La journaliste Sivan Rahav Meïr a rapporté au lendemain du décès de l’écrivain A.B. Yeoshoua, une histoire qui lui a été communiquée par Michel Allouche, hassid Habad, bien connu dans la communauté francophone, puisqu’il est le traducteur en français des ouvrages du Rav Adin Even Israël Steinsaltz.
Voici ce que Michel Allouche raconte. A l’occasion d’un voyage en France, il a dû mettre ses tefilin dans l’avion compte-tenu de l’heure matinale du vol. Alors qu’il portait encore son talit et ses tefilin, il a été transféré en classe affaires et là il s’est retrouvé à côté d’A.B. Yeoshoua.
Ce dernier l’a interpellé: dans une synagogue d’accord mais pourquoi vous promenez-vous avec votre talit et vos tefilin dans l’avion? Michel Allouche lui a répondu: ”Pourquoi pas? D ieu ne se trouve pas moins dans l’avion que dans la synagogue”.
Les deux hommes ont commencé à discuter. Michel Allouche est ingénieur aéronautique et il a raconté à Yeoshoua qu’en dehors des drones, il s’occupait aussi de traduire les ouvrages du Rav Steinsaltz et qu’il était le cousin de Jean-Luc Allouche, le traducteur en français des livres de l’écrivain. D’ailleurs, Yeoshoua se rendait à Paris pour y recevoir un prix littéraire pour un livre traduit par J.L Allouche.
A cet instant, M. Allouche propose à Yeoshoua de mettre les tefilin. Ce dernier refuse en disant: ”je suis athée”.
Mais cela n’empêche pas les deux hommes d’étudier ensemble une page du livre ”Nechama” que Michel Allouche était en train de traduire, et plus précisément d’un passage sur l’athéisme. ”L’athéisme entraine au moins l’homme à dépasser le stade de l’indifférence et à entrer dans celui de l’affect. Le passage de ”cela ne me concerne pas” à celui de ”cela m’énerve” est en lui-même une étape”. A.B. Yeoshoua a souri à l’écoute de cette argumentation.
A la descente de l’avion, Yeoshoua et Allouche se sont quittés. Quelques jours plus tard, Allouche est invité à faire une conférence dans une école d’ingénieur de Toulouse, mais on lui demande de bien vouloir se présenter sans signes religieux, ce qu’il refuse. Il raconte cette aventure à son cousin Jean-Luc qui était justement encore avec A.B. Yeoshoua. Ce dernier, qui avait été gêné par le fait qu’Allouche porte ses tefilin dans l’avion, a demandé de lui transmettre le message suivant: ”vous êtes obligés d’aller faire cette conférence avec votre kippa”. Et c’est ce qui s’est produit, l’école a même présenté ses excuses à Allouche pour sa demande.
Depuis Michel Allouche, le hassid loubavitch et A.B. Yeoshoua, l’écrivain athée, ont gardé d’excellentes relations.