Le jour où Moché s’apprête à quitter le monde, il livre au peuple juif deux parachiot très courtes mais pourtant bien riches en enseignements. En peu de mots elles vont résumer des grandes idées du judaïsme. Les Rabbins s’arrêtent sur la juxtaposition de ces sidrot et sur leurs noms. Quel message vient nous enseigner le fait que Nitsavim et Vayeleh sont souvent associées ? Selon Rabbi Saadia Gaon, l’un des grands Maîtres qui vécut après la clôture du Talmud, ces deux parachiot forment en fait une entité textuelle. Ces chapitres nous livrent un enseignement d’une grande importance : chacun d’entre nous a la capacité de réunir en lui deux attitudes fondamentales… même si apparemment elles semblent s’opposer. Pour comprendre la pertinence de cette association, nous devons reprendre la traduction des mots Nitsavim et Vayélè’h. Nitsavim signifie « Vous êtes debout » avec l’idée d’une fondation très solide. Vayélè’h signifie simplement « Il alla ». Les commentateurs expliquent que ces deux mots viennent nous enseigner que nous devons constamment chercher à aller de l’avant, mais sans faire la moindre concession dans notre judaïsme. Nous allons mieux cerner ce principe avec deux exemples.
UNE ÉVOLUTION CONSTANTE
Le lien que nous tissons avec D.ieu se compose de deux paramètres : la Emouna et l’étude de la Torah. La Emouna est la base de la vie juive. Elle est un fondement et de ce fait elle précède l’étude de la Torah. Le mot Nitsavim est une allusion à la Emouna. Il renvoie, en effet, au fait « d’être debout », de se tenir bien droit sur ses pieds. Ce verbe évoque l’idée de quelque chose de solide, comme le fondement d’un édifice. Puis, quand nous avons élargi nos connaissances grâce à l’étude de la Torah, notre approche de D.ieu va quitter la sphère émotionnelle pour devenir plus intellectuelle. On est alors dans Vayélè’h (il alla) qui suppose l’idée de mouvement. En effet, celui qui étudie évolue constamment dans sa compréhension des voies de D.ieu. Or, s’il met toute sa volonté, exclusivement dans l’étude, il risque de réduire la part de la Emouna. C’est pourquoi Moché a juxtaposé les deux parachiot. Avant de quitter ce monde, Moshé vient rappeler à ses enfants que ces deux piliers de la vie juive sont indispensables et qu’ils doivent constamment parcourir (ensemble) notre existence.
LE FRUIT DU LABEUR
Le second exemple est un peu plus terre à terre. Après avoir prié, une personne se rend à son travail. Au début de la journée, elle est convaincue que sa réussite ne dépend que de la bénédiction divine. Cette idée est ancrée en elle comme un fondement de son existence. Effectivement, la paracha Nitsavim dont la traduction est « vous êtes debout » évoque l’idée d’une base solide. C’est notre Foi qui conditionne l’approche juive du travail et de tous les aspects de l’existence. Toutefois, quand les profits augmentent, grâce à des stratégies commerciales et financières, une personne peut devenir réticente à donner de l’argent pour aider des nécessiteux. On lui demande de donner du fruit de son labeur ! C’est alors qu’intervient la sidra de Vayélè’h (il alla). Cette personne a gravi les échelons de la réussite par ses propres moyens en pensant qu’elle seule est la clé de la réussite. C’est pour éviter une telle dérive que les deux textes sont associés. Ils nous rappellent que la Emouna doit imprégner notre comportement quotidien, même si l’initiative personnelle donne l’impression que D.ieu n’a qu’une part minime dans tout ce qui touche à notre gagne-pain quotidien. Ne nous fions pas à cette impression superficielle.
Gmar Hatima Tova. Que Hashem nous inscrive tous dans le Livre de la vie.
RAV YAACOV SPITEZKI = 054 23 99 791
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SHORASHIM
Le centre pour les étudiants francophones
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