Par Vanessa De Loya Stauber
La pièce itinérante présentée à Tel-Aviv sous le titre « Les combats d’une effrontée » retrace le parcours d’une femme inspirante encore à ce jour.
Simone Veil incarnée avec brio et finesse par Cristiana Reali restitue la gestuelle et la personnalité d’une femme sobre, rigoureuse, intense et lumineuse qui a voulu effacer sa féminitude au profit d’une constante préoccupation: faire entendre la voix des défavorisés. Porte-parole des prisonniers en France et durant la guerre, des prisonniaires algériennes violées et maltraitées ; des handicapés et des malades du Sida.
Suite a des études de droit, elle fut nommée haut fonctionnaire au conseil d’administration de l’office de radiodiffusion-télevision ORTF. Comme Ministre de la santé, elle dépénalisera le recours à l’interruption volontaire de grossesse – IVG – connu comme la ‘’loi Veil ‘’.
Première présidente du parlement européen, elle s’appliqua à promouvoir la réconciliation franco-allemande, oeuvrant à la construction européenne.
Au conseil constitutionnel, elle siègera 9 ans avant d’être élue à l’Académie Française.
Pour son ultime demeure, le Président Macron la consacra Icone en l’accueillant au Panthéon !
Née à Nice avec une enfance heureuse interrompue par le nazisme, sa mère, lectrice de magazine de gauche fut un modèle d’influence. Son mari, architecte, retenu au grand prix de Rome exigea d’elle qu’elle renonce à ses études de chimie pour se consacrer à sa famille. Suite à cette concession elle signifia à sa fille l’importance des études donnant lieu à l’excercice d’une profession autonome. Simone se jura de réussir là où sa mère avait renoncé à son épanouissement sous la pression maritale.
Lors d’un séjour au ski, elle rencontre son futur mari Antoine Veil, alors inspecteur des finances. Elle le stimule à préparer l’ENA. L’absence de réciprocité envers l’ascension de son épouse se manifesta mais n’eut pas gain de cause. Il devint M. Simone Veil !
Déportée à 16 ans à Auschwitz- Birkenau avec sa mère et sa sœur, tatouée sur le bras gauche, elle creusa des tranchées et déchargea des camions d’énormes pierres. Sauvée par une ex-prostituée devenue Kapo, subjuguée par la beauté de Simone, elle négocia d’être transférée accompagnée de sa mère et sa sœur au camp de Bobrek surnommé le sanatorium. S’en suivit la marche de la mort de 70 km dans la neige vers Gleiwitz pour atterrir à Bergen-Belsen toutes les trois.
Là elle perdit sa mère, atteinte du typhus. Sa sœur y survivra.
Le sort final de son père et son frère déportés reste une énigme ….
A son retour en France, elle n’évoqua sa déportation qu’en 1976 lors d’un documentaire.
Elevée dans une famille juive laïque ancrée culturellement, son père aimait dire ‘’ le peuple juif demeure le peuple élu, étant celui du livre, de la pensée et de l’écriture’’.
Simone préconisait la spécificité juive de la Shoah.
Elle vota plus d’une fois à gauche par enthousiasme pour Pierre Mendès France.
Quand J.Chirac reconnut la responsabilité de la France dans la déportation des juifs, elle salua son geste de vérité.
Avec son énergie de survivante d’un évènement exceptionnel, (la tentative d’extermination de tout un peuple) cette femme de 89 ans au destin panthéonisé continuera à inspirer toutes générations confondues.
Merci à cette pièce pour l’avoir réactualisée si intensément .
Pauline Susini nous a délivré une mise en scène dépouillée et poignante.
Vanessa De Loya Stauber, psychanalyste.
Oui, j’ose le dire encore et aujourd’hui même dans ce commentaire “j’aime Simone Veil” depuis toujours… et malgré son décès, je ne dis pas “j’aimais” mais continue à dire “j’aime” cette femme. Et pour reprendre l’expression de Jean d’Ormesson dans son discours d’accueil à l’académie française “Madame je vous aime”.