Deux montagnes figurent de façon prééminente dans l’histoire juive : le Mont Sinaï, sur lequel nous reçûmes la Torah de D.ieu, et le Mont Moriah, le Mont du Temple à Yérouchalayim-Jérusalem
La ville. Le Mont Moriah est comparé à la ville, avec ses quartiers, ses espaces publics et privés, et représente l’apogée d’une telle hiérarchie de l’espace : il y a dix “cercles” géographiques, chacun étant un domaine de sainteté et de restrictions, des frontières de la Terre Sainte jusqu’à la chambre la plus intérieure du Beth-haMikdache-Temple, le Kodèche ha-Kodachim-Saint des Saints. Cette idée est une illustration matérielle : la voie de l’homme vers D.ieu est composée en de nombreux niveaux et à chacun d’entre eux, l’individu doit pouvoir être jugé méritant avant de pouvoir continuer.
Le désert. Le Mont Sinaï représente un sommet qui est accessible à tous, sans restriction ni protocole : la Torah est ouverte à tous, tout comme le désert est sans propriétaire et sans zones circonscrites. La véritable maîtrise de la Torah requiert le Messirath Néfèche – don de soi total. Selon les paroles du Midrach, « celui qui ne fait pas de lui-même un désert ne peut acquérir la Torah ».
Le camp. En ce qui concerne les détails de la Torah, Rabbi Ichmaël suit l’opinion qu’ils furent enseignés à Moïse dans le Michkane, le Sanctuaire portable. Rabbi Akiva, en revanche, affirme que « les principes généraux et les détails furent enseignés au Sinaï ». Le Michkane était le précurseur du Temple, épicentre du campement des Hébreux, le plus intérieur d’une série de périmètres marquant des domaines d’une sainteté croissante, tout comme le fut après le Temple sur le Mont Moriah. En plein désert, le camp des Israélites et le Sanctuaire au centre représente la “civilisation”, un lieu structuré et divisé en zones classées selon leur fonction et leur sainteté. Rabbi Ichmaël voit La Messirath Néfèche le don de soi, comme la qualité “générale” élémentaire de la Torah qui doit ensuite donner cours à une étude structurée de ses détails. Rabbi Akiva soutient que la Torah n’est que désert : un terrain ouvert de Messirath Néfèche sans restriction.
Le rigoureux et le passionné. Rabbi Ichmaël, un tzadik, était un érudit de longue date et un Cohen Gadol. Rabbi Akiva, un Baal Téchouva, était un descendant de convertis et un berger inculte jusqu’à l’âge de quarante ans. La voie du Tsaddik est réglée et stable ; la voie du Baal Techouvah, en revanche, est anarchique et volatile, constituée de chutes brutales et d’ascensions météoriques. Le Tsaddik intériorise son Messirat Néfech et construit sur une civilisation sainte ; le Baal Techouvah l’agite pour conduire sa vie explosive. Comme dans toutes les divergences de la Torah, “celle-là et celle-ci sont les paroles du D.ieu Vivant”. Ces deux approches de la Torah doivent se compléter, mêlant la perfection ordonnée de Rabbi Ichmaël à la force et à la passion de Rabbi Akiva.
Myriam Bentolila
D’après les sih’ot du Rabbi de Loubavitch