Ils « scalpent », voilà la mission d’un groupe original qui s’est créé sur le net et qui se nomme Inglourious Basterds. Ce nom fait référence aux chasseurs de nazis du film de Quentin Tarantino. Derrière ce « scalp » se trouve en réalité une entreprise très bien rodée et très fiable de chasseurs d’antisémites sur le web. Les Inglourious Basterds se sont fixé comme objectif de ne rien laisser passer, ils ont dit stop au déferlement de la haine antisémite et antisioniste sur la toile. Ainsi chaque personne qu’ils parviennent à démasquer ou à faire condamner est considérée comme « scalpée », mais toujours par des moyens légaux ! À vrai dire, malgré leur courte existence, ils peuvent déjà se féliciter de nombreuses réussites. Ces actions leur valent même des citations dans les grands quotidiens français, une reconnaissance bien méritée. Les personnes derrière les Inglourious Basterds tiennent à préserver leur anonymat, mais ils ont accepté de répondre aux questions de LPH.
Le P’tit Hebdo : Comment vous définissez-vous ? Combattants de la désinformation ? Protecteurs de la communauté juive ?
Inglourious Basterds : Nous sommes un groupe de lutte non violente contre l’antisémitisme du web.
LPH : Depuis quand existez-vous, et pourquoi avoir créé un tel groupe à ce moment ?
Inglourious Basterds : Nous avons vu le jour avec le mouvement des « quenelles », et avons participé à l’identification de plusieurs antisémites. Suite à cela, nous avons travaillé sur divers dossiers d’antisémites, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche.
LPH : Vous préférez garder l’anonymat. Pourquoi ?
Inglourious Basterds : Parce que notre identité n’apporte rien de plus au combat. Nous ne faisons pas cela pour assurer une promotion quelconque, nous sommes là uniquement pour scalper.
LPH : Comment agissez-vous?
Inglourious Basterds: Nous repérons les antisémites du web, effectuons les recherches et les vérifications nécessaires (nous ne sortons que des dossiers qui ont été vérifiés par un système qui ne laisse pas de place à l’erreur).
LPH : Quelles ont été vos principales actions, celles dont vous êtes le plus fiers ?
Inglourious Basterds :
- Charline Grangeot. Cette femme a proféré de violents propos antisémites et négationnistes sur le web. Nous avons fait fermer toutes ses pages Facebook, prévenu les autorités (le négationnisme étant interdit par la loi), ainsi que son employeur. Elle a été licenciée.
- Aymeric Caron. Nous avons interpellé France Télévisions au sujet d’une séquence, coupée au montage, dans laquelle il défendait, devant Alexandre Arcady, que l’assassinat d’Ilan Halimi pouvait être « expliqué » par le fait que des « soldats israéliens tuaient des enfants palestiniens ». Ce visuel a été vu par près d’un million de personnes.
- Sarah Jaffrey. Cette fille de diplomate s’était réjouie en des termes odieux de l’assassinat à Jérusalem du bébé Haya Zissel Braun (3 mois), le 22 octobre 2014. Nous avons pu la retrouver avec l’aide d’autres groupes. Le BNVCA a porté plainte contre elle.
- Les pisseux d’Amiens. Ces deux hommes ont été condamnés à 5 mois de prison ferme.
- Mohamed Lavaky. Cette personne qui se croyait vraiment protégée et anonyme postait des messages antisémites et antisionistes. Beaucoup de monde cherchait à le démasquer, nous y sommes parvenus.
- #QueFontLesModerateurs : nous avons lancé ce hashtag sur Twitter, en demandant à nos followers de poster des captures d’écran antisémites. Nous savons que ce hashtag est remonté aux oreilles des dirigeants de Twitter France.
- Lutte contre le BDS : de nombreux articles, visuels et vidéos tendant à prouver que le BDS est antisémite. Exemple le plus frappant : Bénédicte Bauret (membre de la Ligue de Droits de l’Homme et du BDS) s’en prenant aux pharmaciens juifs. Le BNCVA a porté plainte contre elle.
- Amira Jumaa : elle voulait remettre les Juifs dans des fours… Virée de l’ambassade de France à New York. Virée de Sciences-Po.
LPH : Quelles sont celles qui n’ont pas marché comme vous l’auriez souhaité ?
Inglourious Basterds : Les dossiers où nous avons un doute, même s’il est infime, nous ne les sortons pas. Certains restent au frais en attendant les vérifications nécessaires, et sont sortis un peu plus tard.
LPH : Vous venez de réussir à faire renvoyer de Sciences Po une étudiante qui a tenu des propos antisémites. C’est une première pour cette institution. Comptez-vous de nombreux soutiens dans la société civile et politique française dans l’action que vous menez ?
Inglourious Basterds : Tout à fait. Nous ne traitons que les cas extrêmes, qui ne laissent pas de doutes sur le niveau d’antisémitisme des personnes que nous scalpons. Toute personne normalement constituée sait que nous sommes dans le vrai.
LPH : Que vous inspirent les récents débats notamment sur le fait de porter la kippa dans la rue ? Doit-on vivre caché pour vivre heureux quand on est Juif ?
Inglourious Basterds : Prudent oui. Caché non.
LPH : Ne ressentez-vous pas parfois des moments de découragement ? On se sent un peu seul face au monde, non ? Comment gardez-vous l’espoir de gagner cette difficile bataille ?
Inglourious Basterds : On laisse le découragement aux autres. Nous n’avons pas la prétention de gagner la guerre contre l’antisémitisme, juste de gagner quelques belles batailles qui feront repenser aux autres à deux fois avant d’exprimer leur antisémitisme au grand jour.
Pour aller plus loin :
www.theinglouriousbasterds.com
Sur FB : The Inglourious Basterds
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay