Nos Maîtres nous enseignent que lorsqu’on commet une faute envers autrui, en le lésant, en le diffamant ou en lui portant atteinte, nous commettons une faute à deux dimensions. Nous avons fait du mal à autrui et nous avons en même temps transgressé la loi d’Hachem qui nous interdit de léser notre prochain.
Le jour de Kippour, seules les fautes commises envers Hachem peuvent être pardonnées. Pour les offenses commises envers autrui, le pardon d`Hachem ne peut être obtenu que si la personne offensée pardonne elle-même. En fait Hachem, en quelque sorte, ne se permet pas de pardonner quand la victime n’a pas pardonné.
C’est pourquoi il est d’usage avant Yom Kippour de demander pardon à ceux qu’on aurait pu offenser.
Cela peut paraître artificiel, conformiste et vide de sens de l’extérieur, quand on voit des gens se demander pardon et accorder le pardon alors qu’il n’y a aucun contentieux entre eux.
Mais en fait, cette coutume communautaire contribue à créer un climat favorable, qui nous fait prendre conscience que personne parmi nous n’est parfait et qu’on ne meure pas en demandant pardon.
Cela aidera celui qui a réellement commis une faute, à accomplir cette démarche si difficile, qui consiste à reconnaître que nous étions dans nos torts. Cela aidera peut-être ceux qui sont installés dans une vieille querelle de faire le premier pas qui peut ensuite débloquer une situation et restaurer les liens de fraternité et d’amitié.
Mais cette démarche est difficile, elle s’oppose à nos instincts de survie qui nous poussent à protéger notre image en affirmant: « j’avais raison ! ».
Tant est si bien, que souvent en pleine demande de pardon, alors que nous étions venus reconnaître nos torts, nous changeons d’attitude pour NOUS JUSTIFIER, en ajoutant à notre demande de pardon, une petite phrase d’autojustification, comme pour dire « tu vois, je reconnais que j’ai mal agi mais reconnais que tu l’avais bien mérité »..
Cette tentative de justification est dangereuse, elle risque de relancer la querelle et donc elle compromet la réconciliation visée dans cette démarche. Mais c’est souvent plus fort que nous tant il est difficile de demande simplement pardon.
La demande d’excuse pour ne pas se trahir, ne pas laisser de prise aux tentatives d’autojustifications, doit être brève, pour dénoncer uniquement ce que nous regrettons sans chercher à déterminer la part de tort qui revient à l’offensé.
Aller jusqu’au bout de cette démarche de demande de pardon, a quelque chose de surhumain. C’est en fait une dimension messianique, où nous nous libérons des chaînes narcissiques qui nous emprisonnent dans le passé pour nous faire croire que nous nous protégeons mieux par le déni, que par la vraie prise de conscience et de responsabilité de nos actes.
Puissions nous tous avoir cette force et aller jusqu’au bout de cette démarche, pour restaurer l’amitié, la fraternité et l’unité d’Israël et ainsi hâter la Délivrance.
Gmar hatima tova
Raoul Spiber