L’arrestation, le mois dernier, d’un informaticien palestinien de la bande de Gaza, membre du Jihad islamique, qui était parvenu à infiltrer le système de transmission utilisé par les drones militaires israéliens, a suscité une très vive inquiétude au sein de l’état-major et du Shin Beth.
La surprise a été d’autant plus amère que ce hacker, qui a été inculpé d’espionnage, a réussi à avoir accès à la banque de données de l’aéroport international Ben Gurion, à la liste des passagers ainsi qu’au site de la police de la route en Israël. Ces intrusions sont d’autant plus alarmantes qu’elles ont été le fait de quelqu’un qui n’est pas vraiment un «génie» de l’informatique, avec du matériel basique qu’il est possible d’acquérir dans pratiquement tous les pays occidentaux. De plus, ce Palestinien a pu agir avant d’être repéré.
«Ce cyber-espionnage, s’il s’était poursuivi, aurait pu permettre de saboter nos opérations dans la bande de Gaza, aider le Jihad islamique à diriger ses roquettes vers des cibles sur le territoire israélien et provoquer d’importants dégâts et de nombreuses victimes», reconnaît un officier en soulignant que le Jihad islamique, la «deuxième organisation terroriste palestinienne la plus importante après le Hamas, est d’autant plus dangereux que ce mouvement est l’allié privilégié de l’Iran», considéré comme l’ennemi numéro un de l’Etat hébreu.
«Heureusement, le Jihad islamique ne dispose pas d’une branche militaire aussi développée que celle du Hamas, si bien que les images transmises et détournées de nos drones ne lui ont pas été d’une très grande utilité», ajoute l’officier. Selon lui, toutefois, il est possible que les renseignements recueillis aient permis à l’organisation de dissimuler et de déplacer des stocks de roquettes contre les attaques de l’aviation israélienne.
Les experts israéliens, qui ont planché sur le dossier, estiment que le hacker n’a eu accès qu’aux communications des drones de petite dimension, spécialisés dans les missions tactiques. En revanche, les communications des drones de plus grande dimension, employés notamment pour des bombardements et des opérations d’éliminations ciblées, utilisant des communications satellites, n’ont pas été hackés.
Selon l’acte d’accusation présenté contre le hacker, soumis à la censure militaire avant d’être rendu public, le hacker a été actif pendant plus de trois ans. Mais ces infiltrations ont cessé en 2014, ce qui l’a empêché de saboter les opérations menées par les drones lors de l’opération «Bordure protectrice» durant l’été de cette année-là. Mais il a pu sévir pendant la précédente grande opération «Pilier de défense» menée en 2012.
Les renseignements auxquels il a eu accès, concernant non seulement la bande de Gaza mais aussi le territoire israélien, auraient pu avoir des «conséquences catastrophiques», admet l’officier qui évoque plusieurs scénarios. En s’infiltrant dans le système informatique du réseau de caméras de la police, le Jihad islamique aurait pu tirer des roquettes en direction des routes les plus fréquentées aux heures de pointe. L’accès en temps réel à tous les mouvements d’avion à l’aéroport Ben Gurion aurait pu se traduire par des tirs de roquettes, qui n’auraient pas manqué de provoquer une paralysie total du trafic aérien civil. Bref, la menace était bien réelle.
Depuis 2014, assure l’officier, l’armée israélienne a grandement amélioré le cryptage de ses communications avec les drones. «Mais l’alerte a été chaude», poursuit l’officier. Il n’est toutefois pas certain que les systèmes israéliens soient désormais protégés des autres services de renseignement autrement plus puissants.
L’affaire du hacker palestinien a en effet mis en relief la vulnérabilité des systèmes de communication d’Israël, qui se présente volontiers comme une superpuissance en matière de cyber-sécurité. Mais cette image de marque avait déjà été sérieusement écornée lorsque les documents rendus publics par Edward Snowden avaient révélé que les services de renseignement britanniques et américains avaient pu infiltrer, pendant des années, des drones israéliens menant notamment des repérages en vue de raids contre les installations nucléaires iraniennes.
Edward Snowden, qui a rendu publique l’ampleur des programmes de surveillance de la NSA, a précisé que l’opération surnommée «Anarchist» avait été lancée en 1998 depuis une installation britannique dans les montagnes de Chypre et depuis un site de la NSA dans le nord de la Grande-Bretagne. Grâce à l’opération «Anarchist», la NSA était également parvenue à accéder aux écrans de contrôle des pilotes d’avions de combat F-16 israéliens.
Par TTU – JSSNews