Le Secrétaire d’Etat américain sortant, Antony Blinken, a accordé une interview au Times à deux semaines de la fin de son mandat.
Il y fait des révélations quant au contenu des discussions parfois houleuses qu’il a eues avec le gouvernement israélien depuis le 7 octobre et revient sur les principaux obstacles qui ont empêché l’obtention d’un accord de cessez-le-feu et de libération des otages jusqu’à maintenant.
Blinken raconte que cinq jours après le massacre du 7 octobre il est arrivé en Israël. »J’ai vu des horreurs qui dépassent ce qu’un homme peut imaginer. Nous étions déterminés à tout faire pour que le 7 octobre ne se reproduise plus ». Par ailleurs, il explique que la préoccupation des Etats-Unis était d’empêcher une régionalisation du conflit.
Il ajoute que la situation des Gazaouis était particulièrement importante pour l’administration américaine: »Les enfants, les femmes, les hommes qui se retrouvaient coincés dans une guerre qu’ils n’ont pas voulue, qui n’avaient pas le pouvoir de l’arrêter, devaient être protégés autant que possible. Ils devaient recevoir toute l’aide pour survivre à ce terrible conflit. Nous avons dit dès le premier jour que nous accordions une importance particulière à la manière dont les actions menées par Israël pour s’assurer qu’il n’y ait plus de 7 octobre devaient être entreprises. Depuis le premier jour, nous avons tenté de garantir que les gens dans la Bande de Gaza disposent du nécessaire ».
Blinken raconte alors sa rencontre avec les officiels politiques et militaires israéliens dans le QG de Tsahal, à la Kirya à Tel Aviv. Nous sommes cinq jours après le 7 octobre et l’aide humanitaire en faveur des Gazaouis est rejetée par le gouvernement mais aussi par la quasi-totalité de la population israélienne, encore sous le choc de la terrible attaque du Hamas. »Nous avons discuté pendant des heures sur le fait qu’une aide humanitaire devait être fournie aux Palestiniens à Gaza », décrit Blinken. Puis il explique comment il a convaincu Netanyahou d’accepter: »Le Président Biden devait venir en Israël quelques jours plus tard. Pendant cette discussion, alors que je me heurtais à une farouche opposition de transférer de l’aide humanitaire, j’ai dit au Premier ministre: ‘Je vais appeler le Président et lui dire de ne pas venir si vous ne permettez pas l’aide humanitaire’. J’ai appelé le Président pour m’assurer qu’il était d’accord et il a totalement coopéré. Nous avons obtenu un accord pour faire entrer de l’aide humanitaire par le passage de Rafah dans un premier temps ».
Dans cette interview, Blinken revient sur les souffrances endurées par Israël, le fait qu’il est attaqué de toutes parts et insiste sur l’engagement des Etats-Unis à garantir la sécurité de l’Etat hébreu.
Parallèlement, il s’attarde aussi sur la situation des Gazaouis: »Nous nous sommes sans cesse préoccupés de la situation de ces gens qui se retrouvaient au milieu de ces terribles champs de bataille. La population palestinienne est traumatisée, j’ai rencontré des Palestiniens américains qui ont perdu des proches à Gaza ».
Le Secrétaire d’Etat américain martèle que la seule solution pour sortir de ce conflit est de parvenir à un accord de cessez-le-feu et de libération des otages. Il pointe deux facteurs qui expliquent pourquoi cet accord n’a toujours pas été obtenu. Les deux sont liés à l’attitude du Hamas.
Le premier est le fait que dès que les conditions convenues étaient rendues publiques, que la pression sur Israël pour accepter plus de concessions augmentait, le Hamas durcissait ses positions. Blinken explique que le second était la conviction du Hamas que le conflit allait s’étendre, que le Hezbollah allait attaquer Israël, que l’Iran allait attaquer Israël. »Il était convaincu qu’Israël allait se retrouver submergé et qu’il pourrait ainsi continuer ce qu’il avait entamé. Nous avons travaillé dur pour que cela n’arrive pas ».
A la question de savoir si Netanyahou a été un partenaire fiable pendant ces discussion autour d’un accord et s’il est vrai qu’il a tenté de torpiller l’accord, Blinken répond: »C’est inexact. Ce que nous avons constaté à chaque fois c’est que le Hamas ne voulait pas conclure d’accord. Il y a eu des situations où les actions d’Israël ont rendu plus difficiles les négociations. Mais il y avait une bonne raison à ces actions même si elles ont pu compliquer les choses ».