Une page de l’histoire se tourne avec la disparition, à l’âge de 99 ans, d’Irmgard Furchner, l’une des dernières personnes condamnées pour crimes liés au nazisme. Son décès a été officiellement confirmé lundi par le tribunal d’Itzehoe, dans le nord de l’Allemagne, où elle avait été jugée et condamnée.
Le procès de cette ancienne secrétaire du camp de concentration de Stutthof avait capté l’attention médiatique internationale lors de son ouverture en septembre 2021. L’affaire avait pris une tournure inattendue dès le premier jour d’audience, lorsque l’accusée, alors âgée de 96 ans, avait tenté de fuir en prenant un taxi vers une station de métro, provoquant un report temporaire des débats.
Jugée pour sa complicité dans l’assassinat de plus de 10 000 personnes, Furchner avait finalement été condamnée en décembre 2022 à deux ans de prison avec sursis. Cette sentence avait été confirmée en appel en août 2024, quelques mois seulement avant son décès.
Situé à l’est de Gdansk dans l’actuelle Pologne (alors Dantzig sous occupation allemande), le camp de concentration de Stutthof demeure moins connu que d’autres sites comme Auschwitz ou Dachau, mais fut le théâtre d’atrocités similaires. Environ 65 000 personnes y périrent entre 1939 et 1945, principalement des Juifs, des partisans polonais et des prisonniers de guerre soviétiques.
Irmgard Furchner y a travaillé comme dactylographe et secrétaire personnelle du commandant Paul Werner Hoppe entre juin 1943 et avril 1945. Bien qu’elle ait affirmé pendant son procès n’avoir jamais été directement témoin des atrocités commises dans le camp, le tribunal a estimé qu’elle ne pouvait ignorer ce qui s’y déroulait, compte tenu de la nature de ses fonctions administratives.
En raison de son jeune âge au moment des faits (18-19 ans), la prévenue avait comparu devant une juridiction spéciale pour mineurs, malgré ses 96 ans au début du procès. Cette particularité procédurale souligne la complexité juridique de ces affaires instruites près de huit décennies après les crimes.
Son cas s’inscrit dans une série de procédures judiciaires tardives initiées après le procès historique de John Demjanjuk en 2011. Cet ancien gardien du camp d’extermination de Sobibor avait été condamné à cinq ans de prison, établissant une jurisprudence cruciale : même sans preuve d’actes criminels spécifiques, le simple fait d’avoir travaillé dans un camp de concentration pouvait désormais être considéré comme une forme de complicité.