Question:
Cher Rav, y a-t-il lieu de réciter une bénédiction lors de l’accomplissement de la Mitsva de Hachavat Avéda (tenter de restituer un objet perdu à son propriétaire)?
Réponse:
Votre question est plus que pertinente. En effet, dans la plupart des cas, l’accomplissement d’une Mitsva va de pair avec la récitation d’une bénédiction. Ainsi en va-t-il de la pose des Téphilin, de l’allumage des Nérot de Chabat etc. Or, un survol rapide des ouvrages des décisionnaires démontre qu’il existe, entres autres, deux exceptions à cette règle: la Mitsva de Tsédaka et celle de Hachavat Avéda pour lesquelles aucune bénédiction n’a été instituée. Je me propose ici d’expliquer pourquoi.
A propos de la Tsédaka, les décisionnaires ont avancé deux raisons permettant de rendre compte de cette “anomalie”. D’une part, expliquent-ils, lorsque de la Tsédaka est proposée à un pauvre, rien n’assure qu’il va l’accepter. S’il la refuse, la bénédiction prononcée l’aurait été en vain. Quant à réciter la bénédiction après avoir constaté que le pauvre a accepté l’argent proposé, est chose impossible puisque cela contredirait le principe selon lequel la récitation des bénédictions liées aux Mitsvot doit être “Over Léassiatan”, c’est-à-dire, doit précéder leur accomplissement, et non pas le suivre. Une fois que la Tsédaka proposée est acceptée, la Mitsva est accomplie, et il est donc impossible de prononcer quelque bénédiction que ce soit. D’autre part, expliquent-ils, il est toujours possible que le prétendu pauvre auquel la Tsédaka est proposée ne soit qu’un imposteur, auquel cas la bénédiction aurait été prononcée en vain.
Les décisionnaires raisonnent de manière identique au sujet de la Mitsva de Hachavat Avéda. Lorsque la personne qui a ramassé un objet perdu parvient à retrouver son propriétaire, il est toujours possible que ce dernier refuse, pour une raison ou une autre, d’en reprendre possession. Si tel est le cas, il s’avèrerait que la bénédiction qu’elle aurait prononcée l’aurait été en vain. Quant à réciter la bénédiction après que le propriétaire de l’objet l’a récupéré, cela est impossible en vertu du principe “Over Léassiatan” précédemment évoqué. De plus, il est possible que le propriétaire, s’étant aperçu de la perte de l’objet ait déjà fait Yiouch, c’est-à-dire ait montré qu’il désespérait de jamais le retrouver. En ce cas, le fait de le lui restituer ne constitue désormais plus une Mitsva au sens strict du terme pour celui qui l’a trouvé puisqu’il est en droit de se l’approprier. Par conséquent, toute bénédiction prononcée en cette circonstance l’aurait été en vain. Mais alors, pourquoi ne pas avoir institué une bénédiction venant célébrer l’ensemble des démarches préliminaires entreprises afin de tenter de restituer l’objet perdu à son propriétaire, à savoir ramasser l’objet, le mettre à l’abri chez soi, procéder à la Hakhraza, c’est-à-dire faire savoir oralement ou par voie d’affiche qu’un objet a été trouvé etc.? En fait, c’est précisément parce qu’il s’agit de démarches préliminaires permettant l’accomplissement de la Mitsva, “Hekhcher Mitsva” dans le langage des Maîtres, sans être la Mitsva elle-même. Par exemple, la Mitsva de la Soucca ne consiste pas dans sa construction, celle-ci ayant statut de “Hekhcher Mitsva”, mais dans le fait d’y résider. Or nos Maîtres n’ont pas jugé bon d’instituer une bénédiction sur ce qui relève du “Hekhcher Mitsva”. (cf. Chout Hidour Mitsva, p.11, Soulam Yaakov chap.48)
Il est cependant une circonstance dans laquelle une personne ayant trouvé un objet perdu a le devoir de réciter une bénédiction. Il s’agit du cas où elle est en droit de se l’approprier, par exemple lorsqu’elle est certaine que son propriétaire avait déjà fait Yiouch lorsqu’elle l’a ramassé. En ce cas, cette personne récitera la bénédiction “Chééh’iyanou” si elle est la seule à tirer profit de l’objet trouvé, ou “Hatov Véhamétiv” si ce profit est partagé avec autrui. Il est important de noter que la coutume est de réciter ces bénédictions sans faire mention du Nom de D, sauf s’il s’agit d’un objet de grande valeur ou procurant un certain sentiment de joie, telle une somme d’argent importante, ou encore un vêtement de prix. En ce cas l’on récitera la bénédiction “Chééh’iyanou” avec la mention du Nom de D. (cf. Kaf Hah’ayim chap.222 § 42 )
Rav Azriel Cohen Arazi
Sur www.torahacademy.fr vous pouvez poser vos questions au Rav et consulter