L’histoire de Geva Rapp et son action depuis de nombreuses années sont particulièrement symboliques en cette période de Shavouot.
LPH vous amène à la rencontre d’un personnage comme seule notre terre peut en porter: Geva Rapp, Colonel de réserve, baal techouva, enseignant de Torah et fondateur d’une association de diffusion de la Torah.
”Je suis fort, je ne ferai pas techouva”
C’est par ces mots que le jeune Geva Rapp rassurait ses amis alors qu’il s’apprêtait à entrer pour quelques mois au Mahon Meïr à Jérusalem. Comment ce garçon laïc, à peine sorti de l’armée, a-t-il décidé de s’asseoir sur les bancs d’une yechiva, mais “pas pour faire techouva”?
Geva nous raconte: ”J’étais officier dans les parachutistes. A l’âge de 25 ans, j’ai décidé de quitter l’armée pour commencer des études. Entre la fin de mon service et le début de l’année universitaire, j’avais un battement de trois mois. J’avais connu quelques soldats religieux et j’étais curieux d’en savoir un peu plus sur ce monde dans lequel vivaient des gens de mon peuple. Mes pas ont été guidés vers le Merkaz Harav. On m’a orienté au Mahon Meïr. Le Rosh Yeshiva, le Rav Dov Bigon, m’a accueilli avec un sourire bienveillant qui voulait dire qu’il m’acceptait comme j’étais, sans chercher à me changer”. Geva est un étudiant aux idées alors bien arrêtées: ”j’avais rassuré mes amis que jamais je ne ferai techouva. Quand le Rav entrait dans la classe, tout le monde se levait. Pour moi c’était impensable: qui était donc cet homme pour qu’on se lève pour lui!? Alors pour ne pas me faire remarquer et pour éviter de me lever POUR lui, je restais debout depuis mon entrée dans la classe, jusqu’à l’arrivée du Rav”.
Geva commence à suivre les cours: ”J’avais choisi ceux que je trouvais les plus ennuyeux et les moins intéressants”. Puis, rapidement, les choses prennent une autre tournure. Geva se passionne pour ce qu’il pensait être inutile.
Ses études au Mahon Meïr sont interrompues par la première guerre du Liban. Il est alors réquisitionné. ”A un moment, je me suis retrouvé seul, entouré de feux ennemis. Alors je me suis dit que d’autres sauraient se tourner vers D’ieu et prier en ces instants. Je ne savais pas prier. C’est, je crois, le premier véritable déclic qui s’est produit en moi”.
Puis, il reprend sa place au Mahon Meïr et s’investit dans ses études. ”A l’armée, je dormais très peu. J’ai abordé la yeshiva de la même façon: j’étudiais à partir du netz jusqu’à une heure avancée de la nuit”. C’est un jour de Kippour qu’il prend sur lui de mettre une kippa et d’accomplir la Torah et les mitsvot.
”Pour un ashkénaze comme moi, la Techouva n’est pas facile”
Le père de Geva sent que son fils commence à prendre un autre chemin. Il s’en inquiète et décide de venir le surveiller de plus près à la Yeshiva. ”Il est venu pour deux semaines, s’il était resté une semaine de plus, lui aussi faisait techouva!”.
Geva décrit sa techouva comme ”intellectuelle”. “Pour un ashkénaze comme moi, ce n’est pas facile. La décision que j’ai prise relève du miracle”.
Quelle part votre implication dans l’armée d’Israël a-t-elle eu dans ce processus de techouva? ”Ma démarche a été rendue possible par mon éducation d’abord et aussi par l’armée. Au sein de Tsahal vous vivez l’amour d’Israël, de votre prochain, vous ressentez la responsabilité qui vous incombe vis-à-vis de chaque membre du peuple. Hachem m’a aussi guidé vers le monde religieux qui me correspondait, celui du Rav Kook”.
Geva se souvient alors de la parabole du Rav Kook pour décrire notre lien à la terre et à la Torah: ”Un enfant croit que tout ce qui l’entoure est naturel. Notre peuple a ressuscité avec la création de l’Etat. Il était comme un bébé pour qui il est normal d’avoir à manger, qui ne se pose pas de question. Tout nous paraissait aller de soi. Le summum de ce sentiment a été atteint lors de la Guerre des Six Jours. Depuis nous avons basculé dans l’adolescence: nous posons toutes sortes de questions et nous nous rebellons aussi parfois. On croit que l’adolescent se perd mais en fait il avance. Notre peuple aussi donne parfois le sentiment de se tromper mais en réalité, il est sur le chemin d’une plus grande écoute. Comme le disait Effi Eitan, lui aussi baal techouva, je n’ai pas rejeté le sioniste que j’étais avant, c’est juste que celui-ci était comme un film muet et à la Yechiva j’ai appris à mettre le son et les mots sur le film”.
Une jeunesse qui a faim
C’est son expérience personnelle qui a incité Geva à créer, en 2005, une association qui s’occupe de la jeunesse mais aussi de la formation d’enseignants: Panim el Panim. ”Au moment du retrait de Gaza, Ariel Sharon avait dit qu’il ferait un referendum. Notre association s’est constituée pour aller dans les maisons expliquer les enjeux de ce désengagement. Nous avons alors constaté que le public sioniste religieux voulait parler, échanger et que beaucoup de gens n’attendaient que d’entendre cette parole”. Panim el Panim prend alors la mission non plus de sauver uniquement le Goush Katif mais tout le peuple.
L’association propose plusieurs programmes dans tout le pays: des cours dans les lycées, des discussions, des shabbatot, des formations pour les enseignants, des activités dans les bases militaires. ”Nous sommes face à une jeunesse qui a faim”, constate Geva sur le terrain.
Alors Panim el Panim va auprès des populations laïques pour leur expliquer ce qu’est la Torah d’Israël, sur la terre d’Israël. Geva se souvient de la première école où ils ont été appelés: ”Dans cet etablissement laïc, 20% des élèves refusaient de servir dans l’armée et un bon nombre la quittaient seulement quelques mois après leur enrôlement. Le directeur a donc fait venir un officier de l’armée de l’air pour les sensibiliser. Les élèves se sont enchainés au portail de l’école en signe de protestation contre ”l’armée d’occupation”. Alors le directeur a compris que ce qu’il devait donner à ses élèves, c’était un lien avec le judaïsme. Aujourd’hui 94% des élèves de cette école s’enrôlent et comprennent mieux leur place et leur destin”.
Voilà résumé en un exemple l’action de Panim el Panim dans les écoles où Geva avoue être bien reçu: ”Il y a plus d’ouverture aujourd’hui. Nous sommes accueillis avec beaucoup d’amour”. Geva et les membres de son association expliquent à ces jeunes, mais aussi aux soldats et même à une population religieuse parfois en perte de repères, le but de notre présence en Israël. ”Au départ, le sionisme laïc, c’était garantir un abri au peuple juif. Mais aujourd’hui, notre peuple est fort, alors à quoi sert la poursuite de ce projet?”, voilà l’une des grandes questions auxquelles Panim el Panim donne des réponses.
Ressusciter le peuple sur sa terre pour faire vivre la Torah
”En Israël, le peuple est né, celui qui ne vit pas ici, ne peut pas le savoir”, lance Geva, ”En Galout le peuple était mort, aujourd’hui cet exil est fini, le peuple est bien vivant”.
Lui qui enseigne la Torah à des jeunes et à des professeurs laïcs, sans aucune connaissance préalable, le sait mieux que quiconque: ”Notre système éducatif n’a pas été assez performant pour transmettre les racines. Les âmes sont prêtes mais les connaissances font défaut. Grace aux enseignants de Panim el Panim qui travaillent dur, nous comblons le déficit”.
Et cette vitalité du peuple retrouvée, Geva se félicite de la constater aussi dans les Shabbatot avec l’armée: prières, kidouch, divré Torah sont appréciés de tous. L’atmosphère y est incroyable, l’armée est très demandeuse, mais les budgets nous manquent pour amener ce projet partout”.
Panim el Panim se donne une mission fondamentale par rapport aux défis de notre génération, celle de la Gueoula. ”Pour réussir, la Nation doit se connaitre et donc connaitre ses racines et son lien à la terre”.
Geva conclut par une affirmation forte et pleine de sens pour notre avenir en tant que Juif en Israël et pour ceux qui n’y sont pas encore: ”Yom Haatsmaout et Yom Yeroushalayim sont désormais le cœur de nos fêtes. Ces jours viennent témoigner du fait que le peuple d’Israël est redevenu lui-même. Ils donnent un autre sens à toutes les fêtes de notre calendrier. Le plus naturel pour chaque juif est de vivre la renaissance de son peuple en Israël. C’est un processus divin qui rend la Torah non plus individuelle mais celle de tout un peuple”.
Pour plus de renseignements:
Panim el Panim
Tél: 02-6517653
Mail: [email protected]
Guitel Ben-Ishay