Yossi Sariel était le commandant de l’unité de renseignements 8200 le 7 octobre 2023. Il a démissionné de son poste en septembre 2024 en endossant sa part de responsabilité dans l’échec colossal qu’a été le 7 octobre.
Cette semaine, Sariel a pris la parole lors d’un rassemblement et rappelé sa responsabilité tout en critiquant le Chef d’Etat-major qui a failli lui aussi ce jour-là et les rapports de Tsahal sur ces événements dramatiques.
»Le 7 octobre, à 06h29, je n’ai pas accompli ma mission comme l’attendaient mes subordonnés et mes commandants, comme je l’exigeais de moi-même, et surtout – et c’est ce qui me fait le plus mal – comme l’attendaient de moi les citoyens de ce pays que j’aime tant », a déclaré Sariel.
Il a ajouté: »Lorsque j’ai été nommé commandant de l’unité 8200, on s’attendait à ce que de tels événements ne se produisent pas. Et pourtant, cela est arrivé. Moi, Yossi, j’ai échoué. Je comprends que l’on ne peut pas revenir en arrière, je m’incline et je demande pardon, profondément. J’ai une responsabilité à 100 % ». Je n’ai pas besoin ni envie de la partager. Le 7 octobre n’est pas un accident. C’est une maladie grave qui s’est propagée au sein de l’armée. Et la chose la plus importante – interroger, analyser, comprendre pour faire face à cette maladie – nous ne l’avons pas faite. L’élément essentiel manque au rapport. Il n’a pas été étudié, et malheureusement, ce n’est pas un hasard. »
Sariel est revenu sur les signes avant-coureurs, observés la nuit précédant l’attaque : « Tous les commandants savaient que le Hamas avait réactivé ses cartes SIM à travers la bande de Gaza et remis en service ses infrastructures d’urgence. Et pourtant, nous ne comprenions pas pourquoi ils faisaient cela. Il y avait aussi des signaux rassurants, c’est vrai. Mais si nous avions posé la question à une personne ordinaire dans la rue, qui n’a pas suivi de cours d’officier du renseignement ni de formation de commandant: ‘Si ce sont les signes observés, faut-il que les chars restent en position et que les drones soient dans le ciel ?’ Que nous aurait-elle répondu ? Et même si, cette nuit-là, nous avons supposé qu’il ne s’agissait que d’un exercice du Hamas, ne valait-il pas mieux être préparé à une éventuelle manœuvre ennemie près de la frontière ? Tout cela ne nécessite que du bon sens et une véritable coordination entre le renseignement et les commandants – une coordination qui, jusqu’à présent, n’a toujours pas été examinée en profondeur. »
Il a poursuivi en reprochant à l’armée en général de ne pas assumer sa responsabilité: »L’un des hauts responsables du Hamas a confié à un ami, trois jours après le 7 octobre, qu’une heure avant l’attaque, ils avaient envisagé de l’annuler car ils ne voyaient aucune force en face – ils ont alors pensé que Tsahal leur tendait peut-être une embuscade. Pendant de longues heures, l’armée est restée paralysée : il y avait beaucoup d’activités, tant sur le terrain qu’au sein de l’état-major, avec un afflux massif de civils et de forces arrivant en renfort. Mais l’ensemble du système militaire israélien n’a pas fonctionné pendant des heures. Et pourtant, dans tous les debriefings, du matin jusqu’aux conclusions finales, les seuls à avoir admis des défaillances étaient ceux du renseignement. Tous les autres commandants n’ont reconnu que quelques erreurs mineures. À l’exception du renseignement, dans toute l’armée, pas une seule faute n’a été officiellement signalée. »
Sariel a conclu: « Ce n’est pas un accident, c’est une maladie grave qui s’est propagée. Dans l’armée, nous n’avons pas envisagé sérieusement le scénario d’une guerre déclenchée par surprise. Nous n’avons pas considéré la branche militaire du Hamas comme une véritable armée, et c’est ainsi que nous avons toléré sa présence à quelques minutes seulement de nos localités. Nous pensions avoir une double assurance : la barrière de sécurité et le renseignement, non seulement pour nous alerter, mais aussi pour nous fournir une image claire de la situation. Tout cela repose sur des problèmes structurels : des failles culturelles, des erreurs de jugement et des défauts dans notre organisation même. »
L’ancien chef de 8200 demeure pourtant optimiste: »Je suis optimiste car j’ai confiance dans la jeune génération ».