Le mariage peut faire peur, on se demande si l’on fait le bon choix et si la personne que l’on décide d’épouser sera celle que nous pensons qu’elle est.
Pour Maître Sophie Cohen, cette question prend une dimension particulière, elle qui s’occupe depuis plusieurs années de cas de divorce: ”Un mariage sur trois finit par un divorce”, assène-t-elle. De quoi refroidir les ardeurs des candidats à la noce… Mais surtout, cette avocate tire la sonnette d’alarme dans son ouvrage ”Le conjoint prédateur” (2012) contre les pervers narcissiques et autres personnes toxiques qui ruinent leur mariage et la vie de leur époux(se). LPH est allé prendre conseil auprès de cette spécialiste afin de savoir comment éviter de tomber dans le piège et ainsi pouvoir s’investir dans une relation saine et vouée à la réussite.
Le P’tit Hebdo: D’après vous, la peur de l’inconnu que représente le mariage est la cause du célibat tardif?
Maitre Sophie Cohen: Il est vrai qu’il existe une certaine peur qui peut entrainer des réticences pour s’engager. Pour ma part, j’estime que la raison principale de ce célibat tardif se situe à la génération précédente. La plupart du temps, les jeunes qui n’arrivent pas à se marier ont au moins un parent qui estime qu’il a fait son enfant pour lui-même et qui n’accepte pas la séparation. Il a créé avec son enfant une relation fusionnelle et ne le laisse pas prendre son envol. Dès lors, l’enfant va se retrouver dans un conflit entre la volonté de faire sa vie et la fidélité qu’il a envers ses parents. Ces comportements sont très insidieux, très manipulateurs.
Il convient aussi de prendre en considération l’influence des schémas que la société nous impose: un idéal féminin et masculin qui ne correspond pas à la réalité, une perfection qu’il est impossible de trouver et que l’on fixe comme norme.
Lph: Quel est le message que vous souhaitez faire passer à travers un ouvrage comme ”Le Conjoint prédateur”, dont on pourrait plutôt penser qu’il n’incite pas au mariage…?
Me S.C.: On dit des jeunes qu’ils sont ”en âge de se marier” mais ils ne sont pas préparés au mariage. Mon expérience auprès de couples déchirés et de vies souvent détruites me permet d’affirmer que si l’on veut aider les gens à se marier, alors il faut justement leur parler des dangers que comportent certaines relations. Ces personnes avaient pourtant trouvé ”celui ou celle qui leur correspondait”… Je suis convaincue que plus l’on parle de ces problèmes plus on sauve des mariages et on permet de créer des unions saines.
Lph: Comment s’apercevoir que l’on a en face de soi une personne ”toxique”?
Me S.C.: Il est vrai que le propre de ces personnes est de paraitre bien sur tous les aspects. Elles ont la capacité de se plier exactement aux exigences de celui ou celle qu’elles fréquentent. C’est pourquoi, je conseille de ne pas trop se dévoiler au début d’une relation, parce que les ”pervers narcissiques” savent tout retourner à leur avantage. Apprenez, dans un premier temps, à observer la personne que vous avez en face de vous, en vous renseignant aussi sur sa famille, auprès des gens qui l’ont connu auparavant.
Il est également fondamental de s’enquérir de la relation que la personne que vous fréquentez entretient avec ses parents. A-t-elle des parents intrusifs? Si oui, sait-elle les tenir à distance?
Lph: Quelles sont les lignes rouges qui nous imposent de tout arrêter?
Me S.C.: Elles peuvent être difficiles à établir. D’une part, ces personnes sont de fins manipulateurs et d’autre part, il ne s’agit pas de tomber dans une paranoïa absolue.
Je dirais que le premier indice qui doit nous mettre en alerte, ce sont les réflexions de notre entourage. Les personnes à l’extérieur de la relation peuvent souvent voir des choses que l’on ne voit pas de l’intérieur. Etre amoureux ne dispense pas de garder les pieds sur terre et d’écouter les gens autour de nous.
Ensuite, il apparait que la relation au travail, à l’argent ou son niveau de maturité, notamment vis-à-vis de ses parents sont aussi de bons moyens de savoir. Il est important de ne pas se précipiter et de prendre soin d’observer la personne dans différentes situations.
Le ”trop beau pour être vrai” doit allumer des signaux de danger. Lorsque l’on aime une personne alors on l’accepte telle qu’elle est. Cela signifie qu’une personne doit avoir sa personnalité, son caractère.
Lph: Le mariage demeure tout de même une aventure pleine de bonheur et positive?
Me S.C.: La question n’est pas sur le mariage en soi, mais sur ”avec qui?” ce mariage est conclu. Il faut être conscient que des personnes toxiques existent et qu’elles peuvent causer des dégâts sur leur conjoint mais aussi sur leurs enfants. C’est comme quand on veut conduire une voiture, on doit savoir les dangers de la route. Une fois que l’on sait cela, on est doté d’une énergie positive pour aborder le mariage et pour être plus fort dans sa relation.
”Le Conjoint Prédateur”, disponible Librairie Vice-Versa, Jérusalem et Librairie du Foyer, Tel Aviv.
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay