Nous vous proposons, dans ce numéro spécial pour les dix ans de l’expulsion du Goush Katif, de découvrir l’histoire de la famille Shomron, arrivée à Neve Dekalim en 1984.
Une vie merveilleuse
Motti Shomron n’a pas de mot pour décrire la vie au Goush Katif. Agronome très réputé, il est arrivé en 1984 après avoir vendu son appartement dans le quartier juif de la Vieille Ville de Jérusalem pour construire une maison à Neve Dekalim. Il y a fait grandir ses quatre enfants dans une ambiance conviviale et unique.
« Quand nous sommes arrivés dans le Goush Katif, nous n’avions absolument aucun problème de sécurité ! Nous faisions nos courses à Khan Younes, les commerçants arabes nous faisaient même crédit, on venait payer une fois par mois. Les arabes travaillaient chez nous. On se promenait tout à fait librement. Il m’est même arrivé de laisser mon fils de 5 ans chez le réparateur de vélo, seul, le temps qu’il finisse le travail. Nous vivions bien et ensemble ». Motti explique que le changement s’est produit avec les accords d’Oslo. À partir de ce moment, tout a basculé. Un des ouvriers arabes de Motti l’a, un jour, interpellé : « Mais, vous les Juifs, vous n’êtes pas normaux ! Nous vivions tellement bien ! Pourquoi aviez-vous besoin de faire revenir Arafat et sa bande de terroristes ?! Vous faites toutes les erreurs à ne pas faire » ! Ce même ouvrier a réussi à venir le jour de l’expulsion pour dire au revoir et pleurer avec Motti…
Se battre jusqu’au bout
Même si à partir d’Oslo, le quotidien des Juifs du Goush Katif était souvent dérangé par les attentats, il ne serait venu à l’idée de personne de quitter les lieux ou pire encore d’envisager qu’ils seraient, un jour, expulsés. « Nous nous sommes battus jusqu’au bout, se souvient Motti, nous avons tout tenté. Puis nous avons compris que les politiciens nous mentaient, que peu leur importait ce que nous pourrions leur dire. Le peuple, dans sa majorité, était contre la décision. Mais le rouleau compresseur médiatique gauchiste et la Cour Suprême auront eu raison de nous… Nous avons supplié le Juge Barak de venir sur place, voir ce qu’était le Goush Katif. Il a toujours refusé ».
La famille Shomron ne s’est pas laissée expulser facilement : « Les soldats sont revenus pendant une semaine, en pleurant, pour nous faire sortir… Finalement, un officier druze s’est présenté et nous a dit que s’il ne nous faisait pas sortir, il serait renvoyé de l’armée. De force, nous avons été expulsés de chez nous. Une fois dans le bus qui nous emmenait à Jérusalem, l’officier druze est venu nous voir et nous a tendu les clés de chez lui : « Ma maison est à vous, en tant que druze, je n’ai plus aucun droit sur cette terre maintenant que j’ai expulsé des Juifs de chez eux… ».
Bne Dekalim
Pendant six mois, la famille Shomron va d’hôtel en hôtel. Puis, ils ont cherché un lieu pour reconstruire leur communauté de Neve Dekalim. Mais pour cela aussi, ils ont dû se battre : « Je me suis assis avec le Premier Ministre, avec ses représentants, pour qu’ils nous laissent construire un yishouv. Ils voulaient nous en empêcher ! Même pour pouvoir l’appeler Bne Dekalim, en référence à Neve Dekalim, nous avons dû nous battre » ! Dix ans après, Motti n’en veut pas à l’État mais à ceux qui ont pris les décisions, qui ont détruit le lien entre les citoyens et l’État. « Eretz Israël ne pardonne pas à ceux qui lui ont fait du mal, sa kedoucha est trop importante. Rien de bon ne peut sortir d’une blessure infligée à la terre d’Israël. Aujourd’hui nous devons rester vigilants, tout peut arriver. Nous, les habitants du Goush Katif, n’avions fait de mal à personne, nous étions le bouclier de toute la région de Gaza. Nous gardons la foi : nous retournerons, avec l’aide de D’, bientôt, à Neve Dekalim » !
Guitel Ben-Ishay