Cela fait maintenant un mois que Naftali Bennett a cédé son fauteuil de Premier ministre à Yaïr Lapid, en vertu de l’accord de rotation entre les deux hommes. Dans le même temps, Bennett est devenu Premier ministre alternatif de l’Etat d’Israël, poste qu’occupait jusqu’alors Yaïr Lapid.
Force est de constater que si l’on sentait que Lapid était le numéro 2 de Bennett, lorsque celui-ci était Premier ministre, Bennett a totalement disparu des écrans depuis la passation de pouvoir.
En effet, du temps de Bennett Premier ministre, il n’y avait pas une photo de conseil des ministres sans Lapid assis à côté de Bennett. Depuis un mois, Lapid apparait seul à cette table. Bennett ne vient pas ou arrive une fois que les caméras et les photographes sont invités à sortir de la salle.
Pis encore, alors que Naftali Bennett avait été officiellement invité à participer à la réunion de travail avec le Président américain, lors de sa visite en Israël, et qu’il avait confirmé sa présence, il a finalement décidé de ne pas y participer.
Son absence a été au moins autant remarquée que sa présence lors de la réception du Président sur le tarmac de l’aéroport de Ben Gourion, où il n’avait pas l’air à son aise, cherchant sa place pour finalement être mis ostensiblement de côté lorsque Lapid, Herzog et Biden se sont avancés vers le podium pour y prononcer leurs discours.
Un des collaborateurs de Bennett a confié au quotidien Israël Hayom que le sentiment après cette apparition à l’aéroport était celui d’une catastrophe politique et médiatique: ”Il n’y a pas un piège qu’il a évité”, décrit le collaborateur, ”une comédie remplie d’erreurs du début à la fin. Cela a commencé avec la réception: pourquoi devait-il être là?! Il n’existe pas de réel statut de Premier ministre alternatif, c’est superflu. Ensuite, il a été pris au piège dans une situation inextricable au moment où Biden, Lapid et Herzog ont commencé à marcher. S’il les suivait, il aurait été pris pour leur secrétaire, s’il restait debout figé, c’était humiliant. Il aurait dû être assis avec les ministres du gouvernement et le chef de l’opposition dans la tribune”.
D’après son entourage, Bennett souffrirait d’un manque d’activité depuis qu’il n’est plus aux commandes ni du pays, ni même de son parti. Les fonctions qu’il occupe officiellement ne se traduisent pas en véritables responsabilités et missions. Il serait la plupart du temps enfermé chez lui, ne viendrait à la Knesset qu’une à deux fois par semaine et vivrait mal ce changement de statut, d’homme le plus important de l’Etat au vide du jour d’après.
On se demande donc pourquoi il n’a pas tout simplement quitté la vie politique dès maintenant au lieu d’attendre les élections. Ses conseillers lui auraient recommandé de partir tout de suite afin d’éviter de concentrer l’attention sur des détails comme le nombre de conseils des ministres où il est présent, combien d’argent il coûte aux contribuables, ce qu’il fait ou ne fait pas.
Mais Bennett en a décidé autrement pour deux raisons. La première: les pouvoirs juridiques que lui confère son poste de Premier ministre alternatif et chef du bloc de droite de la coalition, comme son droit de veto sur certaines décisions, qu’il ne voulait pas abandonner. La seconde est le renvoi d’ascenseur qu’il estime devoir à Yaïr Lapid qui a toujours su rester à sa place pendant l’année qui vient de s’écouler en insistant sur le fait que Bennett était le Premier ministre, en le respectant et le soutenant comme tel. Mais apparemment, il ne parvient pas à tenir cette place de soutien, de second.
D’ailleurs, d’après les informations qui circulent, Bennett en voudrait maintenant aux hommes de Lapid qu’il soupçonne de faire courir des rumeurs à son compte comme celles selon lesquelles il aurait demandé à bénéficier des avantages dévolus aux anciens Premiers ministres alors qu’ils ne lui reviennent pas puisqu’il n’a pas exercé assez longtemps.
L’annonce de Lapid le jour de sa nomination qu’il s’installerait dans un appartement rue Balfour à Jérusalem a également mis Bennett en porte-à-faux. Ce dernier a passé une année à justifier les travaux pharaoniques à son domicile privé par le fait qu’il était impossible, sur ordre du Shabak, de s’installer dans la capitale.
Toujours d’après des proches de Bennett, cités par Israël Hayom, ce dernier prendrait conscience que ce que l’on retiendra de son passage au poste de Premier ministre ne sera pas son attitude correcte face à son collègue Lapid ou ses diverses décisions mais bien le fait qu’il aura été à la tête du gouvernement le plus court de l’histoire d’Israël et qu’il aura échoué dans sa tentative d’intégrer les Arabes dans la coalition.
Le bureau de Naftali Bennett a réagi à ces affirmations: ”En Israël, il n’y a qu’un seul Premier ministre. C’est ce que pensait Bennett quand il était Premier ministre et c’est ce qu’il pense toujours aujourd’hui. C’est pourquoi, lorsque le Premier ministre Lapid a pris ses fonctions, le Premier ministre alternatif Bennett a décidé de lui laisser totalement la place. Bennett est prêt à aider Lapid chaque fois qu’il est sollicité et quand cela est nécessaire. Il semble qu’il sera toujours perdant. S’il avait choisi d’être impliqué dans tous les sujets, il aurait subi des attaques inverses et on aurait dit que le Premier ministre alternatif s’impose et ne laisse pas le devant de la scène à Lapid. L’agenda de Bennett est plein, il est occupé par des sujets précis de sécurité, il participe aux conseils des ministres, au cabinet et aux débats chaque fois que cela est nécessaire”.