Un dicton populaire affirme que « la force de la chaîne est déterminée par la force de son maillon le plus faible ».
Nous comprenons cela dans le contexte présent et, bien sûr, nous pouvons en déduire une toute autre réalité pour nos existences d’aujourd’hui. Notre force et notre résistance, en tant que communauté à travers l’Histoire, le furent grâce à notre unité et notre solidarité. Il ne faut, surtout pas, remettre en question ces valeurs hébraïques et se laisser abimer par les valeurs importées du «capitalisme» et du «libre marché », abandonnant, à leur sort, les pauvres, les faibles, les victimes du système.
Il est naturel, et même sain, de vouloir réussir, subvenir à ses besoins et même plus, d’être financièrement bien assis, mais jamais aux dépens, au détriment de son prochain, le texte est clair à ce sujet: pas à n’importe quel prix!
L’économie utopique, contrairement au Judaïsme et, par opposition, au communisme (qui échoua lamentablement), ne parle pas d’égalité totale. Il est certes judicieux, et même légitime, de motiver l’individu à exceller et à œuvrer pour son bien-être, mais ne jamais oublier, toujours garder en mémoire: les enfants d’Israël sont responsables les uns des autres, la détresse de mon prochain est ma propre détresse.
Comment le Tanach’ espère-t-il éduquer le peuple à surmonter la faiblesse humaine ?
À travers quel sujet peut-il l’interpeller?
Le leitmotiv de «Ne pas opprimer», est en outre motivé et ce, de manière récurrente, par: «Tu ne contristeras point l’étranger ni ne le molesteras; car vous-mêmes avez été étrangers en Egypte.» (Chemot 22:21) Le verset nous renvoie vers notre mémoire nationale, une vie de servitude et d’exil en Egypte, l’oppression et l’humiliation pour de dangereux immigrés.
C’est un devoir de raviver l’esprit au souvenir des goûts amers d’une longue agonie en terre étrangère. Jusqu’à ce jour, je souffre la souffrance d’Avraham lorsqu’il dut répudier Agar et leur fils, les condamnant à l’errance en terre étrangère, lui le père de l’hospitalité!
C’est donc un devoir probant de susciter la compassion pour l’étranger comme pour quiconque serait plus faible que vous et de montrer un entendement profond pour ses besoins particuliers. Le Talmud précise: lorsqu’une personne parvient au Jugement suprême, après cent vingt ans, on lui pose un certain nombre de questions pointues: « Avez-vous espéré en un monde meilleur? » Le poids donné par le Judaïsme à la justice est si grand que la première question sous-tend que vous soyez l’être de la Foi, c’est-à-dire: celui de la Fidélité, de la Confiance et celui de la Vérité.
Ce qui compte, ce n’est pas combien possèderons-nous mais quelle sorte de bénédiction offrirons-nous avec nos biens.
Chaque objectif sanctifie les moyens pour y parvenir. La sagesse juive, c’est aussi gagner de l’argent ! Mais nous devons le faire équitablement et être heureux de notre part, si nous voulons bien ouvrir un peu les yeux et dépasser le rêve stupide que le monde moderne essaie de nous vendre : « La richesse est synonyme de bonheur ».
Nous trouvons que quiconque agit avec Foi et respecte les lois Divines jouit de beaucoup plus, que l’argent gagné.
La Torah, Dieu nous en préserve, ne prêche pas la pauvreté et respecte même la réussite matérielle, le succès physique n’est pas l’essence de tout, mais son rôle est de soutenir et de faciliter la vie de l’esprit, de la pensée, de l’intellect.
Si vous le comprenez vraiment, il vous sera beaucoup plus facile de faire preuve de compassion dans les affaires et de vouloir que tout le monde soit bon. Les lois sociales sont légiférées sans faire référence à la protestation du coût de la vie qui déferle aujourd’hui. Cette manifestation, cette frustration, reflètent une réelle difficulté et même s’il existe des éléments politisés ou anarchistes qui prennent un mauvais tournant, la revendication demeure juste, légitime et même autorisée.
Pour les jeunes couples (mais pas seulement eux), la réalité économique de la vie est presque impossible, les loyers, les jardins d’enfants, les couches, le carburant, les prix des denrées alimentaires, etc., tout est excessivement élevé et injustifiable. Il est important de le dire: rien n’est ici le fruit d’un pur hasard, mais bel et bien, le produit d’une politique économique capitaliste, compétitive et uniquement intéressée par ses dividendes.
La finance extrême s’est emparée de nous. Elle voit, devant elle, des chiffres, des graphiques et des cibles, en lieu et place, d’êtres de chair et de sang avec leurs besoins, leurs émotions, si lourdes à supporter.
À cet égard, il devrait y avoir un changement, il y a quelque chose de consternant au-devant de tant d’indifférence et d’impuissance dans la routine de l’objet humain. Où est la clameur des hommes souffrant la souffrance d’autrui, de la douleur partagée par tous et exigeant l’amélioration de la vie sinon elle (la vie) le ruine ? Il ne fait aucun doute que beaucoup de gens vivent modestement et subissent, encore et toujours, le fardeau des dépenses et de la dette nationale. Mais il est évident, pour notre société, que nous vivons bien au-dessus de nos moyens et nous sommes, par voie de conséquence, tout aussi responsables des crises financières à répétition.
Le ressenti des Prophètes est terrible : ils font face à l’injustice, la surdité des pouvoirs, l’ignorance infamante des classes les moins nanties, la clameur d’un peuple usé par la précarité, et la misère. Ils dénoncent l’irrecevabilité des sacrifices malfaisants, l’inutilité de leur culte hypocrite, Israël est responsable de l’injustice entre l’homme et son prochain. Son quotidien est bercé par la trahison de l’idéal Hébraïque, la prostitution aux seuls idéaux de l’intérêt, et cela n’est ni plus ni moins qu’un crime sociétal.
Rony Akrich