– Qu’elle est ennuyeuse, cette paracha, déclare Ouriel devant son professeur. Tant de pages pour nous parler de l’impureté (touma) !
– Sache, Ouriel, qu’il y a impureté et impureté.
– Comment cela ?
– Vois-tu, il existe trois catégories essentielles d’impuretés : celle qui concerne la lèpre (métzora), celle qui concerne le cycle mensuel de la femme (nida), et celle qui concerne la mort.
– Le mort, le métzora et la nida seraient-ils donc des pécheurs ?
– Non. Être impur n’implique pas obligatoirement avoir fauté. Celui qui enterre un mort accomplit une grande mitzva, et pourtant il est impur.
– Être impur signifie simplement que l’on n’a pas le droit de pénétrer dans le Temple ? Mais, si l’on n’a pas commis de faute, pourquoi ne pourrait-on pas pénétrer dans le Temple ?
– Écoute : je vais d’abord t’expliquer certains détails mentionnés dans la paracha, et ensuite tu comprendras mieux.
Alors que l’impureté du mort se transmet dès que l’on se trouve sous le même toit que lui[1], l’impureté de la femme nida se transmet même si l’on s’assied sur son lit[2], et qu’elle ne s’y trouve plus. Le lépreux, lui, transmet la touma à ceux qui se trouvent dans une pièce au moment où il y entre[3].
– Pour le métzora, je peux l’expliquer moi-même.
– Je t’écoute.
– Eh bien nous savons que le métzora est une maladie particulière que Dieu envoie à l’homme qui médit. Il est donc compréhensible qu’on nous demande de l’éviter. C’est pourquoi les lépreux amènent la touma partout où ils entrent.
– Très bien. La lèpre est effectivement le seul cas d’impureté liée à une faute. De même, le métzora doit quitter le camp des Hébreux et vivre solitaire[4].
– Maintenant, expliquez-moi la signification de l’impureté de la femme nida. C’est pourtant naturel.
– Justement, tout être humain est l’objet, dans son corps, de phénomènes dont il n’est pas maître. Mais l’homme a précisément le devoir de dominer les forces de la nature. Dominer la terre est le premier commandement de Dieu à Adam[5]. Les commandements concernant la purification de la femme nida sont justement destinés à permettre à l’homme, à travers les lois religieuses, de donner un sens aux lois auxquelles il est soumis, et ainsi, en quelque sorte, de les dominer. L’impureté de la nida se transmet particulièrement par le lit, car il représente le confort matériel dans lequel l’homme risquerait de s’endormir, et c’est justement pour résister à ce danger que la Thora a érigé les lois de nida. C’est peut-être aussi la raison pour laquelle la Thora interdit les relations entre un homme et sa femme pendant qu’elle est nida. Par le contrôle de soi, par le respect de la loi, le couple fait entrer Dieu – si on ose parler ainsi – dans son intimité.
– Et le mort ?
– L’impureté du mort, c’est une autre dimension de l’homme. L’homme est créé à l’image de Dieu, il recèle en lui une étincelle divine. Le corps, à qui cette néchama (âme) a donné vie, n’est plus rien lorsqu’elle le quitte. L’impureté du mort, contrairement à ce qu’on peut croire, c’est un hymne à la vie. Grâce à sa néchama, l’homme est bien plus qu’une masse de quatre-vingts kilos de chair et d’os. Il est avant tout un esprit qui dépasse les limites de son enveloppe corporelle. Aussi, lorsqu’il meurt, c’est comme si toute sa maison s’éteignait, et c’est pourquoi l’impureté est transmise à tous ceux qui se trouvent sous le même toit que lui. Au moment où le lépreux se repent, retrouvant ainsi sa place parmi les hommes, lorsque la femme nida réussit à donner un sens aux processus naturels qu’elle subit, lorsque celui qui est en contact avec un mort se purifie et comprend la valeur inestimable de la vie, alors ils peuvent reprendre le chemin du Temple.
[1] Nombres xix, 14.
[2] Lévitique xv, 20.
[3] Lévitique xiii, 46.
[4] Ibidem.
[5] Genèse ii, 15.
Extrait de l’ouvrage du Rav Shaoul David Botschko ”A la table de Shabbat”
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