On ne peut accuser Yehouda Meshi-Zahav, président de « Zaka » de faire preuve « d’anti-orthodoxisme » primaire. Il est lui-même tout ce qu’il y a de plus orthodoxe. Mais par ses activités légendaires dans le domaine du secourisme, il est témoin de ce qui se passe dans certains milieux orthodoxes face au Corona et fait part de son inquiétude.
Sans généraliser, Yehouda Meshi-Zahav divise la société orthodoxe en trois groupes quant à l’attitude face aux consignes : un premier groupe, le plus important, qui respecte les consignes avec discipline. Un deuxième, principalement au sein de courants ‘hassidiques, qui estiment que c’est l’Etat d’Israël qui est à l’origine des mesures-barrières et qui choisissent délibérément de ne pas obéir et prennent le risque de la contamination de groupe. Quant au troisième il s’agit des extrémistes à l’image des Netourei Karta, sortes « d’anarchistes » et qui cherchent la confrontation avec la police pour fournir des images de violences et approfondir le fossé entre l’orthodoxie et l’israélisme.
Yehouda Meshi-Zahav fait avec regret le constat que de nombreux orthodoxes sont attirés par le troisième groupe et sont des « négationnistes du Corona ». Il témoigne : « Je visite beaucoup les hôpitaux et je vois qui sont les malades. A l’hôpital Hadassa à Jérusalem, la majorité des malades sont des orthodoxes. Je rencontre aussi des familles de personnes décédées et j’entends des récits difficiles ».
Le fondateur de « Zaka » compare la situation à celle d’un tristement célèbre paquebot : « Cela me rappelle le ‘Titanic’. D’un côté, de nombreuses personnes meurent mais de l’autre, les gens continuent comme si le problème n’existait pas. On oublie que trois malades orthodoxes décèdent en moyenne chaque jour à Bené Berak ». Meshi Zahav dénonce aussi l’hospitalisation à domicile, phénomène qui commence à se répandre dans les milieux orthodoxes, rappelant les énormes risques que cela comporte.
Yehouda Meshi-Zahav est conscient du sentiment qui prévaut dans le monde orthodoxe face aux images de policiers qui font intrusion dans une yeshiva et ferment les livres de Talmud d’élèves qui étaient censés être chez eux en confinement. Mais en tant que responsable d’une organisation spécialisée dans le secourisme, il se trouve souvent en contact avec des familles dont le monde s’est effondré à cause du décès d’une être cher. « Il y a des gens qui paient le prix le plus lourd à cause de ces attitudes irresponsables », souligne-t-il.
Il conclut par un message à l’intention du public orthodoxe : « Il est préférable d’être prudent, que chacun fasse preuve de responsabilité envers sa famille et fasse le calcul de priorité entre les considérations politiques et la réalité sur le terrain. Il vaut mieux porter un masque, maintenir la distanciation et prier en extérieur. Tout ceci est de loin préférable au fait de payer le prix fort de la perte d’êtres proches ».
Photo Abir Sultan / Flash 90