La Thora rapporte que la cuve en cuivre servant à la purification des mains et des pieds des Cohanim fut fabriquée avec les miroirs que les femmes d’Israël avaient offerts pour l’œuvre du Tabernacle[1].
Cette précision est exceptionnelle. En effet, la Thora indique bien que les Hébreux ont apporté les matières premières nécessaires à la construction du Tabernacle et à la fabrication des objets du culte. Mais elle ne se soucie guère de l’origine de ces matériaux. Pourquoi donc cette précision ? Ne savons-nous pas à quoi servent les miroirs ?
Rachi explique :
Les femmes d’Israël possédaient des miroirs dans lesquels elles se miraient lorsqu’elles se faisaient belles. Et pourtant, elles n’ont pas hésité à les offrir pour la construction du Tabernacle.
Et Rachi poursuit, évoquant la réaction de Moïse :
Moïse répugnait à les accepter, car ils ont pour vocation d’encourager le penchant au mal.
C’est pourquoi, dit Rachi, Dieu Lui-même intervient pour enseigner l’ordre véritable des priorités :
Le Saint béni soit-Il lui dit : « Reçois-les ! Ceux-là me sont plus précieux que tout le reste, car c’est grâce à eux que les femmes ont donné le jour à des légions d’enfants en Égypte alors que leurs maris étaient épuisés par leur travail éreintant ; elles allaient leur apporter à manger et à boire et leur donnaient à manger. Puis elles prenaient leurs miroirs et minaudaient, se regardaient dans le miroir chacune avec son mari, et lui disait : « Je suis plus jolie que toi ! » Elles éveillaient ainsi le désir de leurs maris, s’unissaient à eux, devenaient enceintes et accouchaient, comme il est écrit[2] : « Sous le pommier je t’ai éveillé » et c’est pourquoi on appelle ces miroirs « miroirs légions ».
Ce Rachi magnifique nous met en garde contre un grave malentendu possible : il faut savoir que le « penchant au mal » n’est pas mauvais. Lui aussi nous vient de la manière dont Dieu nous a créés. Comme de toute chose, nous risquons bien sûr d’en faire mauvais usage. Mais c’est lui qui nous donne l’énergie vivante nous permettant d’être et d’agir. Sans lui l’homme ne créerait rien. Sans ambition, sans désirs, sans pulsions, l’homme serait un être inerte. À la limite, un golem – un légume !
La grandeur de l’homme réside dans sa capacité à maîtriser ces énergies pour les mettre au service du projet qui nous a été assigné par la volonté de Dieu.
Extrait de l’ouvrage du Rav Shaoul David Botschko »A la table de Shabbat »
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029972023
[1] Chemot xxxviii, 8
[2] Cantique des cantiques viii, 5.