Les larmes de la ministre des sports Miri Regev, à Abou Dhabi, lorsque la Hatikva a retenti pour les médailles d’or de nos judokas, resteront dans l’histoire. Mais, ce sont bien les médaillés qu’il convient de féliciter pour avoir fait honneur à notre drapeau: Sagui Mouki et Peter Paltchik. Ce dernier s’est livré à LPH sur cet instant particulier et sur ce que le sport peut représenter au-delà de la performance.
Savoir faire des sacrifices
Le judo et Peter Paltchik c’est une histoire qui dure depuis longtemps. Aujourd’hui âgéde 27 ans, il a commencé ce sport à 5 ans. ”Je suis né avec des problèmes de santé et du surpoids”, nous raconte-t-il, ”A cela se sont ajoutées des difficultés à me concentrer. Très jeune, on m’a inscrit aux cours de judo parce que c’était une discipline qui permettait de remédier à mes faiblesses”. Le résultat est convaincant, Peter progresse et sa santé aussi. Pourtant, les premières années, rien ne le prédestinait à être judoka professionnel. Il ne se voyait pas en faire son métier. Mais il constate au fur et à mesure, que ce sport lui colle à la peau: il est doué et devient même champion d’Israël. ”J’ai commencé alors à me dire que je pourrais être parmi les meilleurs dans le monde, si je continuais à m’entrainer sérieusement”.
Et il ne s’est pas trompé, à 20 ans, il devient vice-champion d’Europe. Des médailles, Peter en accumule: or, argent, bronze, dans les plus prestigieux tournois et championnats. Mais cette réussite n’est pas acquise d’avance. ”Bien entendu, lorsqu’on se lance dans une carrière de judoka, que l’on commence à participer aux compétitions internationales, il s’agit d’une décision qui doit être mûrie. Les conséquences ne sont pas neutres sur sa vie personnelle”, nous explique-t-il.
Peter s’entraîne deux à trois fois par jour et il doit être au maximum de ses capacités à chaque instant. Les compétitions en Israël et dans le monde s’enchainent à un rythme soutenu: une toutes les deux à trois semaines. Afin de rester performant, tout cela implique un mode de vie très réglé et presque sans écart. Horaires, repas, temps libre, tout est millimétré. Ainsi, Peter reconnait que toutes ses journées tournent autour du judo: ”Cela sous-entend beaucoup de sacrifices, depuis renoncer à des sorties entre amis jusqu’à prendre du temps sur sa famille et son couple. Le sport de haut niveau est très exigeant”.
Et qu’est-ce qui vous persuade que le jeu en vaut la chandelle? ”Tout ce travail a un but: gagner la médaille d’or et entendre résonner la Hatikva. Lorsque cela arrive c’est un bonheur pur, qui fait oublier tous les efforts qu’il a fallu fournir pour atteindre cet instant”.
Votre épouse pourrait-elle prononcer cette même phrase? ”Oui, tout à fait. Nous sommes sur la même longueur d’ondes à ce niveau. Nous donnons le meilleur de nous-mêmes pour nous épanouir aussi dans notre vie professionnelle. Elle est derrière moi sans aucune réticence”.
C’est à travers ces sacrifices et la réussite au bout du tunnel que Peter se réalise. Il ne nie pas qu’il existe des moments de doute ou de rupture, ”comme lorsque l’on se blesse, par exemple”. Mais avec le temps, il a appris où il pouvait puiser la motivation lorsqu’elle faisait défaut et comment retrouver des forces en sommeil.
Un sport national
Le judo est devenu un sport très populaire en Israël, surtout grâce aux médailles d’or qu’il a déjà, depuis plusieurs années, apporté au pays. L’entraineur actuel de la sélection israélienne, Oren Smadja, fait partie de ceux qui ont ouvert la voie royale à cet art martial. Pour Peter, c’est un exemple: ”Oren et tous ceux qui l’ont suivi nous ont montré le chemin à suivre. Il est un entraineur exceptionnel qui sait créer une ambiance amicale mais aussi studieuse dans la sélection. A force d’entrainement, de ténacité, il nous amène aux sommets que nous avons atteint à Abou Dhabi, notamment”.
Et ces succès pénètrent toutes les couches de la population israélienne. Peter peut témoigner du nombre impressionnant d’enfants ou de parents qui lui disent qu’ils ont ou veulent commencer le judo, parce qu’ils regardent les judokas qui représentent Israël, avec admiration. ”Cela me touche beaucoup, c’est ce qui me donne aussi la force chaque matin d’aller m’entrainer. Nous ne sommes pas que des sportifs, nous sommes aussi des modèles pour les plus jeunes. Nous ne pouvons pas faillir”. D’autant plus qu’à travers le judo, Peter sait qu’il transmet aussi des valeurs: le respect de l’adversaire, de l’entraineur, la persévérance, le goût de l’effort. Autant de principes qu’il juge fondamental d’inculquer auprès de notre jeunesse.
Cet engouement touche même les sphères économiques, puisqu’il y a quelques semaines, Peter Paltchik a signé un contrat avec Optical Center, faisant de lui le représentant VIP de l’enseigne internationale, dirigée par Laurent Lévy. Ce dernier a déclaré: ”C’est la première fois que je choisis un sportif pour être l’ambassadeur d’Optical Center. C’est le très bon contact que j’ai noué avec Peter qui m’a poussé dans ce sens. Je lui souhaite beaucoup de réussite”. Lors de la signature du contrat, Peter Paltchik a offert à Laurent Lévy, la ceinture qu’il portait lors de sa victoire à Abou Dhabi. Beau geste venant d’un sportif qui sait qu’il représente plus que sa propre personne.
”Les victoires vont au-delà de nos propres personnes”
Quand on est judoka professionnel et que l’on porte le drapeau d’Israël sur sa tenue, on est aussi un symbole sur les tatamis à l’étranger.
Souffrez-vous de discrimination ou de regards déplacés lorsque vous vous rendez dans des compétitions à l’étranger? Peter déplore bien le fait que parfois certains judokas de certains pays refusent le combat avec eux, ”Israël est le seul pays qui se heurte à ces comportements”. Mais, ces cas mis à part, il nous dit que nulle part, la sélection israélienne n’a été victime de discrimination, elle considérée comme toutes les autres.
Et la Hatikva résonne partout? ”Oui, aujourd’hui, grâce au travail du Président de la Fédération et de la ministre des Sports, on l’entend partout”.
En effet, contrairement à l’année passée, cette année, même à Abou Dhabi, on a entendu les notes de notre hymne national, pour notre plus grande émotion.
Qu’avez-vous ressenti à cet instant? Avez-vous compris les larmes de Miri Regev? “A cet instant, quand j’ai vu la ministre pleurer, j’ai vraiment compris la grandeur historique du moment. Nous avons fait l’histoire, c’était géant”.
Pourtant, cette victoire c’est d’abord la vôtre, en tant que sportif? ”Bien sûr, c’est moi qui me suis battu. Mais ce n’est pas une victoire personnelle. C’est d’abord celle du travail de toute l’équipe, le résultat des entraînements. Ensuite, il est évident que c’est une victoire qui me dépasse, c’est celle de toute la Nation. J’ai reçu tellement de messages de reconnaissance, de soutien, que je ne me bats pas tout seul, en réalité”.
Peter n’hésite pas à l’affirmer: les meilleurs ambassadeurs d’Israël ce sont les sportifs. ”Aucun homme politique ou diplomate ne porte autant que nous sur lui le drapeau d’Israël”, dit-il avec une pointe d’humour. C’est un fait, nos sportifs nationaux portent fièrement le drapeau et représente Israël avec solennité.
”Cela rajoute aussi de la pression”, avoue Peter, ”lors des préparations et des compétitions elles-mêmes, nous le savons mais essayons de ne pas trop y penser. Cela peut nuire aussi à notre concentration. A Abou Dhabi, avec toute la présence médiatique et celle de la ministre, c’était plus compliqué de faire abstraction même le temps des combats”.
Pour Peter et tous ceux qui concourrent en représentant Israël, chaque apparition est une pierre apportée à la nation. Ils en sont conscients et comptent bien ne pas démériter. Prochain objectif: la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Tokyo. Beatsla’ha!
Guitel Ben-Ishay