Le Rav Haïm Amsellem a été député du parti Shass lors de la 17e Knesset et pendant une partie de la 18e. En effet, lors de son second mandat, il affiche ouvertement ses divergences idéologiques avec la ligne officielle du parti qu’il quittera en décembre 2012. Depuis, le Rav Amsellem a créé son propre parti « Am Shalem » sans parvenir jusqu’à aujourd’hui à entrer à la Knesset.
Le P’tit Hebdo : Quelle est la ligne idéologique directrice d’Am Shalem ?
Rav Haïm Amsellem : Am Shalem est un mouvement séfarade authentique et non un mouvement lituanien séfarade. Nous prônons la tolérance, l’alliance entre Torah et travail et le sionisme. Par ailleurs, Am Shalem se livre à un combat contre l’assimilation qui passe par la question des conversions, et notamment celles des descendants de Juifs (Zera Israël).
LPH : Comment agissez aujourd’hui en dehors de toute instance politique ?
Rav H.A. : Notre mouvement est au contact de toute la population israélienne. Nous avons des représentants dans toutes les régions. Nous y tenons des cours, des conférences et nous sommes à l’écoute du public.
LPH : Une alliance avec des partis comme Bayit Hayehoudi ou Yahad lors des dernières élections ne vous aurait-elle pas garanti un siège à la Knesset ?
Rav H.A. : Il y a certainement des points sur lesquels nous nous rejoignons. Mais Am Shalem est bien différent de Bayit Hayehoudi et de Yahad. Nous représentons le judaïsme nord-africain, nous avons toujours été pro-État et pro-armée, sans le moindre doute. À vrai dire, il y a eu un essai de la part d’Am Shalem de se rapprocher de ces deux partis. Mais concernant Yahad, eux et nous avons décidé de ne pas nous allier pour des raisons propres à chacun. Pour Bayit Hayehoudi, un accord avait été conclu mais Naftali Bennett n’a pas tenu sa parole, donc il n’a pas été effectif.
LPH : Am Shalem se présentera-t-il aux prochaines élections ?
Rav H.A. : Nous nous préparons effectivement aux prochaines élections. Elles pourraient intervenir prématurément, compte tenu de l’instabilité menaçante du gouvernement actuel, mais tout est possible. Donc, nous nous devons d’être prêts. Notre marche vers un retour à la Knesset est entamée. Bientôt, je l’espère, nous serons en mesure de présenter un programme précis.
LPH : La question de l’alya et de l’intégration y figurera-t-elle ?
Rav H.A. : Dans ma conception du sionisme figure, évidemment, l’encouragement à l’alya et la favorisation de l’intégration. Nous devons donner des facilités aux olim qui ont déjà suffisamment de difficultés ainsi. Lorsque j’étais à la Knesset, j’avais déjà commencé à alerter et à travailler sur la nécessité de la reconnaissance des diplômes. Par ailleurs, Am Shalem, par sa philosophie est très proche du monde et du judaïsme francophones. En effet, les Juifs français ont toujours allié Torah et travail. Les mondes sionistes religieux et haredim israéliens ne les connaissent pas suffisamment pour leur apporter les bonnes réponses.
LPH : Quelles sont vos estimations de réussite ?
Rav H.A. : Nous travaillons pour les optimiser. Mais je ne repartirai pas dans des élections si je n’ai pas la certitude que nous serons présents à la Knesset.
LPH : Parlons un peu d’actualité. Quel est votre regard sur la situation sécuritaire difficile que nous vivons ?
Rav H.A. : Si les rues d’Israël sont devenues dangereuses c’est parce que pendant des années nous avons fermé les yeux sur l’éducation qui était donnée aux enfants arabes, éducation en partie, financée par l’État d’Israël. Mais, à vrai dire, Am Shalem se concentre sur les thèmes de Torah et tradition, sionisme et travail. L’aspect sécuritaire n’est pas une priorité de notre agenda.
LPH : Justement, la tradition est-elle en danger aujourd’hui dans notre pays au regard des décisions récentes donnant gain de cause au judaïsme réformiste ?
Rav H.A. : Je suis choqué de ces décisions, mais pas étonné. Nous n’aurions pas dû entrer dans cette impasse. Au lieu de laisser un phénomène marginal, d’une fois par mois au Kotel, nous l’avons officialisé, nous lui avons conféré un statut. Cette opposition et cette attention extrêmes que nous avons portées au phénomène réformiste au Kotel n’a eu pour résultat que de le faire grandir. Aujourd’hui, la situation est inacceptable et je déplore le comportement des partis haredim au gouvernement.
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay
Photo by Yonatan SIndel/FLASH90