« J’ai acquis la conviction que les hommes de Daësh ont l’ambition et les moyens de nous atteindre beaucoup plus durement en organisant des actions d’ampleur, incomparables à celles menées jusqu’ici, avait déclaré le 30 septembre dernier Marc Trévidic, un ancien juge français antiterroriste. (…) Les jours les plus sombres sont devant nous. La vraie guerre que l’EI entend porter sur notre sol n’a pas encore commencé ». « Nous sommes plus proches du prochain attentat que du dernier », confiait aussi à la presse voilà quinze jours un haut responsable de la police française… Et malheureusement, le terrible drame de vendredi dernier leur a donné raison !
Non que les autorités françaises n’aient pas déployé d’efforts, après les attentats de janvier dernier contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de Vincennes, pour coordonner et renforcer leurs services de Renseignements. Mais il s’avère que Daësh a agi bien plus vite et efficacement que la lourde mise en place des réformes consécutives aux deux attaques du début de l’année.
Ainsi, le carnage du 13 novembre s’est-il produit cinq semaines après l’application concrète des principales mesures de la nouvelle loi sur le Renseignement comme l’autorisation de « techniques spéciales d’enquête » (sonorisation des lieux privés et surveillance informatique en temps réel) ou celles instituant une coordination entre les différents services.
Dans le même sens, les nombreuses créations de postes annoncées après les attentats de janvier par le Premier ministre français, Manuel Valls, ne sont pas encore entrées en vigueur , à savoir 1 400 nouveaux postes au ministère de l’Intérieur, 950 à la Justice et 250 à la Défense.
Or, la veille même de l’attentat, le ministre de l’Intérieur, M. Cazeneuve, avait confié : « Cet ajout d’effectifs permettra à nos services – qui étaient à la peine – de disposer de moyens humains supplémentaires pour faire face au risque terroriste (…) Mais en attendant, la DGSI suit surtout ce que nous appelons le ‘haut du spectre’, à savoir les individus les plus dangereux, soit plus de 1 500 personnes impliquées dans des filières du Djihad en Syrie ou en Irak ».
Axe central du Renseignement anti-terroriste, la DGSI est donc dépassée par l’énorme volume des dossiers à traiter – notamment à l’aéroport de Roissy où ses agents hyper-débordés doivent gérer les départs et les retours de Syrie davantage au plan judiciaire – en déférant les plus grands suspects devant la Justice – qu’en filtrant avec minutie au plan policier tous ceux qui reviennent de là-bas… « En général, quand la DGSI nous prévient qu’un de leurs ‘clients’ à l’intention de filer en Syrie, on s’aperçoit qu’il y est déjà », reconnait un policier d’un autre service.
Chiffre effarant qui explique à lui seul l’impossibilité dans laquelle se trouvent les différents services de Renseignements de traiter la masse des menaces planant sur le pays : créé en mars dernier et classé Secret Défense, le nouveau fichier des personnes signalées pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) aligne plus de 11 000 noms…
Richard Darmon pour Hamodia