Question :
Cher Rav, soit la situation suivante : une personne a commencé à consommer à son domicile un aliment, après avoir récité la bérakha appropriée. Lorsqu’elle sort et l’emporte avec elle, doit-elle réciter à nouveau cette même bérakha avant de pouvoir achever de le consommer ?
Réponse :
Votre question touche à la notion de « Chinouy Makom (changement d’endroit) » que la halakha retient comme pouvant interférer sur la récitation des bérakhot relatives aux aliments. Illustrons cette notion au moyen de l’exemple suivant : je mange, chez moi, après avoir récité la bérakha appropriée, la moitié d’une pomme, puis je sors, sans en emporter la seconde moitié ; de retour, je serai dans l’obligation, avant de pouvoir consommer le restant de cette pomme, de réciter à nouveau cette même bérakha. Il en ira de même si en en pleine rue me prend l’envie de manger une autre pomme.
Mais qu’en est-il, et ici je rejoins votre question, si je commence à manger une pomme à mon domicile, et l’emporte avec moi pour continuer à la manger à l’extérieur ? Dans ce cas comme dans de nombreux autres similaires, la question qui se pose est de savoir si la notion de « Chinouy Makom » tire à conséquence ou pas.
Les décisionnaires sont plus que divisés à ce sujet.
Ainsi, le Kaf Ha’haïm (Ora’h ‘Hayim chap. 178 § 15) est d’avis que si l’on sort de chez soi en tenant en main le fruit en question, la notion de « Chinouy Makom » ne tire pas à conséquence, et de ce fait, il n’y a nul besoin de réciter à nouveau la Bérakha.
Le Zikhonot Eliahou (Brakhot lettre Chin § 6) ainsi que le Réa’h Sadé (chap. 148) vont dans un sens identique, s’appuyant pour ce faire sur ce que dit le Choul’han Aroukh (chap. 178 § 1) à propos de la notion de « Chinouy Makom » : « Celui qui mange dans une maison, puis interrompt son repas pour le poursuivre dans une autre maison est dans l’obligation de réciter à nouveau les Bérakhot appropriées ». D’où il ressort, de leur point de vue, que ce n’est que dans le cas où s’est produite une interruption dans l’acte de consommation que la notion de « Chinouy Makom » est d’actualité, et non pas lorsqu’elle se poursuit en chemin.
En revanche, le ‘Hayé Adam, célèbre décisionnaire Achkénaze, dont le Michna Béroura (Ora’h ‘Hayim chap. 178 § 39) rapporte les propos sans les contester, est d’avis que le fait de tenir en main l’aliment en sortant de chez soi n’entame en rien l’effectivité de la notion de « Chinouy Makom ».
Face à cette divergence d’opinions, le Rav Moché Lévy (Birkat Hachém tome 3 chap. 11 § 16) recommande de prendre en compte les deux opinions mentionnées ci-dessus et d’adopter la conduite suivante :
- Si la quantité de l’aliment consommé à domicile est suffisante pour devoir réciter la Bérakha finale « Boré Néfachot », on la récitera avant de sortir, et, une fois dehors, on récitera à nouveau la Bérakha relative à l’aliment en question.
- Si tel n’est pas le cas, ou s’il s’agit par exemple d’un verre de café chaud après la consommation duquel la récitation de la Bérakha « Boré Néfachot » ne s’impose jamais, l’on s’abstiendra, une fois dehors de réciter la Bérakha relative à l’aliment en question.
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Rav Azriel Cohen Arazi
Bien que complètement ignare au sujet des rituels juifs, mais aussi d’autres religions, j’ai souvent remarqué que la réponse du Rav, est presque invariablement une réponse de “Normand”: ptèt ben qu’oui, ptèt ben qu’non!