LPH a interrogé Albert Lévy, candidat à la prochaine Knesset sur la liste du parti Zehout, de Moshé Feiglin. Comment l’homme de droite qu’il est voit-il la coexistence avec les Musulmans dans notre pays?
Le P’tit Hebdo: Vous figurez dans les 15 personnes choisies par Zehout pour la liste à la prochaine Knesset. Finalement, nous vous connaissons assez peu. Qui êtes-vous?
Albert Lévy: Je suis né en 1952 au Maroc que j’ai quitté avec mes parents à l’âge de 17 ans, pour la France. Ces années passées au Maroc sont une composante forte de ma personnalité et me permettent d’affirmer que je connais bien le monde arabo-musulman.
Après mon bac, j’ai étudié à Sciences-Po, puis à l’ESSEC et j’ai été entrepreneur toute ma vie. C’est à l’âge de 42 ans, marié et père de trois enfants que j’ai fait mon alya. J’y ai dans un premier temps poursuivi mon métier d’entrepreneur et je peux dire que notre intégration a été réussie aussi bien pour moi que pour mon épouse, médecin et nos quatre enfants.
Lph: Quand et pourquoi vous êtes-vous lancé en politique?
A.L.: La politique m’a toujours intéressé. En 2011, Emmanuel Navon, un excellent ami, m’a demandé de l’aider dans sa course pour les primaires du Likoud. Je suis alors devenu membre du Likoud et en cette qualité je pouvais soutenir trois candidats. En dehors d’Emmanuel Navon, je me suis rapproché de Moshé Feiglin et de Tsipi Hotobelli, qui étaient les plus proches de ma sensibilité politique. Moshé Feiglin est devenu député et vice-président de la Knesset, Tsipi Hotobelli, députée, mais mon ami Emmanuel Navon n’est pas rentré à la Knesset, malgré son bon score. Lors des primaires suivantes, pour la Knesset actuelle, il ne s’est pas représenté, déçu par l’ambiance qui régnait au Likoud. Ce climat délétère s’est confirmé avec le sort réservé à Moshé Feiglin lors de ces primaires, poussé vers la sortie. Feiglin a alors créé Zehout et a emmené avec lui les 600 membres de sa formation ”Manigout yehoudit”. Il s’est souvenu de moi et m’a appelé. J’ai démissionné du Likoud et je l’ai rejoint. J’ai été séduit par son approche.
Le parti a choisi 15 candidats pour la liste à la 21e Knesset. D’ici peu des primaires ouvertes à tous les citoyens israéliens permettront de déterminer la place de chaque candidat sur la liste finale.
Lph: Des primaires ouvertes? Cela signifie que des personnes de gauche comme de droite, que des Arabes israéliens pourront voter?
A.L.: Oui tout à fait. D’une manière générale, je pense que les notions de droite et de gauche ne correspondent plus à la réalité actuelle. La ligne de démarcation se trouve entre ceux qui veulent exercer une souveraineté israélienne pleine et entière et ceux qui veulent tout donner à l’Autorité palestinienne.
Lph: Cela signifie-t-il que des Arabes pourraient adhérer à Zehout?
A.L.: Pourquoi pas? Notre parti n’est pas raciste. Ceux qui veulent devenir membres, le peuvent. La seule condition: être conscient que nous avons les mêmes droits mais aussi les mêmes devoirs. Aujourd’hui, on parle souvent de discrimination, mais les vrais discriminés sont les Juifs! Ils risquent leur vie pour protéger tous les citoyens d’Israël, sans distinction, pendant que l’immense majorité des Arabes ne donnent rien à l’Etat. Nous sommes un pays en guerre, et des citoyens en notre sein se permettent de collaborer avec l’ennemi! La situation sur le Mont du Temple en est aussi un exemple flagrant, et les circonstances dans lesquelles les Juifs sont défavorisés sont malheureusement courantes.
Lph: Comment régler ce problème de discrimination? Si la base de notre cohabitation avec les Arabes est l’égalité des droits et des devoirs, comment y arrive-t-on?
A.L.: Aucun gouvernement depuis 1967, n’a été capable d’exercer une souveraineté pleine et entière de la mer au Jourdain. Il ne peut y avoir qu’une seule souveraineté. Tant que l’on tolère à nos portes, une entité qui, en violation des Accords d’Oslo, propage un discours antisémite et antisioniste et encourage le terrorisme, qui n’a même pas su appliquer son autorité à Gaza, qui nourrit ses enfants d’un venin terrifiant, alors nous ne pourrons pas vivre en paix. La seule solution viable est l’application pleine et entière de notre souveraineté, sur la totalité du territoire de Judée-Samarie.
Lph: Que faites-vous des Arabes qui y vivent?
A.L.: Le parti Zehout a un programme très précis, qui ne repose absolument pas sur le rejet des Arabes. Nous les mettrons face à un choix, celui que nous aurions dû proposer aux Arabes en 1948 déjà, au lieu de leur imposer la citoyenneté israélienne.
La première option concerne ceux qui voudront devenir citoyens israéliens. Ceux-là devront traverser un parcours long et compliqué pour obtenir leur citoyenneté, comme cela se fait ailleurs, en Suisse ou Etats-Unis, par exemple. Ils devront se plier au principe de base: égalité de droits mais aussi de devoirs. Ils devront faire preuve d’une loyauté sans faille envers l’Etat d’Israël et se plier à toutes leurs obligations de citoyens, au même titre que les Juifs.
La deuxième option est celle de refuser la citoyenneté israélienne. Nous respectons ce choix, les personnes concernées bénéficieront d’un statut de résidant permanent, ce qui ne recouvre pas le droit de vote. De toute façon, ils ne votent pas plus aujourd’hui au sein de l’Autorité palestinienne, qui n’organise pas d’élections.
La troisième voie sera celle du départ volontaire et encouragé. Ceux qui désireront partir seront aidés financièrement par l’Etat d’Israël. Un départ sur des bases généreuses et humanistes, bien loin de ce que les Juifs ont vécu quand ils ont quitté les pays arabes.
A cela, j’ajoute une opinion personnelle: la plupart des habitants de Judée-Samarie ont des passeports jordaniens, puisque ces territoires ont été occupés illégalement par la Jordanie pendant 20 ans. Ils n’ont même pas besoin d’un statut supplémentaire: ils sont sujets du royaume Hachémite.
Lph: Donc, pour vous, il n’est pas nécessaire d’appeler à se séparer des Arabes, à arrêter de les employer, on pourrait très bien créer une société de coexistence?
A.L.: A partir du moment où ils sont employés légalement, qu’ils sont prêts à accepter la souveraineté israélienne, il n’y a pas de problème. Beaucoup d’Arabes en Israël et en dehors, savent que leur vie est bien meilleure sous souveraineté israélienne. Ils jouissent de toutes les libertés, sous réserve de respecter leurs devoirs.
Lph: Vous connaissez bien le monde arabo-musulman pour y avoir grandi. Pensez-vous réellement que les Arabes sont prêts à accepter de vivre sous l’autorité des Juifs?
A.L.: Je dis souvent que je suis musulmanophile et islamophobe. La majorité des Musulmans sont des gens avec lesquels nous pouvons vivre. C’est l’Islam qui est une religion conquérante: il doit conquérir le monde, faire de toutes les terres des terres d’Islam. Un Musulman a le droit de mentir et de ruser si cela fait avancer cette cause. Nous, les Juifs, avons un statut de Dhimmis, parce que nous vivons sur une terre conquise par l’Islam: nous avons le droit de pratiquer notre religion mais nous devons être humiliés et opprimés.
La solution vient d’une réforme en profondeur de l’Islam, comme en a été capable l’Eglise. On observe, dans le monde contemporain, des mouvements timides en ce sens, notamment au Maroc. Les Arabes musulmans voient bien que le monde occidental n’est pas prêt à se plier, à se soumettre. Nous devons donc poser nos règles du jeu; les droits et les devoirs imposés à chaque citoyen. Les Musulmans sont bien mieux traités en Israël que dans bon nombre de pays occidentaux, ils s’en rendent compte. Nous devons appeler de nos vœux et encourager cette réforme de l’Islam indispensable à notre coexistence.
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay