Ceci n’est pas un article d’analyse. C’est un cri de peine et de rage. Une expression de révolte face à une immense injustice qui n’a que trop duré. Envers mes frères et sœurs.
Mardi après-midi, un père de sept enfants est mort assassiné sur la route près de Hébron. Il y a quelques semaines, un couple extraordinaire était mitraillé dans sa voiture devant leurs quatre enfants. Les exemples sont innombrables. Leur crime ? Etre juifs et habiter dans une région appelée Judée-Samarie.
Comme des centaines d’autres avant eux, Abraham Hasano, le rabbin Eitam Henkin et son épouse Naama, et d’autres encore depuis, ont été inclus dans une longue liste devenue anonyme et floue, celle des victimes du terrorisme appelées « colons » par le politiquement et le journalistiquement corrects. Dénomination qui sonne comme une condamnation à l’oubli, qui permet une classification automatique dans la catégorie B de la mort, celles des personnes « qui l’ont bien cherché » voire « l’ont mérité ».
Depuis longtemps, les agences de presse et le vocabulaire journalistique ont inventé de nouveaux termes pour toutes ces personnes innocentes dont la vie a été retirée par la haine antisémite version arabe palestinienne : femme-colon, bébé-colon, rabbin-colon, « habitant d’une colonie », déshumanisant ces êtres dont chacun était un monde entier et qui voulaient vivre pendant que d’autres vénèrent la mort.
Je pense à ces centaines d’hommes et de femmes, ces rabbins, ces jeunes couples, ces étudiants, ces vénérables vieillards parfois rescapés de la Shoah, ces enfants ou ces bébés dont la mort parfois atroce est passée entre les mailles de la compassion tout simplement parce qu’ils avaient été estampillés de cette marque d’infamie ressortie de la naphtaline de l’Histoire pour cette population uniquement. Ils avaient une famille, un métier, des amis, des passions et des rêves. Ils avaient un visage. Un regard. Ils voulaient vivre, construire, rire, prier et chanter. Ils voulaient participer au destin du peuple juif de retour sur sa terre ancestrale.
Il faudrait des jours pour raconter la vie et le parcours de chacun d’entre eux. Rien que la juxtaposition de leurs photos à celle de leurs assassins permet de constater quel gouffre moral et civilisationnel les sépare.
Les contours de leurs visages se font plus précis, des noms reviennent, des sensations ressenties au moment de la parution de la nouvelle tragique, et je pense à la manière dont leur mort a été fêtée dans les rues de Gaza ou de Ramallah, minimisée ou même justifiée à l’étranger tout comme dans certains milieux en Israël d’ailleurs. Je pense à cet abominable universitaire israélien qui répond au nom de Professeur Zeev Sternhell, pur produit de l’intelligentsia de la gauche israélienne, qui en 2001 écrivait dans Haaretz : « Si les Palestiniens avaient un tant soit peu de bon sens, ils concentreraient leurs attentats contre les Juifs de Judée-Samarie ».
Comme si les jeter par-dessus bord amènerait plus de tranquillité aux « bons Israéliens » qui vivent à l’ouest de la barrière de sécurité, pour paraphraser Péguy lorsqu’il dénonçait le lâche abandon du capitaine Dreyfus par de nombreux Juifs qui pensaient s’acheter une respectabilité dans la société. La triste réalité prouve hélas qu’il n’en n’est rien. Dans la terminologie palestinienne, chaque Juif israélien est un « colon » et il est donc une cible légitime en tant que tel.
Sans même entrer dans le débat sur cette immense tartufferie internationale qui s’est construite autour de ce terme de « colon », ces personnes méritaient-elles d’être mitraillées, poignardées, égorgées, lapidées ou pulvérisées dans des bus ou des restaurants au motif qu’elles habitaient un endroit qui est contesté ?
Les « colons » ont un visage. Un visage qui vous regarde et interpelle votre conscience morale et votre honnêteté intellectuelle.
Je suis un « colon ». Un « colon » qui retrouve les lieux qui sont décrits dans le livre le plus lu dans l’Histoire de l’humanité. Je suis un « colon » qui marche dans les pas de ses lointains ancêtres. Je suis un « colon » qui participe à son humble niveau à la libération d’une petite partie des gigantesques territoires occupés il y a quatorze siècles, par la force du cimeterre, aux cris d’ »Allah ou-Akhbar », ce mot d’ordre qui résonne à nouveau dans de si nombreuses contrées.
Shraga Blum pour I24