En huit ans d’administration Obama, la Judée-Samarie et Jérusalem ont beaucoup souffert d’un Oncle Sam avare de bénédictions lorsqu’il s’agissait de créer quelques logements supplémentaires dans notre pays. Le gel des constructions n’est pas un mythe, il a bien eu lieu et à en croire les Présidents des Conseils régionaux concernés, il n’est pas encore fini.
Nous avons cherché à en savoir plus en allant sur le terrain rencontrer les principaux acteurs de cette dynamique tant souhaitée de construction.
Shlomo Neeman, le fraichement élu Président du Goush Etsion nous a reçus. Cette région est l’une des plus grandes du pays. Avec 24000 habitants, elle s’étend pourtant sur une superficie très importante avec des yishouvim parfois distants de plus de 60 kilomètres. Depuis trois mois, Shlomo Neeman a pris la tête de ce Conseil, soutenu par le francophone Itshak Grunewald. Lui-même olé d’ex-URSS, Shlomo Neeman a un parcours politique régional déjà bien fourni et a également assisté le ministre Zeev Elkin au ministère chargé des Affaires de Jérusalem. Nous faisons avec lui un tour d’horizon des dossiers qui l’attendent et plus particulièrement celui de la construction.
Le P’tit Hebdo: Pourquoi avez-vous décidé de vous présenter à la succession de Davidi Perl ?
S.N.: J’habite dans le Goush Etsion depuis 15 ans. J’estime qu’ici c’est ma maison. Il me paraissait naturel de mettre mes capacités au service de son développement et de sa progression sur tous les plans. La région avait déjà acquis de nombreux atouts, il s’agit donc de s’appuyer sur certains d’entre eux pour aller encore plus loin. Le Goush Etsion est une région riche en valeur agricole, humaine et économique, mais ce n’est pas encore suffisant. Nous pouvons espérer mieux et travailler pour cela.
Lph: Quels seront les premiers dossiers auxquels vous vous attaquerez?
S.N.: Pendant ma campagne, j’ai beaucoup parlé de souveraineté et de construction, d’industries, de développement de la périphérie du Goush Etsion, ces yishouvim peu connus, ces avant-postes.
Mes priorités sont la planification de constructions, le développement de l’éducation, de l’industrie. Nous avons besoin d’investisseurs mais nous avons un manque cruel d’infrastructures pour les accueillir. Nous nous trouvons dans un cercle vicieux auquel je voudrais mettre fin.
Lph: Peut-on parler de gel des constructions dans le Goush Etsion?
S.N.: On ne construit pas, on ne planifie pas. Cela signifie que même si demain on autorisait la construction de 200 unités de logement, je n’ai aucun projet de prêt pour les mettre en œuvre. Parallèlement, il n’est pas simple de trouver des terrains en raison de leur statut juridique parfois ambigu.
Nous devons travailler sur ces deux axes: planifier des projets de construction et revoir la qualification juridique des terrains, pour que de plus en plus soit “terrains de l’Etat d’Israël”, rattachables aux yishouvim. Il s’agit de processus politiques qui sont loin d’être évidents, et nous nous battons pour cela.
Lph: Le Goush Etsion comporte une population d’olim importante. Etes-vous en mesure, compte-tenu de ce que vous venez de décrire, d’en accueillir encore?
S.N.: Il n’y a pas de projets neufs mais le marché du logement, locatif notamment, vit tout de même dans notre région. Nous voulons être une terre d’accueil pour les olim, cela me tient personnellement à cœur. Nous proposons à destination de ces populations des emplois dans la région. Je pense que le Goush Etsion possède les caractéristiques nécessaires pour séduire les olim, particulièrement les Français: nous sommes proches de Jérusalem, notre communauté est très chaleureuse, nous avons un bon niveau éducatif. J’espère que de nombreux projets pourront nous relier à ces populations. Nous aiderons toutes les bonnes volontés qui souhaiteraient en initier.

S.N.: Le Goush Etsion est une zone très touristique mais là encore, ce n’est pas suffisant en raison d’un manque d’infrastructures. Nous retombons toujours sur la même question. Nous avons des projets de développement pour pouvoir augmenter le tourisme dans la région. Cette activité est fondamentale, bien entendu pour la santé économique du Goush Etsion mais aussi d’un point de vue social. Les habitants doivent sentir qu’ils ne sont pas qu’identifiés aux attentats, aux ”territoires”. Ils doivent savoir que leur maison peut être ouverte à tous et qu’on a envie de venir les voir.
Il ne faut pas perdre de vue aussi tous les aspects ”hasbara” dans la venue de milliers de personnes dans le Goush Etsion.
Nous voudrions faire d’autres festivals et évènements, mais les budgets nous manquent.
Lph: Que vous inspirent les discours de Trump? Cela vous préoccupe-t-il lorsque l’on parle d’accord?
S.N.: Eretz Israël me préoccupe toujours. Chaque fois que notre peuple ne décide pas seul de ce qui est bon pour lui, cela m’inquiète. Peu importe les discours, même s’ils sont en notre faveur.
Le problème est profond, il est entre nous et les Arabes. On doit nous laisser décider seuls de quoi faire, des lieux où construire. Sinon, la difficulté augmente encore et toujours.
Si nous avions pu construire librement, aujourd’hui il y aurait un million de Juifs en Judée-Samarie. S’il y avait un million de Juifs en Judée-Samarie, la question de l’Etat palestinien ne se poserait même pas. Cette question est aujourd’hui sur la table parce que nous n’avons pas été maîtres de notre destin et qu’on nous a arrêtés. Peu importe que le Président américain soit avec nous ou contre nous. Ce qui compte c’est qu’il nous laisse travailler.
Lph: On entend dire que les relations entre les Juifs et les Arabes dans le Goush Etsion sont bonnes. Est-ce vrai?
S.N.: Elles sont relativement bonnes. Cela dépend beaucoup des Arabes. Ceux qui ont perpétré de nombreux et grands attentats dans la région ont détruit les relations. Cela dépend aussi des yishouvim. Dans l’ensemble si les habitants du Goush Etsion étaient souverains sur leur terre, ils vivraient en bon entendement avec les Arabes et ces derniers y gagneraient. Mais cela dépend d’eux aussi.
Propos recueillis par Avraham Azoulay
Photos by Gershon Elinson/Flash90