Saadia Derai, z’l, est tombé au combat dans la Bande de Gaza le 20 juin 2024. Sa veuve, Raheli, a découvert à la fin de la semaine de deuil qu’elle était enceinte de leur troisième enfant.
Pendant six mois, elle a caché la nouvelle. Elle portait des vêtements amples et se rendait seule à tous les examens médicaux tout en s’occupant de ses deux jeunes enfants, Halleli (3 ans) et Yinon (1 an et demi).
»Je suis restée seule, enceinte, avec deux enfants petits à faire grandir », décrit Raheli dans une interview sur Ynet, »Je suis encore sûre que je suis en train de rêver et que Saadia va revenir pour la naissance ».
Elle confie: »Malgré la difficulté, je parviens à me réjouir de cela, je comprends qu’il m’a encore laissé quelque chose de lui. Cela me réjouit et en même temps cela fait très mal, j’apprends à accepter ces deux sentiments opposés ».
Saadia a été appelé en milouïm dès le 7 octobre. Dans un premier temps, il servait à la frontière nord puis au mois de mai dernier, il a été appelé pour le front sud, à Gaza.
»Lorsqu’il m’a dit Gaza, je savais qu’il ne reviendrait pas de la guerre. C’était ma peur la plus grande », raconte Raheli. »Je pouvais tout surmonter mais pas la peur pour sa vie. Saadia aussi a senti que c’était la fin. Il a quitté la yeshiva, son travail, ses études qu’il venait de commencer à l’université, sans s’engager sur une date de retour. Il a tenu à passer chaque moment de libre avec moi et les enfants, il a changé ses plans pour voir ma mère et ses parents ».
Saadia étudiait au kollel de Yaffo et parallèlement travaillait à la mairie, bien qu’il recevait une bourse en tant qu’étudiant dans un kollel: »Il avait beaucoup de mal à concevoir qu’il pouvait être payé pour étudier la Torah. Il apportait de la sainteté dans notre maison ».
Pendant qu’il était à Gaza, il parlait aussi souvent que possible à Raheli: »Il me disait que j’étais la meilleure, que j’avais des forces incroyables. Lorsque je lui disais qu’il avait déjà donné plus que de raison et que je lui demandais de rentrer, il me répondait qu’il avait grandi sur l’héritage de Roï Klein et Eliraz Peretz, il ne fallait pas que j’attende autre chose de lui. C’était pour lui un mérite de se battre pour l’existence de notre Etat », décrit-elle.
Raheli raconte que lorsqu’elle a appris que Saadia était tombé au combat, »le sol s’est dérobé sous mes pieds. J’ai senti que je tombais dans le vide. J’ai compris que tout le bien que j’avais construit avec Saadia était détruit ».
Pendant la semaine de deuil, le chef du département des ressources humaines de Tsahal est venu lui rendre une visite. Elle lui a demandé pourquoi son mari avait été tué. Il lui a répondu: »Il nous manque des effectifs. Nous n’avons pas assez de combattants à envoyer dans les zones déjà nettoyées et donc les terroristes reviennent ».
Pour Raheli: »Les gens préfèrent les histoires de héros et de sacrifices. Mais moi je parle de douleur, de tristesse, du vide que crée la perte. Je ne voulais pas un mari qui soit un héros, je voulais un mari qui soit vivant. J’ai payé le prix le plus cher et aucune histoire de héros aussi belle soit-elle ne me ramènera Saadia ».