Deux voisins se croisent dans les escaliers: ”Vous êtes Juif?”, lance l’un d’eux à l’autre. Voilà le point de départ d’une pièce écrite par Jean-Claude Grumberg, mise en scène par Brigitte Gnuva et interprétée par deux comédiens talentueux, Jean-Pierre Benaym et Gabriel Villa. Tordant le coup à tous les préjugés sur les Juifs, que beaucoup prennent comme des vérités parce que ”c’est sur internet”, cette pièce fait rire, réfléchir et surtout est un grand bol de fraîcheur dans une actualité oppressante.
Le P’tit Hebdo: Qu’est-ce qui vous a séduit dans ”L’être ou pas”?
Gabriel Villa: Le texte de Jean-Claude Grumberg m’a beaucoup touché, il pose les bonnes questions. Nous sommes en fusion avec Jean-Claude, Jean-Pierre est un très bon ami avec lequel j’ai beaucoup de plaisir à jouer. Le personnage que j’interprète peut paraitre comme un bon franchouillard mais il évolue tout au long de la pièce, ce qui en fait quelqu’un auquel on s’attache.
Surtout, le sujet de la pièce me touche personnellement. Elle répond aux préjugés en y apportant une réplique fine et intelligente.
Lph: Quel est votre lien aux Juifs?
G.V.: Je ne suis pas Juif mais je me définis comme sioniste. Originaire de Corse, j’ai toujours ressenti une proximité avec le peuple juif. Ma mère, aujourd’hui âgée de 90 ans, avait accueilli 5 familles juives pendant la guerre. 25% des Corses sont d’origine juive, c’est le seul département français d’où aucun Juif n’a été déporté pendant la Shoah. Quand je discute avec des gens de mon entourage, j’essaie souvent de leur faire comprendre ce qu’est le judaïsme et Israël.
Lph: Etes-vous inquiet de l’ambiance actuelle en France?
G.V.: Je ne suis pas inquiet mais attentif. Le mouvement des Gilets Jaunes est devenu un phénomène violent, des groupuscules créent le désordre. Dans tout cela, la cible facile ce sont les Juifs. Les médias et les autorités ne réagissent pas assez fort, à mon sens, ou alors ils le font à contre-temps.
Lph: Vous venez pour une tournée en Israël. Quel est votre sentiment à quelques semaines de la première?
G.V.: J’étais déjà venu jouer une pièce en Israël. C’est un pays que j’aime beaucoup et dans lequel je me rends régulièrement. Tout me plait. A chaque fois, Jean-Pierre Benaym me fait découvrir d’autres coins. J’adore l’esprit qui y règne, la volonté, la joie de vivre.
Lph: Que vous inspire des mouvements comme le BDS qui menace les artistes qui se produisent en Israël?
G.V.: Je pense que nous, les artistes, nous devons agir pour stopper le peu d’influence qu’ils ont. Je dis à mes collègues: ne vous laissez pas enfermer dans ces schémas, allez partout, présentez la culture française. On ne se rend pas sur une scène à l’étranger pour témoigner d’un soutien politique mais pour faire notre métier et exporter la culture. Pour ma part, je n’hésite jamais à dire que je soutiens le sionisme!
Lph: Quel message souhaitez-vous transmettre au public francophone israélien?
G.V.: ”L’être ou pas”, c’est un bain de judaïsme, des réponses acerbes et humoristiques aux préjugés actuels. C’est aussi un message de tolérance, de respect de l’autre et de volonté de vivre en paix. En un mot, tout ce dont nous avons besoin aujourd’hui.
L’être ou pas
Lun 11/03, Tel Aviv / Mar 13/03, Jérusalem / Jeu 14/03, Netanya / Lun 18/03, Raanana / Mar 19/03, Ashdod Réservations: www.culturaccess.com / Tél: 0733-202-400
Guitel Ben-Ishay