La notion de malédiction revient onze fois dans la Paracha Ki Tavo. La Torah nous met en garde de préserver et de réaliser tous les commandements divins, mais elle met en exergue onze fautes qui apporteront la malédiction à qui les fera. Quelle est la gravité particulaire de ces actes ? Le rav Meir Weizer plus connu sous le nom du Malbim précise que la gravité de ces actes est qu’ils sont accomplis “en secret” comme nous le précise explicitement les versets. Ces fautes sont réalisées dans des endroits intimes ou bien elles sont le fruit de mauvaises pensées qui vont ensuite provoquer des déboires sur autrui sans que cela ne se sache. Il peut s’agir de fabriquer des statues d’idolâtrie “en secret”, de donner des mauvais conseils à son prochain pour en tirer profit, de ne pas faire justice envers un malheureux ou alors de frapper son prochain “en secret”. Les commentateurs expliquent que propager la médisance sournoisement est une façon de frapper son prochain “en secret”. Le fait de se croire à l’abri du courroux divin parce que ces fautes sont faites “en secret” prouve une crainte de la police humaine supérieure à celle de la justice divine. A l’extérieur, la personne a un comportement exemplaire mais au fond d’elle-même elle est comme un fruit pourri. Le tribunal des hommes est impuissant face à ces hommes corrompus faute de preuves et de témoins de cette haine envers leur prochain. Cette hypocrisie est répugnante et entraîne la malédiction divine qui est une punition affligée aussi “en secret”. Éviter de faire du mal “en secret” est un des challenges de notre génération. Il est tellement facile de semer la haine sur internet sous le voile de l’anonymat. Il est possible de détruire une carrière professionnelle en un clin d’œil ou plutôt en lâchant un post malsain sur un site de référence. Les réactions des internautes sur certains sujets sont telles qu’on se demande si nous sommes retournés à l’époque romaine où il fallait achever son adversaire d’une façon sanglante. Les lois de Lachon Hara sont-elles inexistantes parce que la langue se tait et que seuls les doigts tapent sur le clavier ? N’est-ce point-là cette même faute qui est faite “en secret” et que l’Eternel déteste tellement ? Les implications de cette violence sont graves : des adolescents se suicident suite à des moqueries sur internet. Certaines familles se disloquent suite à des soupçons soulevés sournoisement envers le conjoint. Des carrières s’écroulent à cause d’accusations qui s’avèrent finalement être erronées ; des accusations présentées parfois de bonne foi et parfois pour éloigner un concurrent. Tous ces agissements anonymes sont évidemment contre l’esprit de notre Torah. Est-il possible de trouver du bien dans ce chaos répugnant ? Il semble que nous sommes dans un passage transitoire vers un monde meilleur. Un monde plus pur. De nos jours, nous devons être exemplaires car la moindre dérive se trouvera filmée et partagée des millions de fois sur Facebook. Nous n’avons plus le droit à l’erreur. La moindre faute sera caricaturée. Le moindre soupçon sera exagéré, amplifié et publié à tous. En fait, la situation actuelle nous pousse à faire des efforts pour avoir un comportement irréprochable. Cela provient plus de la crainte des réactions que de la crainte de Dieu et d’une pureté de l’âme. Mais avec le temps, les normes de la société et des comportements vont changer. Cela aura une influence profonde sur l’éducation et sur les sensibilités. C’est certainement là un projet divin, une façon de purifier la société, l’humanité. Mais que de dégâts bilatéraux pour le moment ! Cette explication optimiste de la situation ne justifie pas ces messages publiés sur internet. Les forces du mal font parfois avancer l’histoire de l’humanité, le projet divin, mais il nous est totalement interdit de nous y associer. Notre devoir est de choisir le bien, l’amour et la vie. Soyons donc vigilants. Avant de publier ou de partager une information, mettons-nous à la place de notre prochain : et si quelqu’un parlait de moi de la sorte ? Et si un inconnu publiait de telles informations sur moi ? Comment aurai-je réagi ? Ne faisons pas à autrui ce que nous ne voudrions pas que l’on nous fasse. «Aime ton prochain comme toi-même».
Rav Benjamin David