En exclusivité pour vous, cher lecteur de LPH Info, nous vous donnons chaque semaine rendez-vous pour découvrir un épisode des « AVENTURES EXTRAORDINAIRES DE MOÏSE LEVY ». Découvrez un conte initiatique, savourez un road-movie, laissez-vous emporter par un flot d’émotions, une cascade de rire, une larme de mystères et un soupçon de fantaisie.
Résumé épisode 2 :
Moïse Levy doit prendre le bus pour Tel-Aviv mais comme il n’a pas de carte de crédit, il ne peut pas acheter le billet. Une jeune femme bavarde l’aide. Pendant le voyage, il se souvient de l’attaque de son kibboutz quand il était enfant. Plus tard, Moïse sympathise avec un citoyen américain prénommé Arieh, un hassid de Satmar.
Le Dibbouk
Tel-Aviv Savidor Central Station, Namir Road
Moïse descend du bus et fait signe au chauffeur de lui ouvrir le coffre. Le Kiboutznik – qui est entièrement vêtu de noir – disparaît dans la pénombre. Arieh le distingue à peine au pied du bus, et lui fait un signe de la main. Moïse répond de la même manière, puis s’approche du coffre qui s’ouvre automatiquement.
– boite à Dibbouk ouvre toi, murmure Moïse en se penchant vers l’ouverture.
Il saisit son premier sac, mais le second, celui ocre-brun qu’il utilise pour transporter les bougies est un peu plus loin. Il se hisse sur la pointe des pieds, pousse un paquetage bleu et gris, et… stupéfaction ! Un monstre vert avec des yeux comme des phares le foudroie du regard. Moïse marque un temps, essaie de prononcer un mot mais reste pétrifié, ce qui lui semble être une éternité, quelques secondes en fait. La porte du bus se referme alors que Moïse est à moitié dans le coffre. Il est happé par le mouvement, se retourne et pousse la porte de toutes ses forces. Le bus démarre alors que ses pieds sont bloqués par le trottoir. Il prononce d’une voix sourde : – Shemaʿ Yisrā’ël…
Une main tire Moïse vers l’arrière. Il tombe du bus, en même temps que plusieurs sacs. Insensible au désarrois du Kiboutznik, le véhicule et ses passagers poursuivent leur route.
– Je ne sais pas ce qui me surprend le plus… dit une voix derrière Moïse, toujours assis sur le trottoir, hébété, regardant en direction du bus.
– … que ce mécréant de Moïse Levy soit à Tel-Aviv ou qu’il prie face au danger, dit David hilare.
– Il y avait un Dibbouk ! dit Moïse en regardant devant lui.
– Dans le coffre du bus ? A quoi ressemblait-il ? demande David en aidant son ami à se relever.
– Vert, petit, des grands yeux et des oreilles pointues.
– Quel Balagan ! dit David en rassemblant les sacs.
(rires étouffés) David montre à Moïse un sac à dos d’enfant, en forme de « bébé Yoda »
– J’ai trouvé ton Dibbouk !
David fait tourner le sac sur lui-même, en le tenant à bout de bras. Des autocollants de Star Wars sont collés sur les côtés. David donne un coup sur le sac et deux lumières s’allument, au niveau des yeux du personnage de « la guerre des Étoiles ». Moïse a un mouvement de recul, puis essaie de dissimuler sa réaction en époussetant ses vêtements.
– Mes bougies doivent êtres cassées, se désole Moïse.
– On va voir ça chez moi. Viens je suis garé plus loin.
– Tout sauf le bus.
– Nous pouvons prendre le faucon Millénium, dit David en rassemblant les sacs.
– J’ai les références tu sais,… il y a Netflix au Kibboutz, se justifie Moïse.
David et Moïse marchent sous les lampadaires avec 4 sacs chacun. Ils disparaissent dans l’obscurité. Leurs pas résonnent dans la rue déserte, puis David siffle le générique de Star Wars.
Un peu plus loin, David s’approche d’un banc sous un lampadaire. Il pose la main sur le dossier en bois, s’assoit et esquisse un sourire en direction de Moïse. Ce dernier marque un temps puis l’imite : – Ta voiture ?
– Juste là, répond David en faisant un signe de la main.
Moïse considère son vieux téléphone à clapet : – Il est cassé.
David l’interroge : – Tu sais pourquoi c’est si difficile d’obtenir un renouvellement de passeport chez nous ?
– Tu meurs d’envie de me l’apprendre, répond laconiquement Moïse.
– C’est à cause d’un israélien d’origine norvégienne qui réclamait un renouvellement de passeport.
– Et ?
– Le Ministère de l’Intégration a demandé au gars pourquoi il voulait un nouveau passeport.
– Et ?
David marque un temps, ménage son suspens : – il a répondu « Pour dissimuler mes comptes bancaires ».
Moïse sourit : – Réponse honnête.
– Résultat, maintenant il faut 6 mois pour avoir le passeport bleu et une vie pour le rouge, dit David en regardant très fixement son ami.
– Moïse fait un léger mouvement de tête et lui dit : – Tu essaies de m’hypnotiser ?
– six mois pour un passeport, sous réserve de ne pas être coupé du monde.
– Je n’ai pas l’intention de quitter le pays, assure Moïse en moulinant avec les mains.
– Faut voir. Après ton appel, j’ai fait des recherches. J’ai retrouvé ton père. Il vit en Corse.
– Où ?
– En Corse, le pays de Napoléon.
A cette annonce Moïse se fige quelques instants, puis se lève, marche lentement, un pas, deux, trois, s’enfonce dans l’obscurité, revient sous le halo de lumière, s’assoit, regarde devant lui.
– et je n’ai pas de passeport pour aller le voir.
– et tu n’as pas encore de passeport, ponctue David.
Moïse ferme les yeux, inspire longuement et regarde David.
– Il y a une solution…
– Lo, répond Moïse
– Comment ça non ? Je n’ai rien dit
– Tu vas me demander un truc pour le Mossad
– On dit « l’Institut »
– Je n’ai aucune compétence pour « l’Institut », je ne comprends rien au monde qui m’entoure, alors jouer les espions…
– Tu es malin
– Loin du Kibboutz, je suis comme un enfant.
– Je suis ton ami, dit doucement David.
– Tu es… avant tout… un… comment on dit déjà ? Un Katsa ?
– Un Katsa c’est un agent de collecte.
– Peu importe David. Tu es mon ami, n’essaies pas de me recruter pour le Mossad. Surtout pas en profitant de mes faiblesses.
– Je suis ton ami et tu devrais écouter ma proposition.
– J’ai déjà compris. Si je refuse ta proposition, je n’ai pas de passeport
– Moïse…
– Et donc je ne retrouve pas mes parents que je croyais morts depuis 25 ans,
– Moïse…
– C’est ça mon choix ?
– Oui et c’est une faveur. Tu peux avoir un passeport, un compte en banque avec de l’argent dessus et une carte bancaire, demain.
– Et après ? Demande Moïse.
– Tu vas à New-York, ça te prends 24 heures et le lendemain, tu as un vol et un taxi pour la Corse. Je ne peux pas faire mieux.
– Avec tes relations tu ne peux pas obtenir un passeport sans contrepartie ?
– Tu sais que nous sommes en guerre ? s’exclame David
– Et tu me recrutes moi « monsieur personne » pour ta guerre
– Ma guerre ?
– Oui ta guerre.
– Tu es maladroit Moïse. C’est celle de notre peuple.
– Tu as décidé de vivre les armes à la main, pas moi.
– Je vis les armes à la main pour que toi tu n’ais pas besoin de le faire.
– Alors pourquoi me recruter aujourd’hui ?
– Nous avons besoin de ton anonymat. Pour une mission, une seule.
Moïse fronce les sourcils : – Tu as conscience que je suis sans ressources dans ton monde ?
– C’est faux. Tu es intelligent, tu parles plusieurs langues et surtout tu es hyper créatif.
– Chalaqqah, murmure Moïse.
– Non je ne te flatte pas, c’est sincère, dit David en prenant le bras de Moïse. Il ajoute : – Tu vas retrouver ta famille et aider Eretz Yisrael.
– Le couplet patriotique maintenant ? C’est quoi l’histoire ?
– Un trafiquant chinois vend des armes de destruction massive à…
– Oy ! Et Moïse Levy va lancer des éclairs de ses fesses pour le détruire ?
– Écoute…
Moïse fait un geste pour faire taire David. Il se frotte la barbe lentement, dit doucement : – Le dôme de fer à moi tout seul…
Silence.
Moïse se lève avec la souplesse d’un reptile, fait deux pas, s’enfonce dans l’obscurité, revient sous le halo de lumière, s’assoit, regarde devant lui.
– Vous n’avez personne à New-York ?
– Nous sommes en sous-effectif
– Tu veux que je fasse quoi d’ailleurs ?
– Tu auras juste à vérifier des adresses. Des sièges de sociétés. Il faut savoir s’il y a de l’activité et éventuellement trouver un certain Karl Lee.
– Le cousin de Bruce Lee, celui qui va me découper en rondelles ?
– Le risque zéro n’existe pas, mais tu seras moins en danger à New-York qu’au « Shtetl Gan Eden » dans les prochains jours.
– Tu…
– Ne t’inquiète pas, je m’occupe de nos amis au kibboutz.
– Et pour l’expulsion ? demande Moïse.
– Je m’en occupe aussi, il y a quelque chose de pas clair dans cette affaire, répond David.
– Mon univers s’est effondré en deux jours, murmure Moïse.
– C’était plutôt il y a 25 ans, murmure à son tour David en donnant très doucement un coup de tête latéral à Moïse.
Un groupe de policiers s’approche de Moïse et de David. Une policière regarde attentivement un des sacs posé au pied de Moïse, bleu et orange, un paquetage militaire. David se lève et rejoint les policiers, en tirant les sacs derrière lui. Moïse observe la scène avec attention. David dit doucement aux policiers : – je travaille pour le bureau du premier Ministre. Un policier fait un signe de la tête. Ils continuent à discuter mais leurs propos sont inaudibles pour Moïse. Il voit David et les policiers regarder dans sa direction. David donne ensuite les sacs aux policiers, puis revient vers Moïse. Les policiers s’éloignent.
– Qu’est ce que tu leur a dit ?
– Que tu es le Ramsad.
– Moi ? Le Directeur du Mossad ? dit Moïse en éclatant de rire.
– Plus c’est gros, plus ça passe, répond David en s’esclaffant.
– Bravo Agent D.
– Je ne suis pas un katsa, je suis beaucoup plus
– Moi je serais un katsa ?
– Lo, ce n’est pas un recrutement. C’est juste un service pour un service. Tu nous aides, on t’aide.
– Je dois dormir, je te répond demain.
– Mazal u’bracha ? dit David en lui tendant la main
– Demain.
– A quoi bon attendre mon frère ?
Moïse s’approche lui murmure à l’oreille : – J’avais un doute depuis notre enfance, mais là c’est confirmé.
– Quoi donc ? dit David en le regardant dans les yeux.
– C’est toi mon Dibbouk !
Rendez-vous la semaine prochaine pour le prochain épisode des « AVENTURES EXTRAORDINAIRES DE MOÏSE LEVY».
https://www.facebook.com/les.aventures.extraordinaires.de.Moise.Levy