidental. En important dans l’espace public israélien des symboles et des thématiques venus des Etats Unis, les manifestants démontrent que leur combat est bien celui de valeurs étrangères à la culture israélienne (entendue au sens large). Ils défilent certes sous le drapeau bleu et blanc, récupéré au service de leur cause par un coup de génie publicitaire, mais leur cause est bien celle d’une culture étrangère, occidentale et américaine, qu’ils entendent imposer au peuple d’Israël. (à suivre…)
Pierre Lurçat
[1] Un autre exemple est le symbole du poing fermé, emprunté lui aussi aux Etats-Unis, où il a été notamment utilisé par les mouvements noirs américains dans les années 1960 et repris par la JDL.
[2] Je remercie Hannah Benoualid qui a porté à mon attention l’article d’Irit Linor évoquant Margaret Atwood, qu’elle a traduit sur son excellent blog Boker Tov Yerushalayim (wordpress.com).
Petits extraits de cette satire :
*auto-intoxication*
*jouer à se faire peur*
* troubles psychotiques*
*manipulation symbolique et politique *
*culture étrangère, occidentale et américaine *
*symboles américains recyclés *
Et, pour couronner le tout :
* que leur combat est bien celui de valeurs étrangères à la culture israélienne *…….
J’ignorais que nos élites et les valeureux soldats qui assurent votre protection et la survie du peuple Juif, pouvaient être qualifiés de la sorte ! Je ne suis pas de gauche et mon mérite n’en est que plus grand !
*auto-intoxication*
*jouer à se faire peur*
* troubles psychotiques*
*manipulation symbolique et politique *
C est exactement ca que la gauche fait . Vous avez beau dire que vous n etes pas de la gauche, tous vos ecrits prouvent le contraire.
Et voila encore …. Ni JL Ledo, ni Daniel Haik et maintenant Pierre Lurcat font partie de votre liste noire ! Bravo. Tous ceux qui veulent la paix en Israel sont des menteurs, vous – le « pas-gauchiste – vous voulez la paix a la maniere des gauchistes.
*culture étrangère, occidentale et américaine *
Qui vous em…. royalement éventuellement. Excepté cette fois pour être gentille : je suis Juive sepharade croyante et pratiquante. Je n ai absolument rien de la culture étrangère, occidentale et américaine. Vous avez oublié canadienne. Je vous défie d être aussi d etre aussi bon juif que moi.
Canadienne, vous ne l’êtes pas ou plus….je n’oublie jamais rien….je ne le mentionne pas, c’est tout ! En revanche, vous confirmez que vous n’êtes gentille que exceptionnellement…vous auriez pu ajouter * et pas très longtemps * ! Pour vous, c’est cela être une bonne Juive ? Si oui, vous êtes très indulgente pour vous-même et pas du tout avec celui l’est vraiment !
Alors si vous n oubliez rien, laissez moi vous dire que vous commencez a oublier. Je suis citoyenne canadienne, residente permante aux States. Ca vous en bouche un coin ??? Et plus encore, si vous n oubliez jamais, j ai toujours mentionné que je vis aux States et au Canada ! Autre chose que vous voulez savoir ?
Au sujet d etre une bonne juive … Je vais vous avouer un autre petit secret … je m en veux de vous repondre comme ca, parce que justement j ai ete elevée dans le respecter pour les personnes agees. Avec vous, impossible car vous n arretez pas de provoquer et d insulter. Un ange vous le rendriez satan. Je demande pardon a Hachem de vous manquer de respect, mais vous ne me laisser pas le choix. Parlez comme D, Haik, J.P. Ledo ou Pierre Lurcat et personne ne sera agressif avec vous tout en respectant votre facon de penser. Je vous mets au defi !
Rina, je ne puis relever ce défi, je jette l’éponge…..m’exprimer comme J.P. Lledo ? …JAMAIS !!! Et pour ça, je suis convaincu que Hachem me remerciera !
Je ne vous suggere pas de vous exprimer comme Lledo, je vous suggere d arreter d insulter et d etre arrogant. Vous aimez la provocation mais ce n est pas avec la provocation qu on gagne … on gagne plutot des ennemis.
Merci a Pierre Lurcat d’exprimer aussi clairement ce que representent les deguisements et les symboles repris par les manifestants qui se font peur. Ils crient a ls dictature, a la theocratie, …. sans ls moindre analyse de la reforme judiciaire. J’espere seulement qu’il n’y aura pas trop de recul de la coalition car maintenant que lr problemr a ete etudie, il faut aboutir a la reforme.
L’analyse de Pierre Lurçat est juste. Pour le courant « assimilationniste » d’Israël la Cour Suprême est la seule force institutionnelle sur laquelle il peut s’appuyer pour faire prévaloir ses vues, puisque le peuple désire dans sa majorité garder intacte son identité juive. La Cour Suprême a mis sous tutelle les politiques élus par le peuple afin de faire prévaloir des positions dites de gauche, en fait plus précisément une idéologie qui vise à faire disparaître progressivement le caractère juif de l’Etat d’Israël, à le faire correspondre en tous points aux sociétés occidentales. Même si la réforme passe, le problème maintenant révélé subsistera et se développera.
Il s’agit de préserver le statut de la cour suprême.
C’est la raison essentielle des manifestations.
Mr. Lurçat se concentre à dessein sur les marginaux des manifestants(tes) et les transpose sur le devant de la scène pour brouiller les cartes.
Si déjà se focaliser sur des symboles, il faudrait analyser les causes qui manifestent les craintes et les angoisses d’une grande partie (quand même) de la population. Combien de femmes siègent au sein de notre gouvernement actuel? combien de femmes ne peuvent divorcer sans le consentement de leur époux? etc.
– Entre un « État juif conforme à sa vocation prophétique, ou bien un État occidental dans lequel le judaïsme serait réduit à la seule sphère privée » il existe beaucoup de nuances qui serviraient de passerelles afin que ce pays reste conforme à l’esprit « aime ton prochain comme toi-même ».
La question de la transmission par l’éducation me semble un point essentiel ici, mais dans les deux sens pour éviter la méfiance, traduite par menace par certains dirigeants des deux camps.
La définition de la judéité n’est pas exclusive et la liberté de penser est essentielle dans toute démocratie pour le respect de tous et de chacun, et surtout pour un avenir commun en israël.