Il nous décrit le quotidien des Juifs dans cette commune de la région parisienne.
Le P’tit Hebdo: Depuis 30 ans, comment a évolué le quotidien des Juifs de Créteil?
Michel Sasportas: La communauté juive a, elle-même, évolué ces 30 dernières années. Elle s’est diversifiée, le nombre de synagogues (17 aujourd’hui), de restaurants, d’écoles, de commerces a aussi augmenté.
La communauté juive de Créteil est une communauté plutôt modeste et nombre de ceux qui en avaient les moyens ont fait leur alya.
Parallèlement, la population générale de Créteil s’est aussi diversifiée et on compte une population musulmane de plus en plus importante.
Dans l’ensemble, les relations sont plutôt bonnes entre les communautés, même si quelques actes antisémites sont à déplorer. Nous vivons dans les mêmes quartiers, dans les mêmes immeubles.
Lph: Ressent-on plus de tensions ces dernières années?
M.S.: Une tension existe, il faut le reconnaitre. Mais on peut se promener sans problème en kipa et tsitsit à Créteil. Depuis 7 ans, j’organise chaque année, Lag Baomer, dans un parc au cœur de Créteil. La municipalité nous aide sur le plan logistique. Ces rendez-vous se déroulent sans incident. Prochainement, un salon de thé cacher va ouvrir Place de la Mairie. Nous avons reçu dans la Soucca de la synagogue, les représentants de toutes les religions.
Nous existons et nous n’allons pas nous cacher. En tout cas, à Créteil, on peut vivre ouvertement comme Juif, sans que cela ne pose problème.
Lph: Pour vous, même si les actes antisémites augmentent en France de manière globale, les Juifs n’ont aucune raison de modifier leur quotidien?
M.S.: Si nous nous cachons, nous ne ferons qu’augmenter la méfiance envers nous. Nous devons montrer que nous sommes là, au contraire, que nous méritons d’être respectés pour ce que nous sommes.
De ce point de vue, je pense que ce qu’il manque aux Juifs de France aujourd’hui, c’est d’être plus présents sur le terrain public et politique. Ils ne s’engagent pas assez. Pour ma part, je suis en politique depuis 16 ans parce que j’ai compris que nous ne pouvons pas compter indéfiniment sur ceux qui se définissent comme nos amis. Nous devons nous défendre nous-mêmes. L’histoire nous a montré que les changements peuvent être subis et préoccupants. Nous devons occuper le terrain, ne pas être passifs.
Lph: Parmi vos engagements on compte celui de faire venir des délégations en Israël. La prochaine aura lieu dans la semaine du 20 novembre. Pouvez-vous nous en dire plus?
M.S.: Malheureusement, en France, on nous montre des images figées d’Israël, pays en guerre. Les médias déforment beaucoup la réalité. De loin, on se fait des idées décalées avec la réalité. Un peu comme les Israéliens pensent que les Juifs en France ne peuvent plus se promener librement dans les rues. Il n’y a rien de mieux que de venir sur le terrain pour se faire sa propre idée.
L’idée de ces délégations est de faire découvrir le côté civil, start up nation, d’Israël. Dans quelques jours, nous partirons avec 80 chefs d’entreprise lyonnais, pour un séjour organisé par la Chambre de commerce France-Israël, la Région Auvergne-Rhône-Alpes, en partenariat avec “Les Coups de cœur de l’Eco”.
Cela rejoint ce que j’évoquais, en étant actifs, en créant des liens, en favorisant la connaissance et le respect mutuels, nous assurons un meilleur avenir pour les Juifs de France.