Propos recueillis par Eden Levi Campana
Avec son spectacle « Yentl and Me » Shirel, chanteuse franco-israélienne au parcours de qualité, propose un one-woman show musical authentique et profondément personnel. Dans ce projet, elle entremêle des chansons issues du film culte « Yentl », interprété et réalisé par Barbra Streisand, avec celles de son propre album, tissant un lien entre deux destins croisés : celui de « Yentl », prête à se déguiser en homme pour étudier la Torah, et le sien, marqué par une quête identitaire et spirituelle où elle a embrassé la foi juive.
Le 8 décembre 2024, de 18h à 21h, Shirel se produira au Conservatoire de Nice dans le cadre d’une soirée intitulée « Yentl and Me ». Cette « confidence musicale » est organisée par l’association NETSAH, au profit des enfants déplacés en Israël depuis le 7 octobre 2023. Une occasion unique d’assister à ce voyage musical aux côtés de Shirel, tout en soutenant une cause fondamentale.
Shirel incarne un chemin de vie fait de choix intenses et de moments marquants, remplis d’humour, mais surtout d’amour. À travers sa voix et son récit, elle partage son histoire d’une sincérité rare, offrant un regard profond et intime sur sa transformation et sa quête d’appartenance. Les chansons comme « Papa, Can You Hear Me? », « The Way He Makes Me Feel », « Go Back Home » et « Jérusalem » – œuvres du compositeur Michel Legrand, Oscar de la meilleure musique de film en 1984 pour « Yentl » – enrichissent ce voyage artistique, devenant les échos de cette double quête identitaire : « En réalité, il ne s’agit pas uniquement de Yentl et moi. Ce spectacle raconte l’histoire de nombreuses femmes, de 17 à 90 ans, que j’ai rencontrées », explique Shirel. Elle souhaite à travers ce spectacle explorer et faire résonner les voix féminines de différentes générations, avec leurs forces, leurs vulnérabilités, et les mutations du rôle des femmes au cours des dernières décennies. Plus qu’une performance “Yentl and Me» est une déclaration d’amour à celles qui, à l’image de Yentl et de Shirel, bravent les interdits pour trouver leur voie.
Que pouvez-vous nous dire de votre spectacle ?
Il s’agit d’une création qui explore l’histoire de Yentl, ainsi que la mienne et celle de 17 femmes israéliennes issues de diverses origines. Ces femmes ont été filmées et interviewées, et leurs témoignages apparaissent à différents moments du spectacle. Les thèmes abordés sont variés : la mémoire, la figure paternelle, le souvenir, le lien avec la terre, et bien d’autres, tous liés à la condition féminine, présentée sous différents angles, sans jugement, simplement en laissant ces femmes s’exprimer, tout comme Yentl le fait dans le film. De mon côté, je partage ma propre expérience. J’interprète des chansons de Michel Legrand ainsi que mes compositions personnelles, tout en racontant mon Alyah et ma conversion et encore bien d’autres sujets qui me tiennent à cœur.
C’est un peu une ode à Michel Legrand ?
Oui et une ode à la femme et a ses multiples facettes. A son rôle qui a tellement évolué ces 100 dernières années.
Depuis quand portez-vous ce spectacle ?
Cela fait environ 5 à 6 ans. Avec le Covid et la guerre, j’ai également eu une autre grossesse. La vie a donc pris le dessus pendant cette période, mais j’ai eu l’occasion de le jouer de nombreuses fois. Je suis vraiment ravie de le jouer à Nice, car c’était la première ville où je devais me produire avant la pandémie.
Vous intervenez pour une cause, pour Netsah ?
Oui, exactement. Je suis ici pour chanter au profit de Netsah. J’apprécie Bruno Lellouche. Ses efforts remarquables, depuis le 7 octobre, sont vraiment admirables et il est essentiel de le soutenir. Je suis donc très heureuse de pouvoir chanter pour son association. Personnellement, quand on m’explique que c’est pour les enfants, pour Israël et que cela peut avoir un impact, je suis là, prête à me déplacer et à chanter pour Israël. Il est vrai que je ne chante pas souvent en Israël. Je me produis de temps en temps à Jérusalem ou à Tel Aviv, mais j’ai choisi de ne pas orienter ma carrière uniquement vers le marché israélien. Je préfère chanter pour les Juifs du monde entier, en dehors d’Israël, afin de célébrer l’amour pour ce pays.
Pour les Juifs du monde entier ? Et les autres ?
Oui, absolument. Je chante pour tous, en mettant l’accent sur l’amour d’Israël et en faisant connaître ce pays extraordinaire. C’est vraiment ma mission. Depuis le 7 octobre, il est crucial de rassembler les Juifs qui ressentent maintenant de l’appréhension, de la peur. Ils ont besoin de notre soutien et de notre encouragement, car vivre en tant que Juif en dehors d’Israël n’est pas facile en ce moment.
Pour moi, il est particulièrement important d’apporter du soutien aux Juifs de la diaspora. Bien sûr, vivre en Israël avec les sirènes et les menaces est une épreuve énorme, un défi quotidien. Mais je crois que vivre à l’étranger, surtout maintenant, est aussi difficile. Depuis le 7 octobre, mon objectif est de leur apporter du réconfort, de la joie et de leur montrer que nous sommes unis et forts ensemble. Nous devons nous rassembler et nous soutenir, car nous souffrons aussi de manière très profonde à l’intérieur. Il est donc essentiel de nous unir et de faire front ensemble.
Comment expliquez-vous cette résilience du peuple juif qui est capable après toutes les tragédies de repartir ?
C’est un véritable mystère. Certaines choses ne se laissent pas facilement expliquer. C’est un cadeau divin d’avoir cette Emouna, cette foi, cette force et cette mémoire collective qui nous permet de toujours nous relever. Parfois, il n’est pas nécessaire de chercher des explications. Notre peuple est tout simplement inexplicable. Bien que notre communauté soit relativement petite, elle possède une richesse incroyable, un peu comme le chiffre pi, qui est à la fois un nombre infime et infini. C’est ce qui en fait un phénomène mystérieux. Parfois, il faut accepter ce mystère, ce que les non-Juifs peuvent avoir du mal à comprendre. C’est sûrement pour ça il y a tant d’antisémitisme.
Yentl a été obligée de se travestir en homme, pas vous ?
Non, ce n’est pas tout à fait pareil pour moi. Même si je n’étais pas juive, j’ai ressenti une nécessité inexplicable d’étudier la Torah. Je comprends parfaitement l’appel de Yentl, c’est quelque chose qu’elle ne peut ignorer. Pour elle, cela ne relève même pas du choix, c’est une nécessité vitale.
De mon côté, j’ai ressenti le besoin de devenir juive pour exister pleinement. C’est ce que j’essaie d’expliquer à propos de ma conversion. On peut être quelqu’un qui n’est pas né juif, mais qui ressent ce besoin profond de prouver son identité et de vivre en accord avec elle. Mon père est juif, mais ma mère ne l’était pas, ce qui fait que je ne l’étais pas non plus.
Pour quelle raison il faut absolument voir ce spectacle ?
Je crois que l’énergie que nous générons à travers nos vibrations, que ce soit à Nice ou ailleurs, est précieuse. En chantant, en partageant des moments de joie et en nous recueillant ensemble, nous créons un véritable rendez-vous entre nos cœurs et nos âmes. C’est un moment qui peut véritablement apporter du soutien. C’est un peu comme cette idée que les ailes d’un papillon peuvent influencer l’atmosphère et même le monde. De la même manière, lorsque nous chantons ensemble et que nous partageons une expérience intense, cela influence l’état moral de nos soldats et de nos otages, cela crée une connexion tangible. Par conséquent, il est essentiel de vivre ces moments de joie ensemble et de créer de la simha (joie).
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