La loi Etat-Nation : où est le péché originel? (par Albert Lévy)

Albert Lévy est économiste, homme d’affaires et candidat pour la 21e Knesset du parti Zehout, créé par Moshé Feiglin. Dans cette tribune, Albert Lévy revient avec brio surle sujet de la loi Etat-Nation.
albert.levy@albert-levy.com

Certains se demandent en quoi la loi Etat-Nation, qui a fait tellement de bruit, était nécessaire.
En effet, nombreux sont ceux, y compris parmi les partisans de la loi, qui pensent que celle-ci ne fait qu’enfoncer une porte ouverte. Le drapeau d’Israël n’est-il pas ce qu’il est depuis la création de l’état ? L’emblème de celui-ci n’est-il pas la Menora ? Et la Tikva est bien notre hymne national.

Le problème est ailleurs : Il remonte à la déclaration d’indépendance de l’Etat d’Israël. On peut lire dans ce document remarquable les extraits suivants :

« …en vertu du droit naturel et historique du Peuple juif et conformément à la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies, nous proclamons la création d’un État juif en terre d’Israël qui portera le nom d’ÉTAT D’ISRAËL. »

Et plus loin :

L’état d’Israël « assurera la plus complète égalité sociale et politique à tous ses habitants sansdistinction de religion, de race ou de sexe ; il garantira la liberté de culte,de conscience, de langue, d’éducation et de culture ; il assurera la protection des lieux saints de toutes les religions et sera fidèle aux principesde la Charte des Nations unies.

…Nousdemandons – face à l’agression dont nous sommes l’objetdepuis quelques mois – aux habitants arabes de l’État d’Israël de préserver la paix et de prendre leur part dans l’édification de l’État sur labase d’une égalité complète de droits et devoirs et d’une juste représentation dans tous les organismes provisoires et permanents de l’État. »

Sur la base de ce texte, tout semble parfait. Où est le problème ?

Le problème est que nous avons par cette rédactionmanqué de respect aux non juifs d’Israël. Oui, vous avez bien lu : Nous leur avons manqué de respect. Je m’explique par un exemple :

Supposez un instant que je sois un habitant arabe musulman du nouvel état d’Israël, le jour de la création de l’état, soit le 15 Mai 1948. On vient me voir et on m’annonce :

« Ahmed, tu es Israélien. Tu es instantanément citoyen d’un pays dont le drapeau est un Talith avec une étoile de David, dont l’emblème est la Menora et la Tikva son hymne national. Compris ? Tiens, prends ta carte d’identité et ton passeport Israéliens. Au revoir ! »

Ce comportement de la part du nouvel Etat d’Israël est un manque de respect, à tout le moins une attitude paternaliste, notamment envers ces musulmans arabes, nouveaux citoyens d’Israël. Le problème est que l’on ne leur a pas demandé leur avis et qu’en conséquence nous n’avons pas recueilli leur accord ou… leur désaccord.Il est là, le péché originel.

Maintenant, plus de 70 années se sont écoulées, que fait-on ?
D’abord, on s’excuse, le plus officiellement du monde, envers les citoyens non juifs d’Israël, pour leur avoir imposé la citoyenneté Israélienne sans les consulter. Normal, non ?

Ensuite, on leur tient le langage suivant : Mesdames et Messieurs, vous avez pu à loisir observer l’état d’Israël et y vivre vous, vos parents et grands-parents, pendant plus de 70 ans. Nous nous sommes excusés de vous avoir imposé la citoyenneté Israélienne sans vous demander votre accord. Aujourd’hui, nous posons la question individuellement à chacun d’entre vous et après si longtemps vous avez tous les éléments d’information à votre disposition pour répondre en toute connaissance de cause. Alors, voulez-vous être citoyens d’Israël ?

Si vous dites non, nous respecterons votre décision et vous pourrezrester ici et vivre en paix avec nous. Vous serez résidents permanents, pas citoyens. Mais notez bien qu’en conséquence, vous ne disposerez pas du droit de vote. Comme dans toutes les démocraties éclairées, seuls les citoyens votent.

Si vous dites oui, nous respecterons tout autant votre décision. Mais dans ce cas également, vous devrez assumer les conséquences de celle-ci. C’est-à-dire :
– Vous devrez accepter Israël tel que la déclaration d’indépendance l’a défini, c’est dire un « État juif en terre d’Israël » et prêter serment de loyauté envers cet état.
– Vous devrez faire votre service national. Comme tout citoyen. Nous acceptons l’idée que vous ne voudriez pas porter les armes contre vos frères arabes, pour ceux d’entre vous qui sont arabes. Mais un service civil sera obligatoire et consacrera ainsi votre attachement au pays dont vous êtes citoyens.
– Vous devrez être en règle sur le plan fiscal, en particulier payer votre taxe d’habitation, l’Arnona. Comme tout citoyen.
– Vous devrez construire votre maison muni d’un permis de construire en bonne et due forme. Comme tout citoyen.
– Vous n’aurez pas de droit d’insulter nos soldats ni les traiter d’assassins. Comme tout citoyen.
– Vous n’aurez pas le droit de coopérer avec des organisations terroristes, telles que le Hezbollah, le Hamas et autres. Comme tout citoyen.
– Vous n’aurez pas le droit d’inciter à la violence et à la haine. Comme tout citoyen.
– Vous n’aurez pas le droit d’encourager au boycott de l’état d’Israël. Comme tout citoyen.

En un mot, comme le précise l’extrait de la déclaration d’indépendance cité ci-dessus, vous devrez prendre votre « part dans l’édification de l’État sur labase d’une égalité complète de droits et devoirs ».

Car, voyez-vous, la démocratie véritable c’est l’égalité des droits et des devoirs !

Albert LEVY

albert.levy@albert-levy.com