Réponse :
Afin de répondre à votre question, il me faut l’analyser sous ses différents aspects.
D’une part, la question de l’interdiction de mettre sous tension la machine à laver pendant Chabbat ne se posera pas si l’on prend la précaution de le faire avant l’entrée de Chabbat, à savoir avant le coucher du soleil, ou pour être plus précis en l’anticipant d’une vingtaine de minutes, et ce afin, grâce à ce rajout, d’honorer le Chabbat en en allongeant la durée (« Tosséfet Chabbat »).
D’autre part, la seconde question qui pourrait se poser est celle de la « Chévitat Kélim », c’est-à-dire le devoir de laisser nos ustensiles au repos le jour de Chabbat. Dans le cas qui nous occupe, si l’on met en marche la machine à laver avant l’entrée de Chabbat, mais qu’elle continue à tourner après, il s’avèrerait qu’elle ne serait pas totalement restée au repos pendant Chabbat. Mais un tel devoir existe-t-il vraiment ?
Ce point fait l’objet d’une importante controverse entre Beth Chamaï et Beth Hillel (cf. Traité Chabbat 18 :). Tandis que selon Beth Chamaï il existe un devoir d’ordre toranique de laisser les ustensiles au repos durant Chabbat, selon Beth Hillel, ce devoir ne concerne que les êtres humains et les animaux, et en aucun cas les ustensiles. Dès lors que c’est l’opinion de Beth Hillel qui a ici force de loi, il est par conséquent nullement interdit de faire « travailler » une machine à laver pendant Chabbat.
Enfin, la dernière question qui se pose est celle de « Hachmaat Kol », à savoir l’interdiction de laisser fonctionner pendant Chabbat des appareils bruyants, de crainte, qu’à leur écoute l’on en vienne à penser, à tort, qu’ils ont été intentionnellement mis en marche pendant Chabbat.
Ce point fait l’objet d’une discussion entre le Choul’han Aroukh et le Rama. Selon le Choul’han Aroukh (cf. chap. 252 § 5), il est permis de mettre en marche un moulin à farine hydraulique juste avant Chabbat afin qu’il accomplisse sa tâche pendant Chabbat, et ce bien qu’il s’agisse d’un moulin très bruyant lorsqu’il fonctionne. Partant, il est possible d’étendre cette autorisation du Choul’han Aroukh à tous les appareils apparentés, et donc y compris au cas de la machine à laver. Par contre, le Rama est d’avis qu’il est interdit de laisser en marche ces appareils bruyants durant Chabbat, sauf si cela est susceptible de causer une perte d’argent significative.
Il ressort de ce qui précède que les membres des communautés Séfarades qui se conforment systématiquement à l’opinion du Choul’han Aroukh, sont autorisés à mettre en marche une machine à laver juste avant Chabbat. Ceci étant, il est à noter que le Or Létsion l’interdit a priori. Par contre, pour les membres des communautés Achkénazes, qui de manière tout aussi systématique se conforment à l’opinion du Rama, une pareille utilisation d’une machine à laver durant Chabbat est très problématique. Je ferai cependant remarquer qu’il est des cas où même les communautés Achkénazes se montreront souples à ce sujet. Par exemple, lorsqu’un soldat rentre à la maison le Vendredi quelques minutes avant l’entrée de Chabbat et doit la quitter pour regagner sa base peu après la sortie de Chabbat. En ce cas, même selon le Rama, il sera autorisé à mettre ses vêtements dans la machine à laver avant Chabbat, et ce en dépit du bruit qu’elle produira pendant Chabbat. (cf. Chout Yé’havé Daat tome 3, chap. 18 et Or Létsion tome 2, chap. 16 § 10).
Je tiens à préciser que concernant les appareils, tels que réfrigérateur, climatiseur, réveil matin, que l’on a l’habitude de régler avant Chabbat, il n’y a aucun interdit à les laisser fonctionner pendant Chabbat, même selon les décisionnaires Achkénazes, dès lors qu’à l’esprit de personne ne viendra le soupçon qu’ils ont été intentionnellement mis en marche pendant Chabbat.
Rav Azriel Cohen-Arazi
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