C’est devenu un lieu commun que de dire que ce ne sont pas les faits ou les déclarations qui font l’actualité mais les médias qui fixent l’ordre du jour de ce qui est important et ce qui ne l’est pas, très souvent en fonction d’intérêts politiques. Ainsi, certains propos sont montés en épingle et devinennent un “sujet chaud” qui a pour but d’être imprimé dans la mémoire collective, alors que d’autres, bien plus graves, passent en-dessous des radars, délibérément, et remplissent les oubliettes.
Tout le monde se souvient des propos tenus le 29 juillet 2015 par le député Motti Yogev qui avaient suivi la décision de la Cour suprême de détruire le quartier Dreinoff à Beit-El. Utilisant la métaphore, le député avait accusé la Cour suprême de “charlatanisme” et “d’injustice flagrante”, rajoutant “C’est vers la Cour suprême qu’il faut se rendre avec un Bulldozer D-9!” Propos extrêmes certes mais qui n’avaient aucun effet incitatif: personne n’allait se saisir d’un tel mastodonte et se diriger vers la Cour suprême. N’empêche, cette phrase prononcée dans la colère face à une Cour suprême politisée et souvent déconnectée des réalités, avait provoqué une tempête politico-médiatique dans la quelle Motti Yogev fut accusé de fossoyeur de l’Etat de droit et de la démocratie israélienne. Réflexe pavlovien de la gauche israélienne. Même Naftali Benett avait dû intervenir pour se distancer des propos de son député. Aujourd’hui, encore cette petite phrase “colle à la peau” de Motti Yogev.
La semaine dernière, réagissant à un article du chroniqueur Israël Harel, habitant d’Ofra, dans Haaretz, le Professeur Amiram Goldblum, membre du New Israel Fund et connu pour ses propos outranciers écrivait: “Tant que les chars n’auront pas rasé la maison d’Israël Harel, dans ce centre du terrorisme juif qu’est le village d’Ofra, ainsi que toutes les autres maisons de ce venin religieux, jusqu’à ce qu’elles deviennent de la poussière fine, il n’y aura pas de renaissance d’Israël”.
Ces propos scandaleux ont-ils fait l’objet d’un titre aux journaux télévisés? Non. Il a fallu quelques lignes dans un feuillet distribué dans les synagogues le Shabbat pour découvrir cette incitation juive contre d’autres juifs.
Il y a vingt-cinq ans, ce même Prof. Amiram Goldblum s’est une fois trouvé malgré dans un ascenseur avec Yehiel Leiter, à l’époque porte-parole du Conseil des localités juives de Judée-Samarie contre lequel il venait d’avoir un débat. Yehiel Leiter lui avait dit alors: “Amiram, maintenant nous ne sommes que tous les deux. Vous n’avez pas besoin d’épater le public ou de lancer des slogans préparés d’avance. Pourquoi ne pas rester amis? Pourquoi ne pouvons nous pas discuter ensemble comme des êtres humains?” Réponse de l’universitaire: “Parce que vous n’êtes pas des êtres humains!”
Lorsque les édiles de la gauche accusent régulièrement la droite “d’inciter”, de “diviser la population”, de “semer la haine et la division dans la population”, il faut toujours garder en tête que les propos les plus venimeux et haineux ne viennent pas forcément de là où on croit.
Même s’ils jouissent d’une indulgence médiatique criante.
Photo Hadas Parush / Flash 90