Maïmonide, dans son Livre des commandements[1] considère que la prière est une obligation journalière qui fait partie des 613 commandements de la Thora. Cette obligation est déduite du verset[2] : « Vous servirez Dieu. » Ainsi, pour lui, par la prière, l’homme témoigne de la toute-puissance d’Hachem. En l’implorant, il reconnaît que c’est Lui qui est le dispensateur de toutes les bénédictions. Ses regards sont tournés vers Lui comme un esclave se tourne vers son maître pour quémander sa nourriture.
Trois fois par jour, l’homme manifeste qu’il reconnaît que Dieu est le Roi de l’univers.
Na‘hmanide, dans ses notes sur le Livre des commandements, n’accepte pas cette vision : non, dit-il, la prière n’est pas une obligation. Le caractère de contrainte prive cette relation avec Dieu de sa chaleur et de sa spontanéité. Il va plus loin encore : si, pour « l’Aigle de la synagogue », la prière est un mouvement ascendant, de l’homme vers Dieu, pour Na‘hmanide, c’est un mouvement descendant de Dieu vers l’homme[3] :
« Mais certainement, la prière n’est en aucune manière une obligation. C’est un fait de la bonté et de la charité divines qu’Il nous répond chaque fois que nous L’implorons. »
Nous, les hommes, ne pouvons influencer Dieu. De quel droit le louerions-nous ? Toutes nos paroles seront insuffisantes et à la limite même du blasphème. Le silence est notre seule parole possible. Pourtant notre âme, créée à Son image, désire passionnément se rapprocher du Créateur. Oui, nous répond-Il dans Sa bonté. Je vous autorise à me louer et plus encore Je vous écoute et tiens compte de vos supplications. Mais, poursuit Na‘hmanide, il existe néanmoins une prière obligatoire; elle est déduite d’un verset de notre paracha :
« Et lorsque vous irez en guerre dans votre pays contre les ennemis qui vous oppriment, vous sonnerez les trompettes et par vos suppliques, vous vous amènerez au souvenir d’Hachem qui vous sauvera de vos ennemis. »
De ce passage, dit Na‘hmanide, on apprend que « lors d’un malheur qui s’abat sur la communauté, on doit s’adresser à Lui par les prières et par la sonnerie des trompettes ainsi que le roi Salomon s’exprimait : lorsqu’il n’y aura point de pluie, lorsque le pays sera frappé par la famine ou par une épidémie ou encore par une invasion de sauterelles ou si des ennemis attaquent vos villes, vous vous tournerez vers cette maison et vous implorerez le Tout-Puissant[4]. »
Ainsi, la prière, pour Na‘hmanide est partie intégrante de la foi et de la confiance en Dieu. La prise de conscience de cette omniscience est obligatoire. Aussi Na‘hmanide rejoint-il Maïmonide. Mais si pour ce dernier la prière de tous les jours doit être le cri de l’esclave, Na‘hmanide réserve cette prière-là pour les circonstances graves, exceptionnelles : « lorsque vous irez en guerre… »
Tous les jours, la prière est une occasion magnifique de rencontre que Dieu nous offre dans sa Bonté.
[1] Commandement positif n° 5.
[2] Exode xxiii, 25.
[3] Ramban, note sur le Livre des commandements, commandement n° 5.
[4] Ibidem.
Extrait de l’ouvrage du Rav Shaoul David Botschko »A la table de Shabbat »
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