Le New York Times a publié un article intéressant de la plume du journaliste d’investigation israélien Ronen Bergman, spécialiste des services de renseignements. De manière détaillée et précise il montre que les opérations attribuées à Israël sur le territoire iranien ont provoqué un phénomène de plus en plus palpable au sommet de l’Etat : la paranoïa. Des voix de plus en plus fortes se font entendre pour accuser les diverses agences de renseignement d’avoir échoué et que l’Iran serait devenu “un jardin d’Eden pour les espions”. Les accusations mutuelles entre les divers organes s’expriment au grand jour et des responsables politiques exigent la tête de ceux qu’ils considèrent comme responsables de cette situation dans laquelle une méfiance générale commence à s’installer, ou demandent une refonte totale de l’organigramme des services de renseignements notamment en les unifiant.
Rien que durant l’année écoulée on ne compte pas les “pannes” ou les incendies suspects” sur des sites sensibles liés au programme nucléaire sans oublier l’élimination de Mohsen Fakhrizadeh, cerveau du projet nucléaire militaire Amad ou celle d’un haut responsable d’Al-Qaïda en plein Téhéran. Toutes ces opérations n’auraient pas pu être réalisées sans un réseau de renseignements parfaitement huilé et des complicités locales. Et les Iraniens n’ont pas oublié non plus l’humiliation de l’opération spectaculaire du Mossad en plein Téhéran en 2018.
Selon Ronen Bergman, cette “paranoïa” a atteint les plus hautes instances de la République islamique, où au-delà de leurs déclarations assurées, on commence à regarder derrière son épaule lorsque l’on veut prendre des décisions importantes sur les dossiers brûlants.
Mais l’efficacité des services israéliens de renseignements ne se voit pas seulement sur le territoire iranien. Un ancien agent des renseignements américains, cité dans l’article du NYT, explique que le Mossad agit dans le monde entier pour repérer du matériel sensible qui est destiné à être livré à l’Iran, puis lui applique des charges explosives ou des récepteurs pour pouvoir le détruire ou l’abimer une fois arrivé en Iran, au moment choisi.
Enfin, l’article évoque la mort récente et brutale de Mohamad ‘Hedjazi, n°2 de la Force Quds, responsable notamment du programme de missiles de haute précision pour la Syrie et le Hezbollah libanais. La version officielle iranienne est qu’il a succombé à une crise cardiaque mais l’article note le timing “étrange” de ce décès dans le contexte actuel des tensions entre Israël et l’Iran et n’exclut pas une autre origine, ce général ayant été dans le collimateur d’Israël depuis des années. Après tous ces revers iraniens, les autorités n’auraient aucun intérêt à reconnaître une nouvelle humiliation cuisante, face aux ennemis de l’Iran et moins encore pour l’image du régime des mollahs face à son opinion publique.
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