Dans le cadre de conférences que je donne actuellement en France sur le Jihâd et son impact sur l’Europe et sur Israël, j’ai l’occasion de discuter avec des Français, chrétiens et juifs, de suivre les émissions télé et d’écouter les débats à la radio. J’y assiste à un phénomène massif de déni, quant aux buts de l’État islamique et de Frères musulmans dans leur guerre déclarée contre l’Occident. Les informations se concentrent sur des sujets seconds : l’identité des terroristes, les véhicules qu’ils ont utilisé, etc. Un des spécialistes a même déclaré : « Nous ne pouvions absolument pas prévoir ces attentats ». Qu’en est-il vraiment ? L’État islamique publie une revue intitulée Dâr al-Islâm. Le titre du deuxième numéro était : Qu’Allah maudisse la France !, et on y trouve écrit : « Il faut que la France pleure ses morts comme nous pleurons les nôtres, qu’ils voient le sang des leurs couler comme nous voyons celui des nôtres ». Et pour ceux qui n’auraient pas compris, ils ajoutent : « Nous avons des hommes qui aiment la mort comme vous aimez la vie ». L’État islamique présente sept raisons pour légitimer sa guerre contre la France : la France est une terre d’islam, puisqu’elle a été conquise au huitième siècle, et c’est donc un devoir individuel pour chaque musulman de combattre pour qu’elle redevienne soumise à la loi islamique ; la France a attaqué l’islam aux temps des Croisades ; elle l’a de nouveau attaqué au temps de Napoléon ; elle est coupable d’avoir colonisé des pays musulmans ; des Juifs la dirigent, comme Valls, mariée à une Juive ; la France a interdit le port du voile dans l’espace public ; la France bombarde avec ses avions de chasse des cibles de l’État islamique. Les attentats étaient donc clairement prévisibles.
Les organisations françaises proches des Frères musulmans condamnent les attentats du 13 novembre, et donnent l’impression de représenter un islam modéré. Mais la raison de leur condamnation tient à la méthode employée par l’État islamique et pas au but visé, à savoir la conquête de l’Europe par l’islam. Pour les Frères musulmans, et à leur tête le cheikh Qaradhawi, cette conquête doit se faire par le biais de la fertilité des femmes musulmanes en Europe, par l’immigration massive de musulmans qu’il faudra endoctriner, et par l’appel (daʿwa) à l’islam des populations autochtones vieillissantes. L’un des fondateurs de l’Union des Organisations islamiques de France (UOIF) avait déclaré il y a dix ans déjà : « L‘UOIF est une fusée à deux étages. Le premier étage est démocratique, le second mettra en orbite une société islamique ».
François Hollande doit son élection aux voix musulmanes : plus de 90% des Musulmans français ont voté pour lui. Les contrats juteux signés avec les pays musulmans riches et les investissements des pays du Golfe dans l’économie française aveuglent les dirigeants en place. La gauche ne coupera donc probablement pas la branche sur laquelle elle est assise. La droite, quant à elle, est aussi impliquée dans des relations douteuses avec ces pays. Les médias sont embrigadés dans le déni de la réalité : Le Monde a publié le 18 novembre un article accusant le gouvernement français d’ignorer la grave politique de « l’extrême droite » israélienne, ce qui serait une des causes majeures des attentats de Paris.
Les Français sont exaspérés des positions de leurs dirigeants. Une majorité d’entre eux pensent que l’islam est incompatible avec les valeurs françaises. Les Juifs français vivent dans la peur, quand plus de 80% des Musulmans français ont des positions antisémites, et quand les agressions contre des Juifs deviennent des faits quotidiens.
Dans cette situation, il faut s’attendre à une montée en flèche des partis d’extrême droite, comme le prévoyaient les sondages avant même les attentats du 13 novembre. Une partie de cette extrême droite étant antisémite, les Juifs de France vont se trouver pris entre le marteau islamique et l’enclume antisémite classique. Il faut s’attendre à une Alya massive basée, comme si souvent hélas dans le passé, sur un coup de pied opportun.
Ephraïm Herrera est docteur en histoire des religions, diplômé de la Sorbonne et vient de publier « Les maîtres soufis et les peuples du livre » aux Éditions de Paris, ainsi que « Le Jihad, de la théorie aux actes » et « Étincelles de Manitou » aux éditions Elkana.
Photo by Laurence Geai/Flash90