Rencontre avec la figure montante de la course au poste de maire de Jérusalem: Ofer Berkovitch.
Lph: Est-ce un atout ou un inconvénient d’être jeune lorsqu’on veut devenir maire ? Certains vous reprochent d’être trop jeune et inexpérimenté pour diriger une ville comme Jérusalem…
Ofer Berkovitch : Je suis au contraire le candidat le plus expérimenté de tous sur le plan municipal, de par mon travail depuis dix ans au sein du conseil et des différentes responsabilités que j’y ai exercées avec succès. Et contrairement à d’autres candidats, je suis né à Jérusalem, j’y ai grandi et je connais les problèmes de la ville. Concernant mon jeune âge, c’est un atout, car j’arrive avec une forte volonté de travailler dur et l’enthousiasme nécessaire pour réaliser les changements.
Lph: On entend dire que vous n’aimeriez pas les religieux, et notamment les orthodoxes…
O.B. : Il y a dix ans, j’ai créé « Hit’orerout » (Réveil) un mouvement de coopération entre non-religieux, traditionnalistes et sionistes-religieux. Aujourd’hui, on y trouve aussi quelques orthodoxes. Ce mouvement a prouvé que la collaboration entre ces différents secteurs de population était possible. La moitié des membres du conseil de notre mouvement sont des sionistes-religieux, dont Dan Illouz, qui est francophone et représente les olim. La moitié des dix premiers candidats de ma liste sont religieux. Personnellement, je viens d’une famille traditionnaliste.
Lph: Alors pourquoi vous attaque-t-on sur la question religieuse ?
O.B. : Beaucoup de gens ont pensé que « Hit’orerout » avait été créé contre le monde orthodoxe alors que son but était de lutter contre la coercition religieuse, qui n’est pas une bonne chose. La religion est quelque chose qu’il faut faire aimer et non imposer. La bonne formule est de permettre à chacun de vivre selon ses conceptions. Il faut certes préserver le caractère juif de Jérusalem et comprendre que c’est la Ville de la sainteté. Jérusalem ne sera jamais Tel-Aviv. Mais il ne faut pas non plus repousser le public laïc qui finira par quitter Jérusalem. Certains, comme Zeev Elkin, tentent de me présenter comme le candidat des non-religieux.
Lph: Il dit également que vous êtes un peu de gauche…
O.B. : Mon mouvement n’est pas affilié politiquement. Il y a des gens venus de tous les horizons politiques. Nous sommes un mouvement qui veut une majorité sioniste à Jérusalem, renforcer la souveraineté israélienne dans sa partie orientale tout en agissant pour toute la population. Nous combattons aussi le gel de la construction dans toutes les parties de la ville. Tout cela vous semble-t-il de gauche ? Je ne crois pas vraiment !
Lph: Comment expliquez-vous que dans cette campagne tout le monde parle de vous ?
O.B. : Parce qu’ils sentent que « Hit’orerout » est une force montante et que je suis en passe de devenir le prochain maire de Jérusalem. La population de Jérusalem a compris que les affairistes sont de l’autre côté et qu’Ofer Berkovitz est le seul qui sera entièrement engagé au bien-être des habitants de Jérusalem.
Lph: Nir Barkat a dit de vous que vous êtes bon en ‘public relations’ mais très inexpérimenté…
O.B. : Cela m’attriste. Nir Barkat a été un bon maire durant ces huit années, mais depuis deux ans, on a ressenti une baisse parce qu’il s’est consacré à son avenir politique sur le plan national. Il est en train de brader Jérusalem à travers une combine politique avec Zeev Elkin : le soutenir pour la mairie et en échange obtenir le soutien de ses partisans lors des primaires du Likoud. Il veut un maire de Jérusalem qui lui soit redevable.
Lph: Votre épouse est d’origine française et vous vous êtes entouré de quelques francophones tels que Dan Illouz ou Sabrina Moïse-Castro. De quelle manière comptez-vous sur les Français de Jérusalem ?
O.B. : Dan Illouz ce n’est pas uniquement sa personne mais tout le potentiel apporté par les olim. Nous avons d’ailleurs la même chose pour les anglophones. Nous voulons ramener les olim à Jérusalem et pas seulement placer un représentant de figuration sur notre liste. Dan Illouz, comme conseiller municipal, a déjà beaucoup agi dans le domaine de l’intégration. Il sera notre responsable des olim au sein du conseil municipal. Et puis il y a Sabrina Moïse-Castro qui pourrait être une excellente conseillère du maire pour les olim de France plus spécifiquement. Par ma famille, je sais toutes les difficultés que connaissent les olim dans leur processus d’intégration. Je suis aussi en contact avec des associations qui oeuvrent auprès des olim de France, telles que le Cœur des Mamans. Sur le plan stratégique, je compte beaucoup sur l’alya de France qui est de grande qualité sur tous les plans. Jérusalem a énormément à gagner à accueillir un maximum d’olim de France.
Lph: C’est curieux, entre les élections, les israéliens francophones sont presque transparents, et lors de chaque campagne, chaque candidat veut avoir « ses » francophones…
O.B. : Chez nous, ils sont déjà intégrés dans un mouvement actif et sont assurés d’avoir une voix au conseil. Si les francophones de Jérusalem veulent être entendus, il faut qu’ils votent pour ma liste et Dan Illouz.
Lph: La majorité de la population francophone de Jérusalem observe le Chabbat, sujet très délicat dans cette ville. Que comptez-vous faire sur cette question ?
O.B. : Notre position est claire : le maintien du statu quo à Jérusalem. Cette formule a permis jusqu’à présent à des personnes de sensibilités différentes de coexister dans cette ville. Alors, lieux de loisirs oui, commerces, non. C’est ainsi que nous arriverons à préserver à la fois le caractère spirituel de Jérusalem et une relative liberté pour ceux qui ne respectent pas le Chabbat. Jérusalem est une ville très sensible pour laquelle il faut agir avec beaucoup de doigté afin d’y respecter les équilibres. Si les non-religieux quittent Jérusalem, ce ne sera plus Jérusalem. Je comprends les inquiétudes de la population francophone et je ne compte pas faire la révolution dans ce domaine. Je comprends très bien ce que représente Jérusalem sur le plan religieux car j’ai grandi dans une famille traditionnaliste. Mes concurrents tentent désespérément de me dépeindre comme un laïc antireligieux. C’est faux.
Lph: Vous parlez beaucoup des jeunes. Que comptez-vous faire pour les populations un peu plus âgées pour qu’elles restent à Jérusalem ?
Dan Illouz : Les programmes mis en place Ofer Berkovitz depuis dix ans ont toujours été au service de tous les habitants de Jérusalem et c’est ce qu’il continuera une fois qu’il aura été élu. Mais il est vrai que « Hit’orerout » a amené une énergie rajeunissante dans la vie politique de Jérusalem et donné une place importante aux jeunes qui veulent changer les choses.
Lph: Si vous êtes élu, quelles sont les priorités que vous vous fixerez ?
O.B. : Les principaux défis sont les suivants : le développement économique et urbain, la lutte contre le gel de la construction, la création d’une grande métropole de Jérusalem, la propreté de la ville et enfin établir des passerelles entre les différents secteurs de population afin qu’ils apprennent à mieux se connaître.
LPH : Que souhaitez-vous aux habitants de Jérusalem à l’orée de cette nouvelle année ?
OB : Une excellente année pour Jérusalem, une année d’essor économique et de coexistence entre les différents secteurs de population, une année qui verra l’élection d’un leadership qui connaît les problèmes de Jérusalem et agira dans l’intérêt de la capitale et de ses habitants. Je souhaite également qu’après les élections, les polémiques et divergences cessent et que nous travaillions tous ensemble pour le bien de Jérusalem.
Propos recueillis par Avraham Azoulay
Photo by Yonatan Sindel/Flash90