La presse américaine* s’intéresse de très près à $1.7 milliard versés par les Etats-Unis à l’Iran la semaine dernière pour la libération d’otages américains détenus par la République islamique.
Il se trouve qu’au moment où cet argent a été viré à Téhéran, trois otages américains – le journaliste du Washington Post Jason Rezaian, un vétéran des Marines Amir Hekmati, et le pasteur chrétien Saeed Abedini– ont été autorisés à quitter l’Iran à bord d’un jet de la compagnie Swiss. Deux autres américains ont aussi été libérés. Un sixième otage semble avoir choisi de rester en Iran, à moins qu’il ne s’agisse de Robert Levinson, disparu depuis plusieurs années.
En contrepartie, les Etats Unis ont libéré sept iraniens accusés ou condamnés pour différents trafics prohibés avec l’Iran. Washington a également accepté de ne pas poursuivre quatorze autres iraniens, dont deux accusés de soutien logistique au profit d’Assad pour avoir transporté des troupes et des armes vers la Syrie.
L’administration Obama prétend que le règlement de $1.7 milliard la libère d’un vieux contentieux entre les Etats-Unis et l’Iran et que c’est un bon accord. Le Président Obama a expliqué qu’il fallait faire en sorte que l’Iran retrouve ses fonds ainsi que des intérêts correctement calculés et a affirmé que la somme versée était beaucoup moins élevée que ce que l’Iran réclamait. Le contentieux remonte à l’époque où le Shah d’Iran avait versé aux Etats-Unis $400 millions pour l’achat d’armes qui ne furent jamais livrées à cause de la révolution iranienne de 1979. Lors d’une procédure diligentée par le Tribunal de la Haye, il fut décidé que les Etats-Unis paieraient $1.3 milliard d’intérêt qui s’ajouteraient au principal.
Quelques années plus tard, le Tribunal a accordé des dommages et intérêts de $2.5 milliards à des citoyens américains et des compagnies ayant connu des déboires sous le régime des Mollahs. Cependant, c’est le gouvernement américain qui s’est chargé de régler ces sommes aux intéressés. “Les Etats-Unis ont payé deux fois – à l’Iran et aux citoyens américains. L’Iran n’a jamais rien payé du tout” souligne, Lee Smith, un chercheur du Hudson Institute dans un tweet.
Les membres républicains du Congrès se demandent s’il était dans l’intérêt des Etats-Unis d’agir ainsi et exigent qu’une enquête soit menée pour connaître les termes de l’accord et du règlement financier.
En début de semaine, le Brig. Gen. Mohammad Reza Naqdi, commandant de la milice Basij d’Iran a affirmé : “Cet argent a été versé en contrepartie de la libération d’espions américains et n’avait aucun lien avec les négociations sur le nucléaire,” renforçant ainsi l’impression que le versement était une rançon.
Les responsables de l’administration chargés des négociations sur les otages, avec à leur tête le Secrétaire d’Etat John Kerry et le spécialiste du Moyen-Orient Brett McGurk, ont voulu être rassurants en déclarant que : “le paiement des $1.7 milliard a été effectué le week-end dernier.”
Qu’est devenu Robert Levinson ?
Quant au sort de Robert Levinson, le mystère plane toujours. Voici les dernières images reçues de l’ancien agent américain du FBI. Il a disparu sur l’île iranienne de Kish en 2007.
Depuis sa disparition, le gouvernement américain rejette toute responsabilité… affirmant qu’il ne s’agissait pas d’un agent et qu’il se trouvait en Iran pour des raisons personnelles.
Mais une enquête de l’agence de presse américaine Associated Press révèle au contraire que Robert Levinson avait été envoyé secrètement par la CIA sur le sol iranien. Selon l’enquête d’AP, sa famille a reçu $2.5 million pour ne pas engager de poursuites susceptibles de faire éclater la vérité. La famille n’a pas eu de preuve de vie depuis début 2011. S’il est encore en vie, Robert Levinson aurait 65 ans.
L’Iran, qui nie toute responsabilité, a assuré que ses services travaillaient en collaboration avec les Etats-Unis sur cette affaire. Selon AP, le gouvernement a demandé à trois reprises de différer la publication des résultats de l’enquête … pour faciliter la libération de Robert Levinson…
L’ensemble de l’enquête exclusive d’AP est à lire (en anglais) ici : bigstory.ap.org
Cependant, de nouveaux documents indiquent que les autorités iraniennes en savent plus sur Mr. Levinson qu’elles ne veulent bien le dire.
Fin 2011, un diplomate iranien aurait laissé entendre que son pays détenait l’américain et qu’il serait libéré si les Etats-Unis aidaient l’Iran à retarder la publication d’une évaluation critique des activités nucléaires iraniennes.
* Wall Street Journal, TheTower.org
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