Article de Shy Nathanael, publié dans AJ Mag décembre 2024
Il y a un point sur lequel nous sommes tous d’accord : nos soldats sont nos héros. Nous cherchons parfois les mots pour définir cette grandeur que nous voyons en eux. Cela va au-delà de la force et du courage. Ils nous donnent chaque jour des leçons de vie. L’histoire que nous allons vous raconter aujourd’hui est édifiante : l’histoire des héros de Tsahal dans la vie et dans la mort.
Au moment de l’enrôlement dans l’armée, les jeunes Israéliens doivent passer un certain nombre de tests et de visites médicales. On leur demande, entre autres, s’ils accepteraient de faire un don de moelle osseuse en cas de besoin. Leur accord donné, on leur fait un test salivaire qui permettra de définir les critères de compatibilité. Ainsi, à tout moment, ils peuvent être appelés pour un don de moelle épinière.
Daniel Hamou, combattant du 202e bataillon de la brigade parachutiste, a été tué au mois de mai dernier dans le camp de Jebalia, à Gaza, avec quatre autres soldats. Ce que peu de gens savent sur cet héroïque guerrier, c’est que quelques jours avant le début de la guerre, Daniel a eu l’opportunité de sauver une vie après avoir reçu un appel lui annonçant qu’il était compatible avec une femme de 60 ans qui nécessitait une greffe d’urgence pour avoir la vie sauve – ils étaient compatibles à 100 %, ce qui est extrêmement rare.
Daniel n’y a pas réfléchi à deux fois : en raison de l’urgence, il a immédiatement commencé une procédure accélérée de tests en vue de la greffe. Le 7 octobre, le processus de don était censé commencer – mais comme on le sait, la guerre a éclaté. Daniel a été envoyé au combat et le don de moelle malheureusement annulé.
Même quand il était au plus fort des combats sur le champ de bataille, Daniel n’a pas abandonné la procédure. L’armée et l’association Ezer MiZion ont travaillé sans relâche pour faire sortir Daniel du front au plus vite et rendre le don possible. Finalement, le 26 octobre, Daniel a réussi à faire un don de moelle osseuse pour cette femme qu’il ne connaissait pas, lui sauvant ainsi la vie. Dans une vidéo bouleversante, immédiatement après le don, il a déclaré : « Je suis un combattant mais je peux aussi faire un don pour sauver des vies. Ce sentiment est très fort. » Quelques mois plus tard, il tombait au combat. Sa vie continuera à travers la femme qu’il a sauvée.
Agrashev, avait fini son service militaire depuis dix ans déjà quand il a reçu un appel lui demandant de faire un don de moelle osseuse pour un patient atteint d’un cancer. Mais précisément à ce moment-là, il était enrôlé comme réserviste et se trouvait à la frontière avec Gaza, juste avant l’entrée terrestre de Tsahal. Prêt à se battre contre l’ennemi, et prêt à donner de lui-même pour sauver un civil de son pays entre la vie et la mort. Agrashev raconte : « Je ne voulais pas renoncer à participer à la guerre, mais je ne voulais pas non plus renoncer à donner de la moelle osseuse. Je leur ai demandé quelle était la dernière heure pour faire un don. La réponse était fin décembre, Je suis d’abord allé me battre, et à mon retour de Gaza, j’ai fini par donner de la moelle osseuse. C’est un grand privilège de sauver une vie. »
Moshé avait lui aussi accepté de donner de sa moelle osseuse en cas de besoin. Les années ont passé et il a oublié. Quatre mois avant qu’il soit appelé pour un don, il était en service permanent dans une unité d’élite. « Alors que j’étais assis dans le bureau avec l’un de nos officiers supérieurs, raconte-t-il, ils m’ont appelé et m’ont dit que j’étais jugé apte au don de moelle osseuse. J’ai commencé à hésiter, j’avais entendu dire que cela faisait mal et que c’était invalidant. L’officier assis dans la pièce s’appelait Boukris. Il m’a demandé : “Pourquoi hésites-tu ? J’aurais aimé être à ta place et pouvoir donner de la moelle osseuse.” Il m’a convaincu. Il m’a même dit en plaisantant : ”Si tu ne donnes pas de moelle osseuse, je te la retirerai moi-même !” J’ai alors fait les tests pour le don qui a été fixé au 10 octobre. J’ai été libéré de l’armée un peu avant, on m’a fait des injections qui m’ont provoqué des douleurs en bas du dos. Le 7 octobre, à sept heures du matin, Boukris m’a appelé. Comme je suis réserviste dans l’unité régulière dans laquelle j’ai servi, je me suis préparé. Boukris était commandant adjoint de l’unité. Arrivés sur place, nous avons pris les armes et avons couru vers les kibboutzim du Sud. Alors que j’étais en route, j’ai appris que Boukris était tombé, tué par les terroristes, ainsi qu’un autre officier alors qu’ils étaient sur la route du kibboutz Na’hal Oz. Boukris était mon meilleur ami à l’armée ; et avec toute ma peine, je me suis juré que je ferais ce don de moelle osseuse à sa mémoire. J’ai dû me faire des piqûres en plein milieu des combats. Je n’avais pas le droit de porter des objets lourds, pourtant mon équipement pesait beaucoup. Quelques jours après, au milieu de cette tragédie, j’ai pu sortir et aller aux obsèques de mon ami, et faire le don de moelle qui a pu sauver le malade. »
Un pourcentage important des donateurs sont des soldats de Tsahal
« Les militaires de Tsahal représentent un pourcentage important des donneurs », précise Yehudit Itiel, directeur de la base de données nationale des donneurs de moelle osseuse de l’association Ezer MiZion, qui ajoute : « En 2023, 496 dons ont été effectués, dont 408 provenaient de donateurs passés par l’armée. Au total, depuis la création de la base de données, 5490 dons ont été enregistrés, dont 3863 proviennent de donateurs ayant rejoint l’armée. Pendant la guerre, cela nous a très fortement saisis. »
Selon les statistiques il y a une chance sur un million d’être compatible pour un don de moelle osseuse. Comment, dans un si petit pays que le nôtre, peut-on trouver autant de candidats qui “matchent”, et en plus avec une très forte proportion au sein de l’armée ?
Un patient qui a besoin de recevoir un don de moelle osseuse subit un traitement très agressif avant la greffe. S’il ne reçoit pas le don, cela peut lui coûter la vie. Cette année, Il a fallu trouver des solutions avec l’armée car les soldats étaient tous partis au combat. Pendant la guerre, nous avons eu le privilège de voir nos héros sauver des vies, pas seulement sur le champ de bataille. Nous avons vu leurs efforts et leur engagement pour venir contribuer à sauver la vie d’une personne qu’ils ne connaissaient pas. Ce sentiment prend une dimension particulière cette année où nous avons perdu tant de nos concitoyens.
Article de Shy Nathanael, publié dans AJ Mag décembre 2024