Deux mois c’est long… certes. Il est néanmoins possible de les envisager avec un autre regard et de les rendre utiles, de les utiliser intelligemment. Afin que ces grandes vacances ne soient pas du temps gaspillé, nous sommes allés demander conseil à Ouriel Porat. Educateur, en poste dans des lycées pour les jeunes en difficulté, il est aussi conseiller pédagogique et conjugal et s’occupe beaucoup de familles d’olim pour les aider dans leur intégration. Son credo pour des vacances réussies: la préparation.
Le P’tit Hebdo: Les grandes vacances sont-elles inévitablement un casse-tête?
Ouriel Porat: Tout dépend de la manière dont on les aborde. Pour qu’elles ne virent pas au cauchemar, au conflit larvé ou déclaré avec nos enfants, il y a une solution: les préparer. Il faut faire une mise au point, avant le début des vacances avec tous nos enfants. Le but de cette ”réunion au sommet” est d’abord de discuter, de partager et d’être à l’écoute. Les enfants ont besoin d’être impliqués dans l’organisation de leurs vacances. Au terme de cet échange, on doit pouvoir établir un planning des deux mois à venir. Ainsi, tout le monde connait le programme et l’ambiance est plus sereine.
Lph: Que faire lorsque les différences d’âge sont importantes au sein de la famille?
O.P.: Cela fait partie des valeurs de la vie à inculquer à nos enfants. On est une famille, tout le monde a le droit de profiter. Il pourra arriver que certains soient moins satisfaits que d’autres un jour mais le lendemain on veillera à faire une activité qui leur convient. Chacun son tour. Savoir faire des compromis, se préoccuper du bien-être des autres, c’est cela aussi la famille. Il existe des sorties et des jeux qu’il est très agréable de faire ensemble et qui plaisent aux petits comme aux grands. L’essentiel est d’être ensemble, de se retrouver, de se parler, en oubliant les téléphones.
Lph: Le principe est séduisant, mais il est parfois difficile de s’entendre avec des ados. Doit-on et à partir de quand utiliser la contrainte?
O.P.: A priori, si l’on a établi le programme avec nos enfants, ils doivent y souscrire. La contrainte dépend des enfants. Mais dans l’absolu, le fait de réfléchir ensemble à des occupations s’avère productif. On peut, nous parents, être force de proposition: faire du volontariat, travailler pour gagner de l’argent, faire du sport, des excursions, lire, les idées ne manquent pas. Ce qui compte c’est de limiter le nombre d’heures devant les écrans.
Par expérience, je peux affirmer que les ados sont souvent demandeurs de donner du sens à leurs vacances. J’ai été récemment avec mes élèves dans une maison de retraite. Ils en sont ressortis heureux et les pensionnaires aussi! Les adolescents veulent se sentir utiles, savoir que l’on a besoin d’eux. Le volontariat est une très bonne idée et les endroits où en faire sont nombreux. Il peut aussi se pratiquer au sein de la famille: les plus grands s’occupant des plus petits. On peut envisager de les récompenser nous-mêmes lorsqu’ils font une activité non rémunérée.
Les parents doivent accompagner leurs enfants dans ces démarches, pour trouver l’activité, le lieu qui leur correspondent le mieux. Ces projets procurent du sens et une satisfaction et fixent un rythme dans ces journées de vacances.
Lph: Doit-on aussi les pousser à ouvrir leurs livres et leurs cahiers, pour que leurs vacances aient du sens?
O.P.: J’ai bien peur que ce ne soit perdu d’avance… Pour les plus jeunes, il existe des cahiers de vacances, on peut les encourager à s’y atteler quelques heures. Pour les plus grands, c’est encore plus compliqué. Je conseille davantage de les emmener à la bibliothèque, de les laisser choisir des lectures. Là encore, on peut les récompenser à la clé. Tout ceci, et c’est fondamental, demande aux parents un investissement. Si on veut que nos enfants ne perdent pas leur temps, notre rôle est primordial. Il ne s’agit pas d’être présent non-stop, mais de les guider.
Ouriel Porat
Lph: Vous vous occupez d’olim hadashim, quels conseils donnez-vous à ces derniers pendant la période des vacances? Comment la mettre à profit?
O.P.: C’est une période propice pour déstresser. Les enfants qui viennent de faire leur alya et qui finissent leur première année scolaire en Israël ont besoin de se détendre. Il est important de les laisser se relâcher, de leur autoriser des plaisirs strictement francophones, de les laisser faire ce qu’ils aiment. Dans un second temps, il est bon de les encourager à se retrouver avec leurs amis israéliens et de les préparer à la nouvelle rentrée; il ne s’agit pas de tout oublier!
Lph: En tant qu’éducateur, pensez-vous, vous aussi, que deux mois c’est long…?
O.P.: Oui, c’est long. Les conseils que je donne peuvent tenir sur une bonne période, mais deux mois c’est beaucoup. Au risque de vous surprendre, même les enfants peuvent trouver le temps long. Très souvent, d’ailleurs, on constate que les tensions apparaissent fin août. C’est pourquoi, lorsque l’on prépare ses vacances, il faut porter une attention particulière aux deux dernières semaines.
Lph: Que souhaitez-vous aux enfants à la veille de ces grandes vacances?
O.P.: Qu’ils donnent du sens à leurs vacances tout en profitant. Qu’ils utilisent cette période de manière positive. Je les encourage à réfléchir à une manière de faire du bien autour d’eux pendant ces deux mois: bénévolat, aider à la maison, associations, etc.
Lph: Que souhaitez-vous aux parents?
O.P.: Qu’ils sachent être à l’écoute de leurs enfants en prenant le temps et la patience. Qu’ils parviennent à mettre cette période à profit pour développer des liens étroits avec leurs enfants. Et dernier point: qu’ils n’en oublient pas leur couple. Ils doivent, aussi pendant les vacances des enfants, prendre du temps pour eux, sortir. Les enfants ont besoin de voir leurs parents unis, de constater qu’ils ont leurs propres activités ensemble. C’est un des éléments constitutifs de leur confiance personnelle.
Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay