L’hyperactivité est un terme de plus en plus connu et galvaudé. Qu’est-ce que l’hyperactivité ? Qui touche-t-elle ? Comment la traite-t-on ? LPH s’est penché sur le sujet pour faire un peu d’ordre.
Le Trouble du déficit de l’attention-hyperactivité (TDAH)
Ce que l’on appelle, par raccourci, l’hyperactivité est en réalité plus complexe qu’il n’y paraît. Il s’agit, avant tout, d’un trouble de l’attention qui peut s’accompagner d’un comportement agité. Les symptômes du TDAH sont les suivants :
- Problèmes d’attention : les personnes souffrant du TDAH présentent de grandes difficultés de concentration. Elles ont du mal à écouter en classe, accumulent les étourderies, ne prêtent pas attention aux consignes et ne semblent pas écouter lorsqu’on leur parle.
- L’agitation : les enfants ne tiennent pas en place. Ils passent leur temps à remuer les mains, les pieds, se lèvent, courent, sautent, grimpent, dans des situations où ces comportements ne sont pas appropriés.
- L’impulsivité : incapacité à attendre la fin d’une question pour y répondre, incapacité à attendre son tour, interruption des autres pour parler, et tout autre signe d’impatience poussée.
Ces trois symptômes doivent être réunis pour parler réellement de TDAH. Si l’on a tendance à l’appeler hyperactivité, c’est parce que c’est cette caractéristique qui est la plus visible et la plus difficile à vivre pour l’entourage. Par ailleurs, les spécialistes estiment que pour pouvoir parler de trouble de l’attention, alors ces symptômes doivent s’observer dans les différents environnements au sein desquels l’enfant évolue (maison, école, et autres le cas échéant).
Il n’y a pas d’âge
Certes, l’immense majorité des personnes déclarées souffrantes du TDAH sont des enfants. On estime qu’au moins 5% d’entre eux souffriraient du trouble. Mais il faut savoir que cela concerne aussi les adultes. Selon les différentes études médicales réalisées sur le sujet, il apparaît que les enfants hyperactifs, dans leur quasi-totalité, ne guérissent jamais totalement, mais ils apprennent à canaliser les symptômes. Néanmoins, force est de constater que l’on sait encore peu de choses sur le TDAH chez l’adulte et les façons de le traiter. Le diagnostic ne peut s’établir, en général, avant l’âge de 6 ans, lorsque l’enfant commence à être scolarisé. En effet, avant cela, il est souvent difficile de faire la part des choses entre un enfant turbulent et un enfant hyperactif. C’est pourquoi on estime que si les symptômes définissant le TDAH persistent au-delà de l’âge de 5-6 ans, alors il faut considérer l’enfant comme souffrant du syndrome.
Quelles sont les causes du TDAH ?
La première des causes avancées est neurologique : un messager chimique que l’on appelle la dopamine, dont l’un des rôles est de fixer l’attention est non seulement moins présent mais il y aurait des anomalies au niveau de son récepteur. Résultat : la transmission de l’influx ne peut pas se faire correctement. Pour autant, la théorie n’a pas été prouvée à ce jour, et beaucoup contestent la définition de l’hyperactivité comme une maladie neurologique. Il a également été observé que l’anémie, le manque de fer, pouvait favoriser l’hyperactivité. Enfin, on estime aussi que l’alimentation produit des effets dans le domaine, les additifs alimentaires étant montrés du doigt.
Des effets immédiats et collatéraux
Un enfant hyperactif souffre logiquement de difficultés d’apprentissage. Les parents sont souvent désemparés face à lui, ne sachant pas comment le gérer. Par conséquent, il est fréquent qu’un enfant hyperactif se voie rejeter par le système scolaire, parfois même dès la maternelle. Il peut se retrouver isolé. Les parents doivent aussi affronter le regard de la société qui juge négativement l’enfant pour son comportement, et ses parents considérés comme échouant dans leur éducation.
Le grand débat autour des traitements médicamenteux
Le diagnostic du TDAH est, le plus souvent, établi par un neurologue ou un pédopsychiatre. Les façons de traiter le trouble font l’objet de plusieurs études et débats au sein du corps médical et même des parents concernés. Le traitement le plus connu est celui consistant à administrer de la ritaline, médicament qui possède des propriétés proches des amphétamines. Il est recensé sur la liste des stupéfiants. Des études menées aux États-Unis ont conclu que le produit pouvait être cancérigène, provoquer des arrêts cardiaques et de plus, il peut se créer une relation de dépendance au médicament, comparable à de la toxicomanie. Tous ces effets sont connus des médecins qui ne prescrivent le médicament que prudemment, avec un réexamen obligatoire de la situation de l’enfant tous les 28 jours au maximum.
Pour poursuivre le débat et donner le maximum de réponses aux questions que soulève le TDAH, LPH a interrogé deux spécialistes : le Dr Michael Aboulafia et Irène Landau.
Dr Michael Aboulafia
« Derrière l’hyperactivité, une souffrance »
Le Dr Michael Aboulafia est pédopsychiatre. Il est également enseignant au Mahon Meir et conférencier réputé et demandé. Il décrit sa façon d’aborder et de traiter l’hyperactivité.
Le P’tit Hebdo : Comment définissez-vous l’hyperactivité ?
Dr Michael Aboulafia : Sa définition la plus courante et la plus basique est celle qui consiste à décrire comme hyperactif un enfant qui ne tient pas en place. On veut nous faire croire que l’hyperactivité vient d’un problème neurologique mais en réalité, derrière ce symptôme, se trouve une véritable souffrance. L’enfant hyperactif cherche à transmettre un état dans lequel il se trouve intérieurement. Il cherche à attirer l’attention sur lui.
LPH : Comment diagnostique-t-on l’hyperactivité ?
Dr M.A. : Il s’agit d’un diagnostic qui ne répond pas à des critères objectifs, comme beaucoup de diagnostics d’ailleurs. Cela va dépendre de ce que pensent les personnes qui s’occupent de l’enfant, ses éducateurs. On ne peut que se fier au jugement subjectif des parents, des professeurs et de l’entourage de l’enfant.
LPH : Est-ce une maladie ?
Dr M.A. : Non, le TDAH n’est pas une maladie. C’est l’expression d’un malaise, d’un mal-être que l’on doit comprendre. Par ailleurs, d’autres éléments peuvent susciter le déclenchement du trouble. Les enfants qui ont une alimentation riche en colorants ou qui vivent des situations post-traumatiques sont plus sujets à l’hyperactivité. À noter aussi que dans les populations d’olim, on trouve une proportion plus grande d’enfants hyperactifs, cela étant dû aux difficultés ressenties par certains foyers lors de leur alya. Enfin, notre mode de vie contemporain est aussi facteur de troubles de l’attention. En effet, nous courons toute la journée, nous nous fixons plusieurs missions à la fois. Nous parvenons difficilement à nous retrouver avec nous-mêmes, à nous écouter. À ce propos, le shabbat est une délivrance : nous sommes contraints de nous arrêter.
LPH : Quel traitement préconisez-vous ?
Dr M.A. : Il faut traiter la raison de ce trouble du comportement. Le traitement médicamenteux peut être envisagé, mais avec un dosage très mesuré et surtout sur une faible durée. En effet, si l’on fait disparaître les symptômes à l’aide d’un médicament, alors on oublie le problème. Dans ce cas, on ne ressent plus le besoin de travailler sur la cause, et on ne traite donc rien en réalité. Il faut se servir des médicaments avec parcimonie de façon à ne pas faire disparaître totalement les comportements problématiques pour pouvoir continuer à travailler dessus. Bien souvent, on s’aperçoit que le traitement de l’hyperactivité passe par la création chez les parents, au sein du foyer, d’un vrai calme intérieur.
Irène Landau
« Le traitement passe uniquement par les parents »
Irène Landau est psychothérapeute et coach de vie. Elle exerce au sein du Centre de la guérison psychosomatique à Jérusalem (Guivat Shaoul). Elle aide ses patients dans tous les domaines de leur vie lorsqu’ils souffrent de dysfonctionnements, de maladies ou de conflits. Auteur de l’ouvrage « La mise en scène de la maladie et des symptômes », elle est spécialisée dans les troubles physiques et psychiques et traite de problèmes tels que l’épilepsie, la schizophrénie, le cancer ou encore le TDAH. Elle explique son approche à l’hyperactivité.
Le P’tit Hebdo : Quelle est votre définition de l’hyperactivité ?
Irène Landau : Un hyperactif est un être humain qui souffre en raison de traumatismes familiaux du présent mais aussi du passé, parfois même lointains. L’enfant est un émetteur-récepteur. Il faut toujours le replacer dans son contexte familial ; cela est valable pour tous les troubles ou maladies. L’hyperactivité n’est pas une maladie, elle n’a rien de génétique. Si beaucoup d’enfants hyperactifs ont des parents, eux-mêmes hyperactifs, c’est uniquement parce que les conflits émotionnels à l’origine du trouble se sont transmis.
LPH : À partir de quand faut-il consulter ?
I.L. : Les parents viennent consulter parce qu’ils souffrent que leur enfant ne tienne pas en place, parce que les instituteurs leur ont fait part de leur désarroi face à son comportement. En réalité, nous devons aussi avouer que nous demandons aux enfants d’être calmes alors que nous vivons dans une société surexcitée. Les parents n’ont plus le temps, les professeurs n’ont plus la patience et les enfants sont sujets à toutes sortes de stimuli, à longueur de journée. Notre mode d’alimentation aussi est à l’origine de certains troubles. Nous vivons dans un environnement antinaturel et stressant. Être contemplatif, de nos jours, est mal vu. C’est pourquoi il faut comprendre ce qui se passe au niveau familial.
LPH : Pour vous, le traitement de l’hyperactivité devrait se faire au niveau familial ?
I.L. : Je vais même plus loin. Je ne reçois que les parents. Pour moi, il est inutile de poser des questions à l’enfant, il sera incapable d’y répondre. Que voulez-vous qu’il réponde lorsqu’on lui demande : « pourquoi as-tu autant de mal à te concentrer » ? Un être humain fait partie d’une histoire familiale, nous avons tous hérité de certains traumatismes. Parfois cela entraîne des dérèglements et ceux-ci sont exprimés et amplifiés par l’enfant. Son hyperactivité n’est qu’un appel au secours, sa façon d’exprimer un mal-être que nous devons identifier. S’il n’arrive pas à se concentrer, c’est parce que son esprit est occupé par un problème que nous devons identifier et qui se trouve dans l’histoire familiale.
LPH : Cela ne revient-il pas à culpabiliser les parents quant au mal dont souffre leur enfant ?
I.L. : Il ne s’agit pas du tout de cela. Nous devons intervenir au niveau des âmes, des conflits qui agitent la famille. Nous effectuons un travail transgénérationnel. Parfois même, il faut faire appel aux grands-parents parce que les problèmes peuvent remonter plus haut et s’être transmis inconsciemment. Le travail ne consiste pas à culpabiliser mais à chercher ensemble ce qui peut perturber l’enfant.
LPH : Au bout de combien de temps peut-on espérer des résultats par cette méthode ?
I.L. : Cette méthode est pratiquée par de nombreux thérapeutes dans le monde et produit des effets quasi-immédiats. La thérapie est courte, parfois une séance suffit déjà à ouvrir le nœud du problème. Les parents, soulagés, savent ensuite mieux comment aborder leur enfant. J’ai traité ainsi des centaines de familles. Les résultats arrivent même une semaine seulement après la première consultation. J’ai même reçu des appels de professeurs qui me remerciaient pour le changement qu’ils observaient chez les enfants. La méthode produit des résultats aussi bien chez les enfants hyperactifs que chez les adultes.
Laissez-moi vous raconter une anecdote, à ce propos. Sylvie, une dame de soixante-cinq ans est dans une agitation extrême. Elle me dit qu’elle est hyperactive depuis sa naissance. Elle ne tient pas assise, et de plus elle fume comme un pompier : trois paquets de cigarettes par jour ! Je lui demande s’il y a eu un drame dans sa famille et elle bondit : « Bien sûr ! Figurez-vous qu’avant ma naissance, mes parents avaient une petite fille. Elle s’appelait Aimée et tout le monde l’adorait. Elle avait sept ans. Comme elle était indisciplinée, la maîtresse l’a faite sortir de la classe, sous la pluie. L’enfant a attrapé une pneumonie. À l’époque les antibiotiques n’existaient pas. Cela a été un drame épouvantable. Moi je suis née quatre ans après. Un jour, par hasard, j’ai trouvé une photo de l’enfant : J’ai cru que c’était moi, c’était mon portrait » ! Je lui explique le lien qui existe entre elle et cette enfant, qu’elle est le témoin du drame et que son agitation et son manque de concentration font référence à ce malheur. Elle est littéralement pétrifiée par la révélation. Elle a compris le sens du symptôme qu’elle porte depuis sa naissance. Inconsciemment, elle cherche à faire revivre la petite Aimée. Un mois après, elle me raconte que depuis la séance, non seulement elle a réussi à se calmer, à s’assoir pour suivre une conférence, ce qui était impossible pour elle, mais qu’elle a aussi arrêté de fumer du jour au lendemain !
LPH : L’enfant, selon vous, ne doit subir aucun traitement ?
I.L.: Une chose est certaine, je ne conseillerai jamais de donner de la ritaline à un enfant ! Je prescris, en revanche, des gouttes naturelles qui aident l’enfant à être plus calme. Mais, il faut bien comprendre que pour l’aider, il faut identifier le mal, le comprendre. Et en cela, seules les générations précédentes peuvent aider. Donner des drogues pour « avoir la paix » ne résout pas le problème. Le plus important pour venir à bout du TDAH, c’est d’agir sur les émotions. Aucun traitement médicamenteux ne pourra être efficace. Il faut aider les parents à comprendre la problématique de leur vie, le sens de ce qui leur arrive. Ce n’est que de cette façon que l’enfant pourra être traité.
Pour aller plus loin :
paysagedejerusalem.blogspot.com
Tél : 052-2083666
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