Le Conseil européen va adopter une déclaration historique exprimant son intention de combattre l’antisémitisme et assurer la protection des Juifs du continent. Deux pays s’étaient opposés dans un premier temps à cette déclaration ou à sa formulation, mais l’intervention de la chancelière allemande Angela Merkel et du président français Emmanuel Macron les ont finalement convaincus de la soutenir. Il s’est agi de la Suède, qui voulait que soit rajoutés des articles sur le combat contre l’islamophobie (!), et de l’Espagne qui s’opposait au principe même de cette déclaration car selon Madrid elle pourrait empêcher de critiquer Israël!
L’antisionisme n’a pas été inclus nommément dans la déclaration, mais uniquement par allusion: “Le Conseil européen considère que l’antisémitisme, y compris lorsqu’il s’exprime sous couvert de positions politiques, ainsi que le néo-nazisme, contribue à inquièter fortement les communautés juives en Europe”.
Les vingt-huit ministres de la Justice et de l’Intérieur de l’UE ont signé ce texte qui devrait être définitivement entériné vendredi par le Conseil européen. Ici également, il convient de noter le rôle déterminant de l’Autriche qui assurait jusqu’à récemment la présidence tournante de l’UE et qui a rédigé cette déclaration en coopération avec le Congrès juif mondial, dont un représentant avait même été invité à s’exprimer devant le forum des ministres concernés. A relever également le rôle important de la baronne Khatarina Von Schnubein, coordinatrice de l’UE pour la lutte contre l’antisémitisme, grande amie du peuple juif et de l’Etat d’Israël, qui a été l’une des chevilles ouvrières dans la rédaction de cette déclaration et son adoption…après 84 ébauches successives!
Israël a également été impliqué dans le processus, mais uniquement dans sa dernière ligne droite, par le biais de la représentation israélienne à l’Union européenne et les différents ambassadeurs d’Israël dans les pays européens.
Il s’agit d’une première historique, car c’est la première fois que le Conseil européen adoptera un tel texte sur le combat contre l’antisémitisme, signe que ce fléau fait hélas à nouveau partie du paysage européen.
Mis à part les aspects déclaratifs, le texte de onze pages contient aussi des articles opérationnels qui demandent aux Etats de l’UE de prendre des mesures concrètes en faveur des communautés juives, dans une stratégie holistique, qui va du financement de systèmes de protection pour les institutions juives jusqu’à l’enseignement accru de la Shoah en passant par les mesures judiciaires plus répressives ou le combat contre l’antisémitisme sur les réseaux sociaux.
Le Congrès juif mondial a indiqué qu’il supervisera désormais le passage de la parole aux actes dans les différents pays de l’UE. Il note par exemple une inégalité flagrante dans les moyens employés par les différents Etats pour assurer la protection des communautés juives. Certaines sont par exemple obligées de prendre en charge près de la moitié de leurs dépenses de protection, d’autres doivent carrément en assurer la totalité. C’est le cas de la Lituanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Suisse, la Macédoine, la Bosnie-Hertégovine, le Belarus et l’Ukraine. A l’opposé d’autres pays sont en pointe: la France, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Italie ou encore la Grèce.
Le Congrès juif mondial parle d’une “révolution” dans l’appréhension de l’antisémitisme par l’Union européenne car elle donne désormais la possibilité aux communautés juives de demander des mesures fortes aux gouvernements de leurs pays en se basant sur cette déclaration commune.
Un haut fonctionnaire du ministère israélien des Affaires étrangères a souligné que l’adoption de cette déclaration tombait au bon moment, après que les statistiques et sondages récents confirment une nette remontée de l’antisémitisme en Europe. Abandonnant le langage diplomatique, ce fonctionnaire a estimé que l’Europe et “consubstantiellement malade de l’antisémitisme, même 70 ans après la Shoah, sans rapport avec l’existence de l’Etat d’Israël”.
Autre nouvelle positive, une fois n’est pas coutume, l’ambassadeur de l’Union européenne en Israël, Emanuele Giaufret a exprimé le soutien de l’UE à l’opération “Bouclier du Nord” lancée par Tsahal mardi matin. Par le biais d’un tweet, il a dit: “Israël a le droit légitime de protéger sa population et son territoire”.
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