La Liste arabe unifiée est en crise ouverte. Cette liste est formée de plusieurs partis aux idéologies antinomiques mais dont le seul point commun est l’opposition à l’idée d’un Etat juif. Depuis quelques temps, le député Mansour Abbas, du parti islamique Ra’am fait cavalier seul et exprime publiquement une ligne tactique indépendante. Plus que cela, il a déjà collaboré à plusieurs reprises avec le gouvernement et Binyamin Netanyahou dans certaines initiatives.
En résumé, il se dit prêt à collaborer avec n’importe quel gouvernement israélien, y compris sous Binyamin Netanyahou, si cela sert les intérêts de la population arabe. Il ne cache pas non plus qu’il n’est pas du tout d’accord avec la manière qu’a Ayman Oudeh de diriger la Liste arabe et sous-entend qu’il pourrait briguer sa place.
Dans les diverses interviews qu’il accorde, Mansour Abbas indique qu’il n’est ni de droite ni de gauche, mais qu’il juge au cas par cas, selon les domaines : tantôt avec la droite sur les sujets sociaux et sociétaux, tantôt avec la gauche et même l’extrême gauche les questions liées au conflit israélo-palestinien.
Les critiques se sont faites de plus en plus audibles dans les autres composantes de la liste, mais ce qui a fait “déborder le vase” a été la présence mardi de Mansour Abbas sur le plateau de la chaîne de droite Aroutz 20 et l’interview qu’il y a accordée, dans laquelle il a une nouvelle fois exposé sa vision iconoclaste, allant jusqu’à dire : “Si la Liste arabe emprunte la direction que je propose, elle continuera à exister, mais si elle reproduit les mêmes erreurs que par le passé, elle n’aura plus de raison d’exister”.
Mercredi, les réactions sont virulentes chez les partenaires de Mansour Abbas. Le président du pari Balad et n°2 de la Liste arabe,, Matanes Shahadeh a lancé les hostilités : “Il n’est pas étonnant que Mansour Abbas ait choisi le porte-voix de Netanyahou et de l’extrême-droite pour annoncer son départ de la Liste arabe unifiée. C’est le moyen le plus authentique de servir Bibi. Le député Mansour Abbas n’est pas digne de diriger le parti. Nous continuerons sans lui”.
Sa collègue Heiba Yazbaq, toujours dans l’outrance, a écrit : “La Liste arabe unifiée représente un public entier qui a choisi une plateforme et une voie politiques. Ceux qui choisissent de collaborer avec les forces racistes et oppressives sur le compte de la plateforme politique perdent toute légitimité, abandonnent la population qu’ils sont censés représenter et abusent du pouvoir qu’elle leur a confié”.
Les réactions d’autres “tenors” de la liste, tels que son président Ayman Oudeh ou encore d’Ahmad Tibi et Aïda Toumah-Suleiman, sont encore à venir et les prochaines séances de la Liste arabe unifiée seront animées. Pour l’instant, Mansour Abbas dément vouloir quitter le bateau et affirme son intention d’influencer de l’intérieur pour tenter de le faire changer de cap. On verra ce qui se passera en cas de nouvelles élections. Une implosion de la Lise arabe unifiée pourrait entraîner la disparition de l’une ou deux de ses composantes qui ne passeraient pas le seuil d’éligibilité.
Mais que l’on ne s’y trompe pas. Abbas Mansour n’est pas devenu sioniste et son parti est celui de la branche sud du Mouvement islamique arabe israélien, proche des Frères Musulmans. Mais sa “fronde” exprime un sentiment grandissant dans la population arabe israélienne vis-à-vis de se représentants à la Knesset, généralement moins occupés à se soucier de ses besoins quotidiens que de mettre en avant la question “palestinienne”, de scander leur opposition à tout ce qui fait de l’Etat d’Israël un Etat juif et selon ses dires, “d’enfermer la Liste arabe dans un partenariat exclusif avec la gauche israélienne”.
Photo capture écran Aroutz 20