L’association Regavim qui s’est fixée comme mission de surveiller l’extension de la construction palestinienne illégale en territoires C et de lancer des alertes sur le sujet, a publié ses données pour la période allant de mai 2021 à avril 2022.
Les territoires C sont les territoires de Judée-Samarie, qu’Israël contrôle totalement, aussi bien sur le plan civil que sécuritaire. A l’inverse les territoires A sont totalement sous autorité palestinienne et les territoires B sont sous l’autorité civile palestinienne et sécuritaire israélienne. Ce partage découle des accords d’Oslo.
Dans les territoires C donc, tout doit passer par Israël et notamment l’administration civile dirigée par le ministère de la Défense.
En 2009, le Premier ministre palestinien, Salam Fayyad, a lancé un programme de création de facto d’un Etat palestinien. A l’aide de gros moyens financiers, mis à disposition par l’Autorité palestinienne et par des organismes européens, le programme consiste à construire le maximum dans les territoires C, sans autorisation, en choisissant des terrains qui permettent de garantir une continuité territoriale palestinienne et sur des dizaines de milliers d’hectares.
Si au commencement de ce projet, les constructions palestiniennes étaient vétustes, aujourd’hui, il s’agit de villas, de parcs d’attractions et autres projets immobiliers de luxe.
Les premières années, l’Etat d’Israël ne s’apercevait pas vraiment de ce qui se passait lentement mais sûrement sous son nez. Mais le travail de l’association Regavim a commencé à porter ses fruits.
Sous les gouvernements Netanyahou, le phénomène n’a pourtant pas été pris suffisamment au sérieux. Il faudra attendre 2019 pour que les ministres Smotrich et Elkin posent le problème sur la table du cabinet de sécurité. A partir de cette date, les services de l’Etat commencent à étudier sérieusement la question et il semble que les choses commencent à bouger, mais rien de concret ne se produit sur le terrain.
Lorsque l’accord de la coalition actuelle est signé, Zeev Elkin qui devait devenir ministre du Logement, a déclaré avoir posé comme condition le contrôle et la maitrise des constructions palestiniennes illégales en territoires C. Il en faisait une affaire personnelle et s’engageait à les combattre.
Un an plus tard, le résultat est pour le moins décevant. Le journaliste Kalman Liebskind rapporte dans Maariv en cette fin de semaine, l’ampleur de la construction illégale palestinienne qui a connu une augmentation exponentielle pendant les dix premiers mois du gouvernement Bennett-Lapid.
Les chiffres sont sans appel. Entre avril 2021 et mai 2022, 105 bâtiments illégaux ont été construits en territoires C chaque semaine, 450 par mois. En tout en moins d’un an en ce sont 5355 constructions palestiniennes illégales qui sont sorties de terre.
Entre 2019 et 2021, elles s’étaient étendues de 400 hectares. Entre avril 2021 et mai 2022, de 720 hectares. Il s’agit d’une augmentation de 80% sous le gouvernement actuel, 2.5 fois plus en Samarie, près de 2 fois plus dans le Binyamin et 66% de plus dans le Goush Etsion.
Les Palestiniens prennent du terrain depuis le nord de la Samarie jusqu’au sud de Har Hevron suivant une planification méthodique. Un ministère est dédié à cela au sein de l’Autorité palestinienne.
Le ministre de la Défense, Benny Gantz, rappelle toujours quand on l’interpelle sur ce sujet, que son rôle est d’empêcher les constructions illégales des deux côtés et se vante de le faire. Sur le terrain, rappelons que la construction palestinienne illégale s’étend sur 10500 hectares alors que du côté israélien, les constructions légales et illégales ensemble représentent à peine 6500 hectares. Si l’on ne prend en compte que les constructions illégales juives le rapport est encore plus parlant: on compte 4382 constructions de ce type côté israélien contre 81317 côté palestinien.
Pourtant, les images de petits avant-postes démantelés sont courantes alors que l’Etat d’Israël ne fait quasiment jamais appliquer la loi lorsqu’il s’agit de constructions palestiniennes.
Le parallèle fait par le ministre Gantz est donc contredit sur le terrain. D’autant que, comme le fait remarquer le journaliste Liebskind, les constructions juives sont, en général, collées au territoire d’un yishouv existant et d’un terrain déjà sous contrôle israélien alors que les palestiniennes poussent un peu partout y compris dans les réserves naturelles et les sites archéologiques, loin de tout point de peuplement existant, grapillant des centaines d’hectares et fixant sur le terrain une réalité irréversible. Et c’est sans compter les constructions arabes en territoires A et B.
L’association Regavim tire de plus en plus fort la sonnette d’alarme craignant que si rien n’est fait, d’ici quelques années, les quelques yishouvim juifs de Judée-Samarie ne soient encerclés par des villes arabes et que le plan de Salam Fayyad ne se réalise: la création d’un Etat palestinien de facto, avec une continuité territoriale.